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Journal |
Nat. Sci. Soc.
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Section | Vie de la recherche – Research news | |
DOI | https://doi.org/10.1051/nss/2025030 | |
Published online | 16 July 2025 |
Les savoirs sur l’eau à l’épreuve des terrains. Synthèse d’une année de réflexion collective en ateliers
Examining water knowledge through the lens of fieldwork. Synthesis of a year-long workshop
1
Anthropologie, Université de Montpellier − Paul-Valéry, UMR Sens, Montpellier, France
2
Sociologie, IRD, UMR G-eau, Montpellier, France
3
Sociologie, CIRAD et Institut Agro, UMR G-eau, Montpellier, France
4
Anthropologie, IRD, UMR G-eau, Montpellier, France
5
Sociologie, CIRAD, UMR G-eau, Montpellier, France
* Auteur correspondant : youssoupha.tall@ird.fr
Cet article propose un point d’étape des réflexions sur les « savoirs sur l’eau », menées par un groupe de doctorants et chercheurs dans le cadre d’un séminaire mensuel organisé depuis 2022 au sein de l’unité mixte de recherche (UMR) G-eau. La diversité des savoirs sur l’eau, ainsi que des manières de les concevoir impose une vraie réflexion sur leur prise en compte dans les dispositifs de recherche et de recherche-action. Nous explicitons d’abord le cadre d’interaction mis en place au sein de notre séminaire pour faciliter les échanges et l’expression d’une diversité des conceptions et pratiques de recherche. Nous développons ensuite les trois principaux thèmes issus de nos échanges : i) la « récolte » des savoirs sur le terrain, ii) les liens entre savoirs et pouvoirs et iii) la « rencontre » des savoirs. Espace de réflexion interdisciplinaire, le groupe « Savoirs sur l’eau » (S’Eau) tente de poser les bases d’un collectif à même de discuter des questions critiques, de partager des méthodes et d’expliciter des postures pour développer une réflexivité collective vis-à-vis de pratiques de recherche très diverses. Partager cette expérience est aussi une invitation à étendre cette réflexion au-delà de notre collectif, convaincu de la transversalité de la question des savoirs dans des projets et sur des terrains les plus divers.
Abstract
This article presents the ongoing results of a monthly seminar of the G-eau UMR held since 2022, focused on the diversity of knowledge about water and the challenges of articulating this diversity with the research project and practices. The paper outlines the development of this working group, the questions raised, and the methodologies implemented. We also discussed some difficulties and challenges that motivated us to pursue our exchanges beyond the results of the first year presented here. Although the working group started reflecting on ‘water knowledge’ as a study object, the discussion quickly identified ‘knowledge’ as a transversal topic, since research itself is a process of knowledge production. This prompted us to reflect on our roles as researchers, our interactions with other actors and knowledges, and our relationships with different disciplines. The following main themes were addressed during the first year of our seminar: i) the process of knowledge production; ii) the embeddedness of knowledge in power relationships and legitimacy processes; iii) the diversity and circulation of knowledge. Based on these thematic ‘entries’, we examined critically the concept of ‘knowledge’ itself and the way it is instrumentalized or marginalized in research projects relating to water. Using an inductive approach informed by fieldwork in various regions across the world, we aim to set up a collective (S’Eau) designed to serve not only as a space for interdisciplinary and collective reflection but also as a base to debate critical issues, articulate positions, share suitable methodologies, and promote reflexivity regarding the diverse research practices related to this essential element of life, i.e. water.
Mots clés : ressources naturelles / recherche / savoirs / eau / approche compréhensive
Key words: natural resources / research / knowledge / water / comprehensive approach
© O. Peytavi et al., Hosted by EDP Sciences
This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, except for commercial purposes, provided the original work is properly cited.
Dans les recherches sur l’eau, la question du savoir, avec ou sans majuscule, au singulier ou au pluriel, est omniprésente. Pourtant, elle occupe généralement une place assez marginale dans les dispositifs de recherche et demeure généralement peu explicitement abordée. Une première réflexion sur les savoirs, il y a maintenant dix ans (Aubriot et Riaux, 2013) avait amené ses autrices à identifier à quel point cette question est difficile à traiter, soit parce qu’elle impose aux chercheurs de sortir de leur zone d’expertise (documenter, par exemple, les savoirs scientifiques ou les savoirs locaux), soit parce qu’elle est parcourue par des lignes de fracture importantes, comme l’opposition entre savoirs scientifiques et savoirs dits locaux (Agrawal, 1995). Pour autant, et peut-être justement en raison de sa faible conceptualisation dans le domaine de l’eau, la notion de savoir se présente comme un concept « passeur de frontières » (Jollivet, 1992), particulièrement efficace pour permettre le dialogue entre chercheurs de différentes disciplines et entre chercheurs et acteurs sociaux. C’est ce que nous expérimentons depuis plusieurs années au sein de l’équipe SocioHydro de l’unité mixte de recherche (UMR) G-eau1, où des collaborations se nouent autour de l’idée de s’appuyer sur des savoirs dits « locaux » pour enrichir les savoirs dits « scientifiques », ou encore autour de la volonté de renforcer les connaissances des acteurs de l’eau ou de comprendre la manière dont les « profanes » conçoivent l’eau. Nous avons donc continuellement « à faire » avec des savoirs très divers. Dans les ateliers sur les savoirs sur l’eau (S’Eau), nous nous sommes fixé comme objectif d’interroger la manière dont ces savoirs sont mis en dialogue dans les projets de recherche, et comment ils sous-tendent des décisions et des rapports de force autour de l’eau. Notre posture collective était de ne pas nous enfermer dans une définition préétablie des savoirs (par l’une ou l’autre des disciplines participantes), pour nous concentrer sur les « épreuves » auxquelles ils sont soumis et au cours desquels ils se construisent.
C’est notamment l’ancrage dans le terrain respectif de chacun qui nous a permis de réaliser une mise à distance face aux conceptualisations denses et diverses que contient le mot « savoir ». La première séance en est l’incarnation même : nous proposions d’observer ce que chacun estimait être un savoir en s’appuyant sur des photos de son terrain propre. Nous avons fait le choix de ne pas chercher à trouver un consensus sur « qu’est-ce qu’un savoir », car nous voulions avant tout comprendre « comment ce que j’observe du savoir me dit quelque chose sur la réalité de mon terrain ». Ces séances n’avaient donc pas pour but de définir le savoir, mais de comprendre, à travers les savoirs, les interactions entre humains, mais aussi avec les non-humains.
C’est à partir de ces constats qu’est née l’idée de fonder un groupe de réflexion sur les savoirs sur l’eau. La première séance a eu lieu en décembre 2022, sous l’impulsion des auteurs de ce texte. Le groupe (Encadré 1) s’est révélé vivant et très dynamique, si bien qu’il perdure aujourd’hui, au rythme d’une réunion mensuelle. Au cours de ces réunions, les participants se sont appuyés sur leurs expériences de terrain, ainsi que sur leurs disciplines respectives, pour examiner la question des savoirs sous différents angles.
Liste des membres du groupe S’Eau, année 1 (2022-2023).
Aubriot Olivia, géographe, chercheuse, CNRS, UMR Cesah, terrain : Inde et Népal
Collard Anne-Laure, sociologue, chercheuse, INRAE, UMR G-eau, terrain : France
Cogez Antoine : anthropologue, chercheur indépendant, terrain : France
Daudin Kevin : physicien, chargé d’étude, Institut Agro Montpellier, UMR G-eau, terrain : France
Errero-Brancato Fabienne-Émilie, architecte, doctorante, IMT Mines Alès, terrain : Cévennes
Henriquez Encamilla Daniela, sociologue, doctorante, Institut Agro, UMR G-eau, terrain : Brésil et Chili
Hmouri Abdellah, sociologue, enseignant-chercheur, Université de Meknès, terrain : Maroc
Kurek Margaux : sociologue, ingénieure d’étude, INRAE, UMR G-eau, terrain : France
Kuper Marcel, chercheur en sciences de l’eau, Cirad, UMR G-eau, terrain : Maroc et Brésil
Leduc Christian, hydrogéologue, chercheur, IRD, UMR G-eau, terrain : régions arides et semi-arides
Lejars Caroline, science de gestion, chercheuse, Cirad, UMR G-eau, terrain : Nouvelle-Calédonie
Maamar Mahmoud, sociologue, doctorant, Université de Meknès, terrain : Maroc
Mitroi Veronica, sociologue, chercheuse, Cirad, UMR G-eau, terrain : Brésil
Mohamed Ahmed Salem, hydrogéologue, enseignant-chercheur, École supérieure polytechnique de Nouakchott, terrain : Mauritanie
Peytavi Olga, anthropologue, doctorante, Université de Montpellier − Paul-Valéry, UMR G-eau, terrain : Nouvelle-Calédonie
Riaux Jeanne, anthropologue, chercheuse, IRD, UMR G-eau, terrain : Sénégal et Mauritanie
Rodriguez Javier, agro-écologue, doctorant, IRD, UMR G-eau, terrain : Espagne
Sabri Hind, anthropologue, postdoctorante, Make-it Program, terrain : Maroc
Tall Youssoupha, sociologue, postdoctorant, IRD, UMR G-eau, terrain : Sénégal
Cet article a pour objectif de synthétiser et de partager les réflexions menées durant la première année (saison 1) par ce collectif. Nous présentons d’abord le groupe et son mode de fonctionnement, qui favorise une réflexion collective « à voix haute », puis nous développons trois thèmes qui ont particulièrement marqué les échanges. L’écriture de cette synthèse a également permis de dégager des voies d’approfondissement pour les ateliers suivants, ce que nous évoquons en conclusion.
Des ateliers thématiques, situés et participatifs pour aborder un concept polysémique
L’objectif du groupe S’Eau est de créer un espace de discussion principalement autour des questions méthodologiques, théoriques et éthiques qui découlent de la diversité des savoirs qui s’articulent autour d’un objet aussi universel que l’eau. Quel(s) rôle(s) les différents savoirs jouent-ils dans nos dispositifs de recherche ? Comment permettre, voire faciliter, l’expression d’une diversité de savoirs et leur mise en dialogue, tout en évitant des hybridations réductionnistes ? Ce sont les questions qui ont motivé les activités du groupe.
Le terrain et l’observation comme angle d’approche des savoirs
Le parti pris affirmé dès le départ a été de ne pas chercher à travailler, pour le moins dans un premier temps, avec une définition préalable des « savoirs » ou au prisme de catégories prédéfinies (« savoirs profanes » versus « savoirs scientifiques »). Au contraire, nous avons choisi de nous emparer du foisonnement sémantique du concept pour explorer les formes et les limites de prise en compte de ce qui relèverait du « savoir » dans nos différentes expériences de terrain. Cette non-définition préalable était une façon d’explorer collectivement comment ces savoirs se manifestent dans les pratiques et interactions sociales, et comment nous les situons dans nos pratiques de recherche, par rapport à d’autres concepts comme ceux de connaissance, de représentation, d’indicateur, d’information, de donnée, etc. Au fil des séances, différents questionnements ont été révélés à partir des expériences de terrain, en commençant par la manière dont les savoirs se « forment » et se transforment à travers les interactions sociales, y compris dans le cadre des projets de recherche. Ou encore les processus de légitimation qui permettent de reconnaître des savoirs comme pertinents pour répondre à des enjeux d’ordre technique et/ou social. Comment réaliser la « récolte » des savoirs sur le terrain sans tomber dans des « postures extractivistes » (Godrie, 2021) a également traversé plusieurs de nos séances de travail, ainsi que la prise en compte de la performativité des savoirs, de leur rapport à la matérialité de l’eau et des infrastructures, et la problématique de ce que les savoirs font, en retour, aux mondes dans lesquels ils sont formulés.
Tous ces sujets ont été abordés et illustrés à partir des expériences de terrain des membres du groupe. Pour initier cette approche très concrète des savoirs, nous avons, lors d’une première séance, proposé d’utiliser des photos de terrain à travers lesquelles les participants « donnaient à voir » les manifestations des savoirs sur l’eau sur leurs terrains. Pour les séances suivantes, les animateurs ont proposé des thèmes de réflexion qui ont été examinés par les membres du groupe ou par des chercheurs invités (Encadré 2).
Thèmes des séances du groupe de travail.
Atelier 1. Montre-moi une photo et je te dirai qui tu es. Réflexions sur les savoirs hydrologiques à partir de photos de terrain, novembre 2022
Atelier 2. Savoirs et pouvoirs, janvier 2023
Suivre l’eau du réseau à Touho, Nouvelle-Calédonie, O. Peytavi
Entre ciment et chiffres, la pénurie à Ceará, au Brésil, D. Henriquez Encamilla
Atelier 2bis. Prendre soin de l’eau à travers les savoirs et la mise en récits, février 2023. H. Sabri, C. Lejars et V. Mitroi
Atelier 3. Détourner l’eau : entre échelles de savoirs et légitimation, février 2023
La gestion des pertes d’eau d’irrigation comme processus de légitimation. Périmètre irrigué de Bittit, Maroc, A. Hmouri
Confrontation des savoirs et stratégies de légitimation autour de la « modernisation » de l’irrigation dans le bassin-versant du Segura, Espagne, J. Rodriguez
Atelier 4. La récolte des savoirs, mars 2023
Récolter des savoirs sur une journée interdisciplinaire en Cévennes. F.-É. Errero-Brancato
Atelier 5. La rencontre des savoirs dans nos dispositifs de recherche, avril 2023
Atelier 6. La circulation des savoirs, juin 2023
Savoirs des « esprits » et savoirs des « machines » : penser la circulation par les passeurs, Y. Tall
La force du groupe S’Eau repose sur la variété des disciplines, des approches méthodologiques et des terrains travaillés et présentés. Cette grande diversité des contextes et des dispositifs de recherche a été mise en dialogue par l’échange d’expériences, de résultats, de questionnements, mais aussi de doutes.
Les « Groupitos » : un format hybride et collaboratif
Afin de faciliter le croisement des regards, nous avons opté pour un format collégial, en insistant sur les échanges d’expériences entre chercheurs. Cependant, le format hybride (visioconférence et présentiel), imposé par le rythme des départs sur le terrain, rendait difficile une communication fluide et l’établissement de liens de confiance entre les participants. Le groupe a alors mis en place une stratégie d’animation, par petits groupes, que nous avons baptisée « Groupitos ». Organisés après les sessions de présentation, ces petits groupes de discussion réunissaient les participants par deux ou trois pour traiter d’une question précise en lien avec le thème de la session. Ces questions étaient ensuite discutées pendant 10 à 15 minutes, avant d’être partagées avec l’ensemble du groupe.
Chacun a ainsi pu s’approprier progressivement la thématique des savoirs de façon non conceptuelle, même lorsque celle-ci ne faisait pas explicitement l’objet de ses recherches. À partir de ces cas concrets, nous avons pu aborder très explicitement les manifestations des savoirs dans des contextes diversifiés et les saisir à travers différents supports que sont les interactions sociales, les pratiques, les discours, les infrastructures hydrauliques ou encore les dispositifs de gestion et de gouvernance. Cela nous a conduits à adopter une posture pragmatique dans laquelle nous considérons que les savoirs sont accessibles au regard du chercheur à travers les effets qu’ils produisent et ce que les acteurs en font.
Le thème des savoirs s’est ainsi présenté sous des formes variées. Nous en rendons compte dans la partie suivante à travers les trois principaux thèmes qui sont apparus de manière récurrente dans nos discussions.
« Récolter » et donner à voir des savoirs
Le premier thème qui s’est imposé au groupe a concerné la collecte de savoirs sur le terrain : comment identifier, récolter et restituer quelque chose d’aussi abstrait (et d’aussi puissant) qu’un savoir ? Pour cela, chaque chercheur déploie une stratégie, plus ou moins consciemment. Plusieurs d’entre elles ont été présentées et discutées.
Fabienne-Émilie Errero-Brancato2 nous a ainsi proposé la narration d’une journée de terrain interdisciplinaire avec des hydrogéologues dans les Cévennes. Ce travail s’inscrit dans l’exploration de la circulation des savoirs entre les différentes échelles de territoire et leur évolution en fonction du temps et des agendas politiques. La présentation a mis en lumière plusieurs aspects-clés de ce travail de « récolte » des savoirs. D’abord, la préparation minutieuse de la journée interdisciplinaire, organisée en collaboration avec des hydrogéologues et un géographe. Cette phase de préparation implique une immersion dans le site d’étude et l’élaboration d’une méthodologie permettant la rencontre d’acteurs locaux et l’exploration des sites. La description fine de la journée interdisciplinaire révèle, en filigrane, un ensemble de savoirs qui se rencontrent en miroir les uns des autres et qui font apparaître le terrain comme un espace à la fois social, matériel et sensible.
Cette problématique de la collecte et de la présentation des savoirs a été discutée également à travers deux autres terrains : Olga Peytavi3 nous a amenés en Nouvelle-Calédonie et Daniela Henriquez Encamilla4 au Brésil. À travers l’utilisation de photographies, chaque présentation a guidé l’auditoire à travers un parcours spécifique : celui de l’eau et des techniques de maintenance d’un réseau d’eau potable en Nouvelle-Calédonie ; et celui des données chiffrées et des politiques publiques relatives à l’allocation négociée de l’eau au Brésil.
Le premier parcours a offert une perspective localisée/microscopique en observant de près les activités quotidiennes des quatre fontainiers. En se concentrant sur la matérialité de l’eau, cette approche était ancrée dans les pratiques et mettait en lumière les interactions quotidiennes entre l’eau, les fontainiers et les équipements techniques. L’observation détaillée d’une journée de travail des fontainiers dans la commune de Touho a permis de saisir les enjeux de ce terrain et de faire ressortir les savoirs très spécifiques que chaque acteur manifeste dans ses activités quotidiennes.
La deuxième présentation a adopté une perspective globale/macroscopique en explorant l’histoire de la gestion de l’eau au Nordeste brésilien à travers les politiques publiques de plus en plus basées sur un monitoring chiffré de l’eau disponible au sein des réservoirs stratégiques, dans un contexte de sécheresse récurrente. Ce terrain intègre à la fois les trajectoires historiques des politiques publiques et les projections climatiques futures utilisées dans l’allocation pour orienter les comportements et les décisions en matière de gestion de l’eau. Dans ce cas-là, les savoirs sur l’eau se présentent principalement sous une forme chiffrée, comme support à la prise de décision des acteurs de l’eau.
À travers ces trois cas d’étude, plusieurs points sont apparus essentiels dans le travail de « récolte » des savoirs, qui nécessite finalement de « suivre » la manière dont ces savoirs sont mobilisés par les acteurs de l’eau. Un premier aspect concerne la posture du chercheur sur le terrain, qui se construit à la recherche d’un « équilibre » entre engagement actif et observation distanciée, ou entre observation et participation. Pour sortir de ces dilemmes, l’adoption d’une posture d’« apprenti » est intéressante ; elle permet d’éviter une position surplombante par rapport aux acteurs du terrain, en se plaçant plutôt comme un récepteur attentif des connaissances des autres. En retour, cette valorisation des voix et des expertises des acteurs facilite l’acceptation du chercheur dans la communauté étudiée. Cette posture d’apprentissage favorise également l’émergence des méthodes d’enquête où prévalent les questions descriptives : actions déployées par les acteurs, techniques employées, utilisation d’outils ou d’équipements spécifiques. Cette position d’apprenti contribue aussi à rendre le travail du chercheur plus significatif pour les membres des communautés étudiées.
Cette dualité de posture extérieure/intérieure au terrain analysé est constamment négociée dans le dispositif de recherche et renvoie également à la question de la (non)-neutralité du chercheur, qui influence inévitablement le processus de collecte des savoirs et qu’il est nécessaire d’expliciter dans la méthodologie. La dimension sensible et collective de l’expérience sur le terrain est également soulignée dans ces trois témoignages ; elle est particulièrement bien illustrée dans le cas cévenol, lors d’un moment marquant où tous les participants ont été émus devant un élément naturel. Pour rendre compte de ces aspects sensibles dans la récolte de savoirs, il est nécessaire d’adopter une approche réflexive et adaptative où le chercheur joue un rôle d’écoute active et d’intégration des multiples perspectives et sensibilités rencontrées sur le terrain. Une préparation minutieuse de la collecte des données a été identifiée comme un aspect crucial par les participants qui ont souligné l’importance de la planification préalable, de la répartition des rôles (lorsqu’il s’agit d’un binôme ou d’un collectif) et le défi de devoir « naviguer » entre les responsabilités d’organisateur et de participant, lorsque la démarche se fait participative.
Asymétries, légitimation et pouvoirs
Un second thème s’est structuré autour des questions classiques liées au rapport entre savoir et pouvoir, qui s’expriment dans la production et la circulation des savoirs sur l’eau. Ce thème a été au cœur de deux contributions.
La première repose sur une recherche sociologique menée au Maroc par Abdellah Hmouri5 qui illustre comment la gestion des pertes en eau d’irrigation peut être lue comme un processus de légitimation des savoirs. À travers une approche historique et heuristique, l’auteur a montré comment les savoirs et les discours voyagent dans différentes époques et échelles sociopolitiques, participant à la construction de l’eau ressource. Il s’est appuyé, pour cela, sur l’histoire de la définition des droits sur l’eau et le rôle joué par les savoirs hydrologiques scientifiques (estimation des prélèvements et des pertes). Dans ce cas, le processus de légitimation des savoirs est passé également par la reconnaissance des droits des non-autochtones et des changements dans la perception des irrigants à l’égard des ressources en eau.
La seconde contribution est une étude de cas dans le bassin du fleuve Segura en Espagne proposée par Javier Rodriguez Roz6. Elle met en lumière la manière dont la confrontation des savoirs et des stratégies de légitimation autour de la « modernisation de l’irrigation » peut se lire à travers les actions des acteurs à différentes échelles de gestion de l’eau. Cette étude montre les dualités de perception de la modernisation de l’irrigation entre les communautés d’irrigants aux savoirs ancrés spatialement et les autres acteurs (conseils d’administration, agro-exportateurs, politiques) qui s’appuient sur les concepts d’efficacité et d’innovation.
Ces deux cas montrent des rapports de pouvoir à travers lesquels certains savoirs se positionnent comme plus légitimes que d’autres. Ces légitimations différenciées des savoirs contribuent à la définition de certaines pratiques (d’irrigation, ici) comme étant « plus valables » que d’autres et pouvant bénéficier de l’appui des institutions. De cette manière, les utilisations de l’eau identifiées comme « correctes » renvoient en même temps à la définition des droits à l’eau et des acteurs légitimes. Les notions de « pertes » ou d’« irrigation traditionnelle » ne sont pas neutres ; elles invalident les usages de l’eau de certains groupes bien spécifiques. Dans les deux cas, l’analyse des positionnements de l’État, à travers ses agents et ses réglementations, met en évidence une autre dimension du débat, celle des échelles. Les savoirs traversent en effet différentes échelles territoriales et sociopolitiques, en se matérialisant dans les politiques publiques et les dispositifs techniques, tels que les infrastructures hydrauliques. Cela montre aussi l’importance de la dimension matérielle et historique de ces processus.
En s’appuyant sur ces présentations, le groupe a poursuivi sa réflexion sur les questions d’hétérogénéité et de hiérarchie des savoirs. En effet, dans le travail de terrain, chaque membre du groupe a expérimenté l’existence de différents types de savoirs et de différentes manières de les générer. Or, les savoirs participent aux relations de pouvoir au sein des sociétés, thème classique de l’écologie politique (Bryant, 1998 ; Leff, 2015 ; Schmink et Wood, 1987). Les cas présentés au Maroc et en Espagne montrent que les différents acteurs en matière de gestion de l’eau se trouvent dans des positions inégales, ce qui se reflète dans les savoirs, investis de différents niveaux de légitimité, selon ceux qui les énoncent. Ainsi, certains savoirs ont une plus grande légitimité car ils représentent symboliquement une position supérieure, portée par des acteurs stratégiques. Cela s’observe généralement dans l’installation d’expressions telles que « savoirs modernes », par opposition à « savoirs traditionnels », qui peuvent être perçus comme de moindre valeur.
Quelques questions importantes ont émergé des discussions en « Groupitos ». Nous constatons qu’il y a une circulation des savoirs au sein des groupes sociaux, mais que le savoir scientifique occupe généralement une place privilégiée. La légitimité des savoirs se construit dans les jeux de pouvoir d’acteurs aux intérêts très divers. Ainsi, certains acteurs adoptent des connaissances « scientifiques » en fonction de leurs intérêts ou les adaptent à leurs objectifs. Alors de nouvelles questions se posent aux chercheurs : comment rendre compte des savoirs dans des situations d’asymétrie de pouvoir, tout en évitant d’alimenter le processus de marginalisation d’autres savoirs ? Comment légitimer le « savoir vernaculaire » aux yeux des « experts », sans le caricaturer ou le réifier ? Ces questions conduisent les chercheurs à s’engager dans des pratiques de « coconstruction » des savoirs notamment lorsqu’ils sont produits pour la prise de décision. Si la « coconstruction » peut permettre de relégitimer des savoirs marginalisés, de provoquer des apprentissages croisés et de rééquilibrer ainsi certains rapports de pouvoir, il faut aussi reconnaître les difficultés inhérentes à sa pratique et les risques d’instrumentalisation.
La rencontre des savoirs
Le troisième thème discuté est justement celui de la rencontre des savoirs provenant de sources différentes. Cette « rencontre » est récurrente, qu’il s’agisse d’échange et de mise en commun, de confrontation ou de partage entre acteurs scientifiques ou pas.
Cette rencontre s’est d’abord présentée sous l’angle de l’interdisciplinarité. Dans notre groupe, en effet, certaines recherches reposent sur des collaborations entre sciences humaines et sociales et sciences de la nature. C’est le cas des travaux sur la circulation des savoirs hydroclimatiques présentés par Youssoupha Tall7. Dans cette recherche, les savoirs se côtoient à travers la mise en relations d’acteurs diversifiés : agriculteurs, éleveurs, devins, riverains, mais aussi chercheurs, ingénieurs et techniciens des services publics hydrauliques et météorologiques. L’analyse montre que la cohabitation de ces savoirs n’est pas aisée ; elle reflète bien sûr des enjeux de pouvoir, mais aussi des questions de compatibilité et de légitimité. Le chercheur peut y voir la rencontre d’ontologies apparemment incompatibles. Pourtant, l’association de climatologues à la réflexion des sociologues a permis de comprendre comment les savoirs se rencontrent et se « nourrissent » mutuellement : les Saltigui (devins), par l’intermédiaire des séances de divination, transmettent des connaissances mystiques, que les agriculteurs s’approprient, hybridées avec les informations issues de la météorologie conventionnelle (Tall et al., 2023). Cette hybridation passe par des passeurs qui sont ici des journalistes, des conseillers agricoles ou des représentants d’organisations paysannes. Cette fenêtre théorique et empirique sur les « passeurs de savoirs » ouvre d’autres questionnements sur leurs identités, leurs motivations et leur rôle dans la société.
La rencontre des savoirs s’est aussi présentée sous l’angle de dispositifs de recherche participative. À ce titre, l’exemple présenté par Veronica Mitroi8 de la surveillance des plans d’eau par les habitants de la lagune Aghien, dans le cadre du projet « Water Sources in Africa » en Côte d’Ivoire, a permis de discuter du rôle des savoirs dans les dispositifs participatifs (Mitroi et al., 2020). La vision interdisciplinaire entre écologues et sociologues du projet sur la qualité de l’eau de la lagune a facilité l’hybridation des savoirs qui s’est matérialisée par des ateliers de formation au suivi numérique de la qualité de la lagune, par la validation des données scientifiques en les confrontant aux perceptions et représentations locales de l’eau (marqueurs physiques et écologiques de la dégradation). Les populations sont ainsi porteuses de savoirs et en même temps actrices de la recherche scientifique, tout en bénéficiant des résultats de ces travaux. Dans ce cas, l’hybridation se fait en amont, par la combinaison des postures, puisque les populations sont à la fois sujets et actrices de la recherche.
Un autre exemple de rencontre des savoirs a été proposé à partir d’un dispositif de recherche associant des hydrogéologues et une anthropologue autour des eaux souterraines (exemple des puits) en Mauritanie (programme de l’équipe Hassi9). L’objectif est de créer des savoirs partagés sur les eaux souterraines, en mettant en dialogue les scientifiques et les habitants des différents terrains d’étude. Là encore, le terrain est au cœur des interactions, puisqu’il s’agit de s’accorder collectivement sur une ou des compréhensions des dynamiques hydrogéologiques. Dans ce cas, des collectifs d’acteurs explorent différentes pratiques de ce qu’ils nomment « hydrogéologies en sociétés ».
Conclusion
Le groupe « Savoirs sur l’eau » a exploré la question des savoirs sur l’eau à partir notamment des expériences empiriques de ses membres. En s’appuyant sur des terrains et des thématiques de recherche variés, les savoirs sur l’eau ont été abordés non pas tellement en tant qu’« objets de recherche » (ce qui pouvait être très limitant en termes de contributions possibles) mais plutôt comme des « processus » qui se construisent et circulent dans les interactions entre acteurs et/ou par le biais des projets de recherche. Chaque thème de réflexion a été développé à travers la présentation de dispositifs de recherche et de terrains, mais aussi plus spécifiquement dans le cadre des « Groupitos ». Au final, chaque séance a permis d’analyser une question particulière posée par un terrain singulier, tout en facilitant la mise en miroir avec d’autres situations et expériences collectivement discutées.
Cette organisation a permis de nourrir un véritable corpus empirique sur les savoirs sur l’eau. Pour autant, loin d’avoir épuisé, au terme de cette première série d’ateliers, la richesse sous-jacente à cette notion de savoirs, il reste encore de nombreuses questions à traiter. Par exemple, la signification de la notion de savoir est clairement différente selon les chercheurs qui ont contribué aux discussions. Si nous validons le parti pris de ne pas chercher une définition « commune », il apparaît tout de même nécessaire que chacun clarifie la manière dont il entend et travaille ce concept dans les projets qu’il mène. Les divergences dans les acceptions proposées, les frontières poreuses entre différentes notions (savoirs, informations et connaissances) nous incitent à continuer cette réflexion collectivement. Nous conservons la volonté d’une approche « grounded », ancrée dans des expériences de terrain, afin de bien rendre compte des éléments tangibles qui permettent d’appréhender les savoirs, leurs contours et leur agency. Nous invitons d’autres chercheurs et doctorants, toutes disciplines confondues, à rejoindre notre groupe pour une mise en commun de retours empiriques, réflexifs, bibliographiques ou biographiques.
Enfin, notons que, sur cette thématique des savoirs, l’aspect interdisciplinaire du groupe de travail, visé au début de sa mise en place, n’a pas vraiment été réalisé. Même si nous avons pu bénéficier de la présence de quelques collègues des sciences physiques, la plupart des participants relèvent des sciences humaines et sociales (SHS). Partir des savoirs sans les « définir » et les ouvrir à des connaissances autres qu’académiques ont très vite mis en difficulté les chercheurs en sciences de l’environnement et de la vie, qui n’ont pas forcément l’habitude de travailler avec une conception aussi large des savoirs. Si quelques-uns sont venus aux premiers ateliers, ils ont rapidement cessé de nous rejoindre car les thèmes de réflexion portés par les SHS ont rendu difficile les interactions en interdisciplinarité. Si le concept même de savoirs, polysémique pour les uns et plus positiviste pour les autres, s’avère difficile à partager, cela ne signifie pas que les chercheurs en sciences de l’environnement ne manifestent pas d’intérêt vis-à-vis de la question des savoirs en société. Bien au contraire, le besoin de mettre en place plus de collaborations interdisciplinaires afin de développer ces thématiques est un des principaux défis identifiés par notre atelier. Le choix des présentations s’est fait en fonction des chercheurs volontaires et disponibles dans notre cercle de collègues, ce qui déforme un peu la représentativité des différentes disciplines travaillant sur l’eau. Le fait de ne pas avoir eu des intervenants issus des sciences de l’environnement lors de cette première saison explique aussi pourquoi les auteurs de cet article viennent exclusivement des SHS. Nous gardons pour autant l’ambition de maintenir le contact et de partager les interrogations et manières de voir des SHS avec un cercle plus large de chercheurs travaillant sur l’eau.
À la fin de cette saison, nous ne nous engageons toujours pas à définir ce qu’est un savoir. Cependant, il ressort des ateliers que c’est un concept qui suscite la réflexion et porteur de sens pour tous et sur tous les terrains. À travers les différents exemples, nous avons pu voir que le savoir est avant tout « situé », ne pouvant être détaché de son contexte. Nous avons pu également observer qu’il n’y a non pas un type de savoir, mais souvent plusieurs qui dialoguent, s’affrontent, se croisent, se mélangent. Pour observer cette diversité, nous avons continué nos discussions dans une deuxième et une troisième saison. Cette dernière, en cours, creuse cette idée de circulation du savoir, en faisant peut-être de son état mouvant et vivant, sa particularité. Nous vous invitons à contacter l’auteur correspondant si vous souhaitez être informé de l’organisation de nos prochains ateliers et y participer.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier les participants aux ateliers de la saison 1 du groupe de réflexion, mais aussi ceux qui animent les saisons 2 et 3 et qui contribuent à la prolongation de cette réflexion.
Références
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Citation de l’article : Peytavi O., Tall Y., Henriquez Encamilla D., Riaux J., Mitroi V. 2025. Les savoirs sur l’eau à l’épreuve des terrains. Synthèse d’une année de réflexion collective en ateliers. Nat. Sci. Soc., https://doi.org/10.1051/nss/2025030
L’UMR G-eau (Gestion de l’eau, acteurs, usages) a six tutelles : AgroParisTech, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et l’Institut Agro Montpellier.
Fabienne-Émilie Errero-Brancato est docteure en sciences de l’eau. Sa thèse s’intitule Habiter avec l’eau. Reconstruction de trajectoires sociohydrologiques en Cévennes, soutenue en janvier 2025 : https://theses.hal.science/tel-05029655.
Olga Peytavi est doctorante en anthropologie. Sa thèse s’intitule De contrôler à prendre soin de l’eau en Nouvelle-Calédonie. Bricolages quotidiens des habitants des communes de Thio et Touho dans un contexte de décolonisation négociée. Elle montre comment les acteurs locaux jonglent entre les différents usages et représentations de l’eau, dans un pays en situation coloniale.
Ahmed Salem Mohamed et Jeanne Riaux portent l’équipe « Hydrogéologie en société ». https://www.ird.fr/jeai-hassi-hydrogeologie-en-societe-co-construire-des-savoirs-interdisciplinaires-sur-les-eaux.
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