Open Access
Issue
Nat. Sci. Soc.
Volume 33, Number 2, Avril/Juin 2025
Page(s) 159 - 169
DOI https://doi.org/10.1051/nss/2025047
Published online 26 September 2025

© F. Gangneron, Hosted by EDP Sciences

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Depuis plus de 40 ans les sciences humaines et sociales (SHS) considèrent qu’il n’existe pas de ressources dites naturelles hors de l’histoire des sociétés humaines qui les mobilisent ; bien au contraire, cette notion est une donnée culturelle. Pourtant des conceptions très différentes existent encore entre les sciences de la nature et les SHS. En proposant de déconstruire le caractère naturel des ressources à travers la notion de zone critique – utilisé par les sciences de la nature – et de la combiner avec des approches (political ecology, Sciences and technology studies) et des notions (cycle hydrosocial) de SHS, cet article offre une ouverture vers des articulations constructives. Ainsi, l’auteur argumente de la nécessité d’étudier les questions d’eau en intégrant diverses approches, en l’occurrence ici issues des sciences de la nature et des SHS.

La Rédaction

« L’expression “ressources naturelles” est si fréquemment utilisée qu’il ne vient à personne l’idée de se demander si les ressources peuvent être autrement que naturelles… » (Dupré, 1996, p. 18). Le fil d’Ariane de cet article est d’interroger la notion de « ressources naturelles » qui opère une séparation humains/non-humains avec, d’une part, une nature, chiche ou généreuse à les produire, et, d’autre part, des humains/consommateurs de ressources « déjà là ». Les ressources ne sont alors qu’externalité appropriée, ce qu’illustre fort bien l’article de Costanza et al. (1997), « The value of the world’s ecosystem services and natural capital », pour qui les liens entre non-humains et humains sont des rapports économiques de prélèvement. Les notions connexes de « services écosystémiques » et de « paiements pour services environnementaux », conception d’un environnement au service de l’économie libérale, ont fait l’objet de nombreuses critiques (Méral, 2012).

Cet article ne propose pas de poursuivre sur la voie de la critique du libéralisme économique, sauf à interroger cette séparation qui lui est intrinsèquement liée. L’ambition est de rendre compte de cette séparation qui est (re)produite par les savoirs académiques, en particulier du fait des faibles connexions entre sciences de la nature et sciences humaines et sociales. Mais des démarches concourent à dépasser ces savoirs en silos, à déconstruire l’idée de nature au travers de la notion de ressource en eaux en milieu rural ouest-africain qui ne relève ni des sciences de l’environnement ni des sciences sociales, mais certainement des deux. Latour (1991) parlerait de tissu sans couture, Morin (1982) de complexité. Les populations ne sont pas plus consommatrices simples que la nature n’est une pourvoyeuse simple (Picouet et al., 2004), les ressources en eau sont des coproductions humains/milieux et les frontières tracées entre les deux mondes peuvent être réinterrogées.

(Re)problématiser : articuler humains et non-humains

Il n’existe pas de définition globale et consensuelle pour désigner une ressource naturelle. Proposer d’inventorier tout ce qui est défini sous ce vocable est de l’ordre de la gageure et d’un inventaire à la Prévert. La bibliographie grand public (dictionnaires et encyclopédies) ou scientifique demeure assez vaste. On y repère les sources fossiles d’énergies (pétrole, gaz et charbon), les minerais (du fer à l’uranium), l’eau douce, les sources d’énergie renouvelables (soleil, vent…). On y trouve aussi le vivant exploité comme les ressources forestières, les pâturages ou les ressources halieutiques, la biodiversité animale et végétale, et parfois sont inclus les sols, l’air et même les écosystèmes (Fernandez-Fernandez et al., 2014). Elles sont donc tout à la fois matière ou énergie, renouvelables ou non renouvelables, biotiques ou abiotiques.

Un point commun, toutefois, aux ressources naturelles est l’idée sous-jacente qu’elles sont issues de l’environnement, ici conçu comme « naturel », c’est-à-dire sans intervention humaine. Au moins peut-on retenir dans un premier temps que leur existence n’est due qu’à des processus naturels. Une seconde propriété qui semble les définir serait qu’elles ne nécessitent que peu d’opérations avant usage après leur extraction de l’environnement. Facile à admettre pour l’eau, plus compliqué pour l’uranium.

Ainsi, une « ressource naturelle » se définit par une dualité ou une tension : elle se réfère à la nature qui la produit et aux humains qui l’extraient et l’utilisent. La définition consacre la séparation des deux mondes non miscibles, entre humains et non-humains.

On ne perd jamais la trace de l’eau, de l’hydrosphère, des compartiments terrestres et atmosphériques dont la présence – du moins en première approche – ne doit rien aux humains. Elle s’évapore, se condense en hydrométéores qui précipitent sur les surfaces continentales, elle ruisselle, s’infiltre, réside un jour ou des siècles dans le sol, alimente les nappes phréatiques, les lacs et les cours d’eau pour enfin atteindre l’océan. Ici elle n’est pas ressource, elle est un fluide aux propriétés physiques, chimiques et biologiques.

L’eau devenue ressource prend une autre dimension, elle doit être située dans les contextes historiques, géographiques, sociaux, économiques, où elle acquiert de nouvelles propriétés la redéfinissant comme ressource, c’est-à-dire comme coproduction humains/non-humains. En ce sens, les ressources en eau sont aussi de « nature sociale » (Linton, 2010). Elles n’existent pas hors du contexte de leurs usages, elles sont construites à partir des réalités matérielles et politiques qui leur inventent des propriétés et des classes d’utilité (Raffestin, 1980). Du fait que le cycle de l’eau soit partout anthropisé, l’on peut contester la distinction entre le grand cycle (cycle naturel, objet d’étude des sciences de l’environnement) qui constituerait un état de référence naturel, et le petit cycle (cycle domestique, objet d’étude des sciences humaines et sociales) qui signerait sa dérivation, avec ses prélèvements, ses rejets et ses pollutions. Les notions et/ou concepts tels que celui de cycle hydrosocial (Germaine et al., 2019 ; Budds et Linton, 2014) dans lesquels l’eau serait « anthroposystémique » (Lévêque et al., 2003) ouvrent à d’utiles problématisations.

L’eau se définit donc par ses propriétés physiques et chimiques tandis que les ressources, sans gommer ces propriétés, se définissent par leurs usages, ce qui leur confère des propriétés hybrides. Explorer cette hybridité, c’est tenter d’appréhender leur multidimensionnalité et comprendre qu’elles sont coproduites. Cet article propose une réflexion à partir de différentes démarches et de champs disciplinaires aux possibles articulations.

Les sciences de l’environnement ont donné un nom aux surfaces continentales sur lesquelles se produisent toutes les interactions physiques, chimiques et biologiques : la « zone critique », qui constitue le théâtre du cycle de l’eau. Elle est un outil pédagogique qui permet d’illustrer le cycle de l’eau, mais elle est aussi une conception « naturaliste » du cycle, bien qu’une partie des chercheurs adhérant à cette notion tente depuis quelques années d’intégrer les humains dans leurs réflexions. Les travaux de la géographie relationnelle, de la Political Ecology ou encore de la sociohydrologie, dans leurs traditions interdisciplinaires sont en mesure de proposer des outils de déconstruction du caractère naturel des ressources en eau, de « socialisation » de la zone critique propre à ouvrir et entretenir le débat entre disciplines historiquement éloignées. Cette socialisation, cette territorialisation de la zone critique, est une mise en relation humains et non-humains. Elle est médiée par des « actants » (des dispositifs techniques pour l’exhaure, le stockage, la distribution) que la sociologie des sciences et des techniques contribue à problématiser, faisant passer l’eau de l’état de fluide à celui de ressource. En cela, les dispositifs techniques sont des coproducteurs de ressources.

La zone critique, les promesses d’une redéfinition des ressources en eau

La zone critique, simple notion pour les uns, concept pour les autres, est à la fois un objet de communication (au travers de ses nombreuses illustrations) et de réflexion dont un des objectifs est d’aborder la complexité des interactions à l’œuvre dans le cycle de l’eau, au Nord comme au Sud, se traduisant par des approches pluridisciplinaires. La première mention repérée dans la littérature scientifique vient d’un physico-chimiste (Tsakalotos, 1909) pour désigner la zone de mélange de « fluides binaires », mais il faut attendre la fin des années 1990 pour que des scientifiques se saisissent à nouveau de la notion. Dans le sol, elle va jusqu’à la limite de la roche non altérée, dans l’air, elle inclut la basse atmosphère. La communauté des chercheurs impliqués, issue des États-Unis, relevait de la pédologie, de la géologie, de la géochimie et de l’hydrologie. Pour le National Research Council (2001), la zone critique est « the heterogeneous, near surface environment in which complex interactions involving rock, soil, water, air, and living organisms regulate the natural habitat and determine the availability of life-sustaining resources ». L’ambition holistique, affirmant une nécessaire pluridisciplinarité y est patente et intègre le vivant dès son origine (Lin, 2009 ; Ashley, 1998), au moins comme justification, pour en illustrer les enjeux : la zone critique, cette fine et fragile pellicule de terre et d’atmosphère est le lieu de toutes les ressources du vivant. Elle inclut les forêts, les agricultures, les déchets toxiques… et l’eau potable (Ashley, 1998), mais, en tant que communauté épistémique, cette ambition holistique conserve une lecture « naturaliste » du concept de ressource en eau. Pour nombre d’hydrologues, dès lors qu’il y a de l’eau dans la portion de la zone critique qu’ils étudient (stagnante, mobile, de surface ou du sous-sol), elle est qualifiée de « ressource » ; pour eux, il peut s’agir de débits prélevés mais généralement sans définition de ses usages. Dans les représentations graphiques qui sont faites du cycle de l’eau, seules 15 % décrivent les interactions humains/milieu (Abbott et al., 2019). Linton (2008) ajoute que le concept de cycle hydrologique n’est pas uniquement né d’observations mais plutôt d’affirmation de la communauté des hydrologues de s’affranchir du contexte social pour en faire une circulation naturelle.

Pour la recherche française, de même, la zone critique s’arrête aux portes de l’humain. Elle est là aussi un paradigme naturel et sa modélisation n’intègre les pratiques humaines que comme des productions extérieures aux cadres de pensée des sciences de l’environnement. Elle reproduit les schémas de partition du monde, la communauté des chercheurs se réclamant de la zone critique ayant comme paradigme un état de référence qui serait un monde sans humains, s’entend sans perturbation. Les humains ne peuvent y être interprétés que comme des agents extérieurs venant impacter artificiellement le milieu. Il s’agit bien là d’une reproduction d’un paradigme de partition du monde traduite en savoirs académiques. Pour la communauté, le risque de pénurie reste confiné à la présence/absence de l’eau. Aussi, les chercheurs se réclamant de la zone critique ont des difficultés à inclure les dynamiques humaines, généralement problématisées en termes de prédations/dégradations, et peu ou pas en termes de coproduction d’environnements et de ressources.

Les dynamiques humaines sont donc peu appréhendées dans la conceptualisation des ressources en eau et seulement sous la forme de pression sur l’environnement. Il en va de même dans les pays de la ceinture intertropicale, en particulier en Afrique de l’Ouest, où il est commun de grossir le trait d’une dépendance directe des populations au climat, à un environnement conçu comme fragile, risquant la désertification (Gangneron et al., 2022), ou encore comme une des dernières régions naturelles de la planète (Blanc, 2020). Pourtant, barrages, irrigations, micro-retenues, mares aménagées, citernes, puits, puisards, forages pastoraux, pompes à motricité humaine, adductions d’eau marquent le paysage (Gangneron et al., 2010a ; Fig. 1), ils constituent d’innombrables arrangements humains/milieux propres à produire des ressources et à contribuer au cycle de l’eau. De même, pour ces autres eaux-ressources pour l’agriculture, constituées d’aménagements pour retenir l’eau de ruissellement tels que les zaïs, cordons pierreux, banquettes, demi-lunes, terrasses (Descroix et Diédhiou, 2012) qui, au-delà de l’intérêt immédiat de concentrer l’eau au profit des cultures, limitent les ruissellements de surface (et donc l’érosion, l’export des matières organiques) et améliorent l’infiltration et la recharge des nappes.

La prospective CNRS/INSU/SIC1 (2019) nous apprend que « par définition, la présence des activités humaines dans tous nos sites rend très difficile de protéger les résultats de nos études des questions de management ou de décisions politiques », mais aussi de « bien comprendre comment l’activité humaine couplée aux changements environnementaux perturbe à différentes échelles de temps et d’espace le fonctionnement de la zone critique… ». Tantôt il faut protéger les données des artefacts humains, tantôt il faut les comprendre, mais uniquement en termes de perturbations d’une zone critique naturelle idéalisée. Toutefois, ce même rapport estime que les actions humaines se trouvent inéluctablement imbriquées dans chaque cas d’étude et que la question soulevée est donc celle de leur prise en compte qui pourrait conduire à abandonner l’idée qu’elles sont (uniquement) des forçages mais qu’elles sont des données. D’ailleurs, dans son ouvrage au titre prometteur, La Terre habitable ou l’épopée de la zone critique, Gaillardet (2023) plaide pour « l’habitabilité de la planète », même si son expérience de géochimiste illustre encore peu les interactions humains/milieu.

Les eaux-ressources pâtissent de leur définition comme naturelles les confinant dans les sciences du même nom alors qu’elles sont coproduites au même titre qu’une céréale est cultivée. Si on interprétait les ressources en eau comme « cultivées », certains auteurs parlent d’ailleurs de « water harvesting » (Rockström et Falkenmark, 2015), on unirait sans doute plus facilement au sein même de la zone critique les sciences de la nature et les sciences de la culture qui, les unes et les autres, déploient nombre de travaux sur l’eau sans se rencontrer. Les pas vers une « socialisation » de la zone critique et des ressources en eau sont timides, mais malgré tout perceptibles. Ils permettent, au-delà de la définition naturaliste proposée par le National Research Council, d’élargir les problématiques aux interactions humains/milieu dans une approche pluridisciplinaire. Ils ouvrent notamment à la possibilité de reformuler la question de la pénurie au-delà de la rareté (Buchs, 2012), de documenter les transformations des rapports hydrofonciers que peuvent engendrer ces équipements et de comprendre les règles d’allocation dans les agricultures irriguées (Bédoucha et Sabatier, 2013). Ces ambitions permettent de déconstruire l’approche technique qui prévaut souvent dans les projets d’adductions en Afrique de l’Ouest (Gangneron, 2017) ou des barrages hydroagricoles pour lesquels sont faits des bilans, des évaluations des besoins des plantes irriguées, autant de modèles industriels de dissociation de la nature et de la culture (Aubriot, 2013) par des mises à distance des agriculteurs eux-mêmes.

Des initiatives académiques tentent d’ailleurs de (ré)concilier, d’imbriquer nature et culture au travers notamment des observatoires hommes-milieux, par exemple celui de Téssékéré au Sénégal (Duboz et Ndiaye, 2024) et des observatoires de la zone critique, tant en France que dans les milieux intertropicaux. L’Association internationale des sciences hydrologiques (AISH) a pour sa part engagé des travaux qui la mènent sur le chemin de la sociohydrologie (Blöschl et al., 2019).

thumbnail Fig. 1

Zone critique en Afrique de l’Ouest. Illustration du cycle de l’eau (réalisation : Anne-Marie Cousin, GET).

Socialiser, territorialiser la zone critique

Les références aux états et évolutions de couverture ou d’occupation du sol (Land Use Land Cover : LULC, terminologie courante dans la communauté travaillant sur la zone critique, en particulier en télédétection) segmentent dans une certaine mesure l’aspect et les usages, et produisent des classifications qui reprennent la séparation entre le naturel (forêt, brousse, rivière…) et l’artificiel (habitats, cultures, jachère…), alors qu’une forêt n’est jamais totalement naturelle et que les cultures incluent le milieu. De même, classer un espace en « jachère » ne le situe en aucun cas comme naturel (même si en quelques années un écosystème s’y installe) ou comme artificiel (même si cet espace est directement issu d’une culture et y retournera). Du point de vue de la recherche, socialiser la zone critique consisterait à donner corps à cette remarque : « Cette zone est considérée comme critique pour l’humanité, car, sans elle, nos sociétés n’auraient pu se développer et se maintenir sur Terre » (Valentin, 2018) en intégrant la question humaine non pas uniquement en termes de justification, mais de problématisation scientifique. Plutôt que de produire des classes d’analyse qui perpétuent la séparation humains/milieu, un déplacement problématique consisterait à élever la zone critique au rang d’actant ou d’entité non humaine agissante (Akrich et al., 2006) qui signifierait en particulier de conjuguer avec le milieu plutôt que de le considérer comme une externalité minière car, à sa manière, la zone critique agit et réagit. En effet, elle coopère lorsqu’elle permet l’épandage des eaux de crues depuis des sols imperméables guidant le chemin de l’eau jusqu’aux surfaces perméables des champs de cultures en aval (Riaux, 2013). De plus, la zone critique ouest-africaine peut se montrer surprenante, à l’instar du paradoxe hydrologique sahélien (Descroix et al., 2018). Dans les années 1970-1980, le déficit pluviométrique au Sahel a provoqué une importante mortalité de la végétation (Dardel, 2014) et ainsi la mise à nu et l’imperméabilisation de larges portions de sols. Les ruissellements de surface concentrés lors d’événements pluvieux ont alors augmenté, alimentant les points bas endoréiques produisant de nouvelles mares, ou transformant les mares temporaires en mares permanentes, en nouvelles ressources pérennes. Malgré le reverdissement attesté (Dardel et al., 2014) grâce au retour des pluies (relatif mais sensible : Lebel et Ali, 2009 ; Chagnaud, 2022), les remplissages des points bas se poursuivent, faisant encore augmenter les eaux de surface et les capacités des puits et puisards connectés à la nappe, ce que Gardelle et al. (2009) avaient synthétisé par cette formule : « less rain, more water in ponds ». Bien que le sujet soit débattu, là où les populations croissent rapidement, le paradoxe est aussi associé à une augmentation des surfaces cultivées du fait des changements des propriétés hydrologiques des terres lorsqu’elles sont travaillées (Mahé et al., 2005 ; Gal et al., 2017). Au Burkina Faso, la hausse des écoulements de surface due aux années de sécheresse et à l’accroissement des surfaces cultivées a entraîné une augmentation des débits des nombreuses rivières (Mahé et al., 2010), accroissant ainsi le potentiel à fournir des ressources. En ce sens, la zone critique est une actante avec ou sans le concours direct d’activités agricoles.

À tenter de « socialiser » la zone critique, on peut suivre le chemin de l’eau après la pluie. Cette dernière ruisselle, s’infiltre et réside dans le sous-sol pour ressortir en aval et alimenter un cours d’eau, puis elle est freinée par un barrage où elle abreuve des troupeaux et irrigue des jardins. Dans le barrage, elle gonfle la nappe phréatique venant ainsi assurer le remplissage de puits familiaux se trouvant en aval (Fig. 1). Ce n’est là ni un grand cycle ni un petit cycle, mais un segment ordinaire du cycle de l’eau, du cycle hydrosocial (Linton, 2010). La zone critique, est ainsi un espace physique et humain où l’eau est un fluide puis une ressource et inversement, de nombreuses fois, avant éventuellement de rejoindre l’océan. Massuel et al. (2018) traduisent cette hybridité en rappelant que la sociohydrologie a permis à l’hydrologie d’amorcer des travaux tendant à considérer que les activités humaines faisaient partie intégrante du cycle de l’eau.

En tant que ressource, l’eau prend la forme de « projets » (Alexandre, 2005), composant avec l’environnement et sa pluviosité, sa pédologie et sa géologie. La commune de Hombori dans le Gourma malien fournit un exemple idéal-typique. Elle est constituée d’une pénéplaine relativement imperméable qui favorise l’accumulation des eaux de surface en mares temporaires pour la plupart, et permanentes pour trois d’entre elles. Le sous-sol ne dispose que de rares nappes suspendues. Cette pénéplaine est ponctuée de pitons rocheux et d’inselbergs (Gangneron, 2013). Avec une pluviométrie modeste, de 375 mm/an entre 1930 et 2015 (Gal, 2016) sur moins de 3 mois, les populations utilisent largement les contrastes de leur environnement pour produire des ressources en eau (domestiques, pour la petite irrigation, pour l’élevage). Des puits sont creusés là où les nappes de sous-sol sont présentes, des citernes sont construites dans les dépressions ou sur les plateaux rocheux, des mares sont surcreusées ou les bords rehaussés de digues, les écoulements de pentes sont recueillis dans des réservoirs, des puisards saisonniers sont creusés sur les bords de l’oued qui traverse la commune… (Gangneron et al., 2010a). Si, en termes de quantité, les ressources sont au total très modestes, leur diversité, la diversité de leurs usages et des modalités d’accès sont remarquables. Les habitants, en bons connaisseurs, entretiennent des liens étroits à cet environnement rigoureux, mais permettant une foule de petits aménagements.

L’eau-ressource de la zone critique est aussi un objet conventionnel (entre des usagers, des ressources et un lieu) permettant de produire du collectif (Gumuchian, 2004). De ce fait, la zone critique est donc un territoire, c’est-à-dire un espace physiquement et symboliquement approprié (Godelier, 1989) où, selon les environnements, chaque segment d’espace et chaque ressource sont modelés, régulés, selon une foule d’usages et de modalités2. Les « ententes » avec l’environnement sont des rapports hydrosociaux de production, d’appropriation, de régulation, d’usages qui font intervenir des classes d’acteurs, des hiérarchies, des rapports de pouvoir, des asymétries (Raffestin, 1980 ; Gautier et Benjaminsen, 2012). Nombre de ces rapports de pouvoir sont transterritoriaux, mettant en scène, par exemple, des États, des bailleurs et des « développeurs » (Lavigne Delville, 2011) qui financent des forages pastoraux (notamment dans le Ferlo au Sénégal), des adductions villageoises (dans tous les pays), des barrages hydroagricoles (le Burkina Faso en est le champion en l’Afrique de l’Ouest). Ils déploient des « modèles voyageurs » (des modèles de gestion hors sol, conçus au Nord et applicables partout où il est question de développement : Olivier de Sardan, 2022) de gestion conduisant à des politiques publiques standardisées qui se heurtent à la diversité des contextes (Olivier de Sardan, 2022 ; Gangneron, 2017). La rhétorique qui les accompagne emprunte des mots-clés et expressions proches du slogan (« sustainably cost recovery », « l’argent de l’eau va à l’eau », « comité de gestion », « responsabiliser les usagers », « renforcer les capacités ») issus de la culture libérale du résultat. Ces modèles exercent une violence institutionnelle venant se heurter à la réalité plurielle des contextes sociaux et environnementaux. Aussi, un barrage ou une adduction d’eau n’est pas uniquement un objet technique sur une surface physique permettant d’augmenter la disponibilité de l’eau mais ils génèrent de nouveaux pouvoirs, de nouveaux conflits (financeur/gestionnaire, fontainière/usagers, services de l’état/institutions locales, lignages dominants/lignages dominés, cultivateurs/éleveurs…). Le barrage de Daringa, au nord du Bénin, dans la commune de Djougou (Gangneron, 2011), fournit une illustration d’un projet conçu comme modèle voyageur, dont la gestion occasionne des exclusions de la ressource en eau et du territoire associé, et une forte conflictualité. Le projet qui a abouti à la construction d’un barrage en 2004 semblait pourtant séduisant. Il devait respecter les règles de « Gestion intégrée des ressources en eau » (GIRE : qui signifie un haut niveau de coordination entre acteurs, territoire et ressources en eau) permettant de lier l’ensemble des pratiques locales en un seul projet (abreuvement des bovins, maraîchage, pêche et pisciculture, pépinière pour le reboisement local) par l’inclusion de toutes les parties prenantes dans sa gestion. Une gestion clé en main a été imposée par l’opérateur, la Direction générale de l’eau (DG-Eau) devant se faire sous l’autorité d’un GIE (Groupements d’intérêts économiques). Aucune parcelle n’étant immatriculée, tout le périmètre du barrage était réputé du domaine public. Il devenait en principe simple d’organiser l’espace (maraîchage, couloirs pour les animaux et lieux d’abreuvements…). En 2012, seules quelques parcelles de maraîchage étaient installées, la pêche n’avait pas encore débuté ni la pisciculture. L’abreuvement de bovins n’était qu’anecdotique, les couloirs de passage refermés par des champs. Nombre d’éleveurs ont dû quitter le territoire du village ou vivre à ses confins. La clé d’interprétation se trouve dans la structure sociale du lieu d’implantation. Daringa est peuplé de Yoa, des populations essentiellement agricultrices, primo-arrivées qui, avec le temps, ont acquis le pouvoir politique et foncier sur leur territoire. De l’autre côté, deux groupes d’éleveurs peuls considérés comme étrangers sont tout juste tolérés dans les marges du territoire villageois. Le projet aurait gagné en cohérence en accompagnant les populations en situation de sujétion à l’égard des Yoa afin de produire une interterritorialité (Riaux, 2013) choisie. Il en a été autrement, le barrage a fait naître une « arène locale » (Olivier De Sardan, 1993) en réactivant les conflits d’usage et de représentation. Pinchemel et Pinchemel (1988) rappellent que « les ressources d’un milieu ne deviennent telles que si les hommes les perçoivent comme de possibles richesses… ». Le barrage en ayant constitué une nouvelle, il a fait l’objet d’une dispute et finalement de l’appropriation des Yoa parce qu’il a été intégré au territoire villageois. La multiplicité des enjeux (contrôle des ressources, mais aussi des espaces et des populations) signifie aussi que les relations conflictuelles ne se résument pas à une simple concurrence pour des ressources rares (Turner, 2004), mais qu’elles sont aussi des luttes pour la reconnaissance des légitimités des uns et des autres. Hombori n’échappe pas à cette situation. Des implantations d’adductions ou de pompes à motricité humaine faisant bien plus que « s’ajouter » aux ressources déjà présentes ont notamment introduit le paiement au volume et des comités de gestion « hors sol ». Ainsi, le barrage de Daringa n’a pas seulement produit une nouvelle ressource, il a aussi produit la pénurie pour les éleveurs.

Socialiser les dispositifs techniques

Sur les espaces territorialisés de la zone critique, les sociétés ne sont pas le pur produit déterministe du milieu, de même que les ressources qu’ils portent ne peuvent être considérées comme une simple mise à disposition d’une nature, qu’elle soit généreuse ou parcimonieuse. Les espaces et les ressources ne sont pas que physiques, ils sont aussi de nature sociale, économique et politique et sont traversés par des relations de pouvoir. Mais les médiateurs entre les espaces de la zone critique territorialisée et les usagers ne sont pas toujours interrogés dans leur rôle de coproducteurs de ressources contribuant au système relationnel zone critique/ressources/usagers. Toutefois, Raffestin, comme d’autres ayant identifié l’omniprésence des relations de pouvoir liant ressources et espaces territorialisés (Blot et Gonzalez Besteiro, 2017), a de plus relevé, tout comme Germaine et al. (2019), que les dispositifs techniques d’accès à l’eau jouent un rôle dans la production et la transformation des relations de pouvoir, et qu’en cela ils peuvent être questionnés. Latour (1994) a synthétisé cette approche en proposant de traiter les « choses » comme des faits sociaux3. Ainsi, un apport des science and technology studies et de la sociohydrologie est d’interroger, non pas le prolongement des politiques de l’eau par des dispositifs techniques, mais la façon dont les objets et les dispositifs techniques inscrivent en eux du politique. De même que pour la zone critique « socialisée », ils sont des actants et en tant que tels, ils projettent en eux des scénarios (ou des scripts) et conçoivent des hypothèses qui composent leur monde de destination (Akrich et al., 2006). Ce faisant, non seulement ils participent de la « socialisation » des ressources en eau, mais ils en sont aussi des coproducteurs liant zone critique, eau-fluide et humains.

En tant que fluide, l’eau médiée par les dispositifs techniques acquiert des propriétés relationnelles producteurs/usagers/environnement spécifiques ainsi que le rappelle Aubriot (2013, p. 125) : « L’eau n’a pas de forme et prend celle du récipient qui la contient. Il faut donc la retenir par des barrages de dérivation, des réservoirs, des limites de parcelles, pour la stocker, ou la faire s’écouler dans des canaux, galeries, tubes, etc., autrement dit la contraindre par des ouvrages qui ont une réalité physique ». Ainsi, de par ses propriétés physiques, l’eau-fluide produit des contraintes sur les techniques, mais les techniques produisent elles aussi leurs propres contraintes qui constituent des eaux-ressources spécifiques.

Trois exemples illustrent les spécificités des relations au fluide médié par la technique, celui des puits, des pompes à motricité humaine (PMH) et des adductions d’eau villageoise (AEV) (Gangneron, 2017). Les opérations de déploiement de dispositifs de distribution d’eau ayant successivement porté sur les premiers, puis sur les PMH et enfin sur les AEV ont non seulement augmenté l’offre dans une perspective développementiste (technicisation, dépolitisation : Faugère, 2000), unilinéaire et téléologique (Hobart, 1997), mais ont modifié les rapports sociohydrologiques.

Pour son exhaure, l’eau médiée par le puits ne nécessite qu’une corde, une outre et généralement une fourche. Le coût de leur remplacement est nul ou faible et leur disponibilité aisée dans l’environnement immédiat. L’énergie est fournie par l’usager ou un animal. Le puits n’a pas de panne. Si son usage est régi par des règles d’accès et des contraintes, ce n’est pas du fait de sa matérialité4 mais parce qu’il est territorialisé (dans une concession, fabriqué ou financé localement…). La PMH constitue une première rupture technologique, elle est constituée de matériaux issus de l’industrie (bras de levier en métal, tubes en pvc, clapets et ressorts : Gangneron et al., 2010b). L’entretien de la PMH est assujetti à l’achat de pièces et au recours à des artisans. Le travail d’exhaure reste la force motrice humaine, mais pour la maintenance de la PMH il faut mettre en place des modes de gestion pour lesquels il doit y avoir échange d’argent. La traduction en pratique est soit un forfait par famille, soit un paiement au volume via des bassines calibrées. Il faut alors un comité de gestion, une personne attitrée à la distribution (Bonnassieux et Gangneron, 2018), des comptes consignés dans des carnets. La gestion reste essentiellement bénévole et ce sont les institutions locales qui la prennent en charge par des collectifs villageois (groupe de femmes, notables… qui composent le comité de gestion). L’AEV constitue une seconde rupture en concentrant cinq fonctions : extraire, stocker, traiter, transporter et compter. Elle nécessite un forage et un moteur d’exhaure, thermique ou électrique si un réseau est à proximité. L’eau est ensuite stockée dans un château d’eau et traitée pour qu’elle devienne potable. Par gravité, elle est distribuée via une tuyauterie plus ou moins complexe à des bornes-fontaines ou à des branchements individuels (écoles, artisans, foyers…). Le fonctionnement des adductions a un coût d’approvisionnement contrairement à la PMH, dû à l’énergie d’exhaure (gasoil ou électricité), à l’entretien et aux pannes. Les quantités extraites sont mesurées par des compteurs aux bornes-fontaines et aux branchements individuels. L’acte de mesurer, sous son apparence de modernité, reconfigure les rapports sociaux (Collard et al., 2019), l’ensemble du dispositif planifie des calculs de débits associés à des coûts de fonctionnement et le paiement est alors forcément calculé au volume. Ces dispositifs poussent encore plus loin la spécialisation et la professionnalisation du service de l’eau, y compris avec des opérateurs économiques. De fait, les AEV inscrivent en elles un échange économique parfaitement compatible avec le déploiement de marchés de l’eau ruraux et semi-urbains (Valette et al., 2017). Des marchés ruraux et semi-urbains de l’eau ont émergé, traversés par le « référentiel marchand » (Baron et Maillefert, 2011) mettant en œuvre de tels dispositifs aux promesses de bénéfices économiques. Les coûts associés à ces différentes ressources passent de 0 FCFA/m3 pour les puits à 100/150 FCFA/m3 pour les pompes et 450/600 FCFA/m3 pour les AEV (Gangneron, 2017 ; Valette et al., 2017 ; Bonnassieux et Gangneron, 2018) auxquelles les plus pauvres n’accèdent pas. Via les AEV, les enjeux de l’eau, en se monétarisant, transforment les rapports sociaux et font émerger ou renforcent les classes politico-économiques (entrepreneurs, maires, lettrés).

Les trois dispositifs constituent des rapports hydrosociaux spécifiques mais, contrairement aux deux autres l’AEV est peu territorialisée et fait appel à la monétarisation5 pour réguler les conditions d’accès, soit une indépendance relative du circuit économique de l’eau par rapport aux institutions arrimées aux territoires, autrement dit un processus de désencastrement (Polanyi, 1983).

Discussion et conclusion

Déconstruire la notion de l’eau-ressource comme ressource naturelle mène invariablement à questionner la séparation historiquement constituée entre humains et non-humains. Séparation qui touche non seulement le sens commun mais aussi les savoirs académiques, par trop construits en silos étanches. La zone critique n’est qu’un exemple, mais une illustration symptomatique de cette histoire, car alors que ses concepteurs y voient un fait de nature, elle est aussi un territoire, c’est-à-dire un espace depuis longtemps investi par des populations, de sorte qu’il est illusoire de rechercher un état de référence naturel avec ses dynamiques et son grand cycle de l’eau à partir desquels sont pensées des perturbations humaines. Les ressources en eau, loin d’être « déjà là », en attendant d’être utilisées, n’existent que par des pratiques les situant dans l’espace, l’histoire économique et politique. La sociohydrologie et la political ecology considèrent l’eau-ressource « … comme un élément qui ne peut être dissocié des relations sociales, les choix techniques et scientifiques étant liés au contexte social et politique » (Budds, 2009, p. 132). Fort de ce constat, des recherches tentent de rebattre les cartes d’une cosmologie « naturaliste » fermement inscrite dans la segmentation des sciences, en socialisant les relations humains/non-humains, en proposant des paradigmes de la continuité, d’une « socionature » (Blanchon et Graefe, 2012) pour laquelle rien n’est tout à fait naturel et rien, a contrario, n’est tout à fait non naturel. Il ne s’agit pas de proposer une cosmologie de type « totémisme », « analogisme » ou « animiste » (Descola, 2005), mais de prendre la mesure de la dimension sociohydrologique, des codynamiques de socionature. Le basculement de problématique vise à cesser de se demander ce qui est naturel ou ce qui ne l’est pas, pour proposer une autre cosmologie dans laquelle les relations sont dialectiques, ici « hydrolectiques » (Larsimont et Martin, 2022). Non seulement les humains ont le pouvoir de transformer l’environnement, mais les liens d’influence sont réciproques de telle sorte que les rapports aux ressources et aux territoires sont des rapports sociaux. Le cycle de l’eau pourrait ainsi être abordé à la manière des « socionatures fluviales » (Boelens et al., 2023) « … comme des espaces de coproduction matérielle, sociale et symbolique : “la rivière en tant qu’écosociété”, “la rivière en tant que territoire”, “la rivière en tant que sujet” et “la rivière en tant que mouvement” » (Boelens et al., 2023). Cette « socionature » suggérant une démarche de conciliation entre humains acteurs et non-humains actants, coproduisant à la fois des ressources et de la nature.

En Afrique de l’Ouest, il ne s’agit pas uniquement de se poser la question de l’abondance ou de la rareté de l’eau-fluide. Les pluies sont rares en milieu sahélien et leur répartition sur quelques mois seulement nécessite de très nombreux arrangements humains/milieux. Mais « … la rareté de l’eau est au moins autant un phénomène social que le résultat de l’“avarice” de la Nature. » (Bonnassieux et al., 2005, p. 3). Le passage du statut de l’eau-fluide à celui de l’eau-ressource n’a rien de manifeste, en témoignent le cas de Karthoum (Blanchon et Graefe, 2012), d’une ville ceinte d’eau-fluide où la crise de l’eau-ressource est considérable, ou a contrario celui du Burkina Faso où aux pluies modestes répondent des ressources relativement importantes6 grâce à son dense réseau hydrographique barré de nombreux barrages (estimés à 1357 : Kambou, 2019). Au-delà de l’abondance ou de la rareté de l’eau-fluide, la disponibilité ou la pénurie d’eaux-ressources, coproduites par la zone critique et des médiateurs techniques, inscrites dans le cycle global de l’eau sont donc (aussi) clairement de nature sociale et économique. L’exemple de Hombori a illustré cette coproduction nature/culture, mais tout comme pour le barrage de Daringa, les rapports de pouvoir et la conflictualité qui s’exercent pour la production et l’accès à l’eau sont autant des questions de démocratie hydrique que d’avarice du milieu. Dans ces cas, il devient évident que la pénurie est autant un phénomène socialement construit (Buchs, 2012), à travers les systèmes de productions/consommations qui produisent des besoins situés, qu’une manifestation de la réalité physique à travers la plus ou moins grande rareté de l’eau-fluide.

Ainsi, la zone critique, en tant qu’espace territorialisé est une arène dans laquelle se jouent des alliances, des rapports de force, des rapports de pouvoir et des conflits. Elle met en scène différentes classes d’acteurs, qui ont des objectifs et des stratégies convergentes ou divergentes pour produire des ressources, pour y accéder, pour les gérer. Cette scène inclut les dispositifs sociotechniques qui, hors de toute neutralité politique, engendrent des rapports de socionature spécifiques et font entrer l’eau dans « le circuit général de la valeur » (Arrus, 1981, p. 290), voire plus selon Budds pour qui : « Technocracy is an important component of neoliberal thought, based on the idea that policy should be directed by technical expertise instead of political partisanship » (Centeno et Silva, 1998 cité par Jessica Budds, 2009).

In fine, comment peut-on définir les ressources en eaux domestiques, pastorales ou agricoles en Afrique de l’Ouest et même au-delà ? À quoi accède-t-on, lorsqu’on dispose d’une ressource ? À travers l’eau-ressource, on accède à un complexe d’acteurs, d’actants et d’interactions. On accède à un fluide qui circule ou qui réside dans les compartiments de la zone critique territorialisée à forte saisonnalité. Dans des espaces symboliquement et physiquement appropriés, ce à quoi renvoie la zone critique territorialisée, les populations ont des pratiques contraintes par des rapports de pouvoirs et des conflits. Ces pratiques sont aussi des « arrangements » qui coproduisent avec l’environnement des eaux-ressources usant de dispositifs sociotechniques qui projettent des scripts de gestion et d’usages pour une ou des finalités annoncées (ressources domestiques, pastorales ou pour l’irrigation). Cette complexité acteurs/actants/interactions ne peut être appréhendée qu’en associant les sciences de l’environnement et les sciences humaines, pour enrichir la zone critique de l’approche territoriale, aborder l’eau en un cycle unique anthropisé, articuler rareté et pénurie, voire reformuler les questions de démocratie hydrique et de durabilité socioécosystémique.

Remerciements

L’auteur tient à remercier Anne-Marie Cousin pour l’élégante et minutieuse illustration de la zone critique.

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1

Centre national de la recherche scientifique/Institut des sciences de l’Univers/Surfaces et interfaces continentales.

2

Pour éviter toute confusion liée à sa polysémie, c’est cette définition du territoire qui sera reprise dans l’ensemble de l’article.

3

En renversant la proposition de Durkheim (1894) qui, voulant traiter les faits sociaux comme des « choses », affirmait une posture scientifique comme le ferait un physicien observant un objet à décrire.

4

Toutefois, la pénibilité d’exhaure peut constituer une forme de régulation dans les puits profonds comme on en trouve au Mali ou au Niger en limitant les volumes ou en incitant à se tourner vers d’autres ressources plus accessibles.

5

Dans les faits, les scripts des AEV sont revisités par des contournements et de nombreux arrangements, en particulier par des crédits indéterminés informels ou des non-paiements.

6

La capitale Ouagadougou qui connaît des problèmes d’approvisionnement reste néanmoins une ville relativement bien desservie (Dos Santos, 2006).

Citation de l’article : Gangneron F., 2025. Réflexion sur la nature des eaux-ressources à partir de la notion de zone critique. Illustrations en Afrique de l’Ouest. Nat. Sci. Soc. 33, 2, 159-169. https://doi.org/10.1051/nss/2025047

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Zone critique en Afrique de l’Ouest. Illustration du cycle de l’eau (réalisation : Anne-Marie Cousin, GET).

Dans le texte

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