Open Access
Issue
Nat. Sci. Soc.
Volume 31, Number 3, Juillet/Septembre 2023
Page(s) 325 - 346
DOI https://doi.org/10.1051/nss/2024003
Published online 08 April 2024

© N. Eckert et al., Hosted by EDP Sciences, 2023

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Ce texte collectif et largement interdisciplinaire rend compte d’un atelier de réflexion prospective appuyé sur une importante analyse bibliographique réalisée par un collectif de chercheurs INRAE sur les risques environnementaux, en particulier ceux susceptibles de concerner cet établissement. Il faut dire que les compétences d’INRAE se sont considérablement accrues dans ce domaine depuis la fusion entre l’Inra et Irstea en 2020. Cet article présente également quelques réflexions pour une meilleure prise en compte de ces risques. Les pistes ainsi dégagées sont développées par une présentation détaillée d’une proposition de « feuille de route » pour INRAE dans un texte de la rubrique « Vie de la recherche » de ce même numéro de la revue.

La Rédaction

Les risques environnementaux en 2020 : état des lieux et prise en compte

L’accroissement des risques à l’heure de l’Anthropocène

L’anthropisation croissante de la planète Terre génère des défis d’une grande complexité. En particulier, la « grande accélération » de l’activité économique mondiale depuis le milieu du XXe siècle (Steffen et al., 2015) pose le problème de l’épuisement rapide des ressources, et, plus largement, de l’habitabilité à brève échéance du système Terre dans son ensemble (Steffen et al., 2018). Établi dès les travaux fondamentaux et précurseurs menés par des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology pour le club de Rome (Meadows et al., 1972) mais longtemps occulté, ce constat ne peut plus être éludé puisque plusieurs limites planétaires (entre autres, les flux biogéochimiques et très récemment le cycle de l’eau douce) sont d’ores et déjà vraisemblablement dépassées (Rockström et al., 2009 ; Wang-Erlandsson et al., 2022).

Ce contexte de transitions socioenvironnementales rapides, voire de dépassement de seuils de viabilité, conduit à l’exacerbation des risques environnementaux1 ; catastrophes dites naturelles d’ampleur accrue (WMO, 2021), perte accélérée de biodiversité (pour de nombreux scientifiques, la sixième extinction de masse ; voir Ceballos et al., 2017), nouvelles situations à risque liées, par exemple, à la fonte du permafrost (IPCC, 2019b), à la montée du niveau de la mer (IPCC, 2019a), à la croissance démographique (IPCC, 2019b) ou à l’apparition de nouveaux pathogènes. Par ailleurs, les nouveaux modes de production, de consommation et de recyclage génèrent de nouveaux risques (Deloménie et Laconde, 2003). Enfin, différents risques peuvent interagir, voire se conjuguer. Par exemple, la compétition entre usages alimentaires et usages non alimentaires de la biomasse peut induire une augmentation des prix alimentaires ou avoir des effets négatifs sur les stratégies d’atténuation du changement climatique.

Dans ce panorama complexe, il est difficile de quantifier de façon objective les différents types de risques environnementaux, les dommages associés et leurs évolutions au cours du temps. Néanmoins, des données sectorielles et/ou locales sont disponibles. Récemment, l’Organisation météorologique mondiale a pu chiffrer que les catastrophes d’origine météorologique ont, à elles seules, coûté plus de 200 millions de dollars et tué 115 personnes par jour en moyenne sur les 50 dernières années. Sur cette période, les coûts économiques enregistrés ont crû d’un facteur 5 du fait des changements climatiques, de l’augmentation des enjeux mais également de bilans quantitatifs de plus en plus exhaustifs (WMO, 2021). Ainsi, si le nombre de décès semble se réduire du fait de dispositifs de gestion des risques de plus en plus efficaces (WMO, 2021), une tendance claire à l’augmentation du coût des catastrophes dites naturelles est établie, de même que le poids prépondérant des inégalités sociales dans la vulnérabilité à ces catastrophes (Wallemacq et House, 2018). Dans cet inventaire, la France apparaît comme le dixième pays le plus touché. L’analyse des coûts liés aux pertes de biodiversité et à la dégradation des services écosystémiques est plus complexe, mais il s’agit à présent d’un domaine de recherche à part entière (Dasgupta, 2021) dont l’essor est poussé par l’intérêt croissant pour les solutions fondées sur la nature (Faivre et al., 2018).

Une prise en compte croissante par les sociétés

Dans ce contexte, il est logique que les scientifiques réunis au sein du réseau Future Earth (2020) aient placé en 2019 les risques liés au climat et aux extrêmes météorologiques au premier rang de leurs préoccupations, tant en raison de la probabilité de leur occurrence que de la sévérité de leurs impacts. Les catastrophes naturelles ont été classées juste après. Encore plus significatif : alors qu’il y a 15 ans, le Forum économique mondial se préoccupait avant tout des risques d’effondrement économique et de guerre, il a pointé, juste avant le début de la crise de la COVID, les risques liés aux évolutions climatiques et aux extrêmes météorologiques au premier rang de ses préoccupations (World Economic Forum, 2020). La Fédération française des assurances (FFA, 2019), quant à elle, place également les risques liés au changement climatique au troisième rang de son baromètre 2019 des risques émergents. Parallèlement à cette montée des risques dans les réseaux de décision, l’aversion des sociétés modernes aux risques et la demande de prévention et de protection sont amplifiées dans un contexte de forte médiatisation des catastrophes et des atteintes à l’environnement ou à la santé humaine. Ainsi, dans l’édition 2018 du baromètre publié annuellement par l’IRSN (2018), les bouleversements climatiques apparaissent au quatrième rang des préoccupations des Français.

En écho, des cadres internationaux multiples et de plus en plus contraignants se sont progressivement mis en place. Le cadre d’action 2015-2030 pour la réduction des risques de catastrophe (RRC), dit « de Sendai », a renouvelé l’action des Nations unies en matière de gestion des risques et des catastrophes (UNDRR, 20152). En parallèle, le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, en anglais IPCC, Intergovernmental Panel on Climate Change ; voir IPCC, 2014) accorde une place croissante à l’évaluation des risques sur la base d’un cadre formel explicite (Fig. 1) définissant le risque à l’intersection d’aléas et d’enjeux exposés associés à des vulnérabilités3. L’IPBES (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services) accorde une large place au risque exprimé en termes de perte de biodiversité tout en pointant très clairement l’interconnexion de l’ensemble des problématiques environnementales concourant aux risques (Brondizio et al., 2019). De même, le nouvel agenda urbain et les positionnements de l’Union européenne sur les « smart cities » encouragent l’adoption et la mise en œuvre des mesures de réduction et de gestion des risques de catastrophe (Council of the European Union, 2016), tandis que l’action des Nations unies dans le domaine de l’atténuation du changement climatique s’est concrétisée par l’accord de Paris (United Nations, 2015a) qui insiste notamment sur la nécessité de limiter les impacts liés à l’amplification des phénomènes extrêmes. L’approche la plus englobante est toutefois celle des 17 Objectifs du développement durable (ODD), déclinée au niveau européen dans l’Agenda 2030. Il stipule que les risques environnementaux sont « partout et nulle part », par exemple dans les cibles (il y a environ 10 cibles par ODD) 1.5, 2.4, 3.9, 6.3, 6.6, 8.8, 9.1, etc., qui visent notamment à la réduction de la vulnérabilité, au renforcement de la résilience et des capacités d’adaptation face aux catastrophes et à favoriser l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ces changements (United Nations, 2015b).

Le principe de l’ensemble de ces cadres d’action est de définir une trajectoire temporelle permettant l’atteinte des objectifs fixés à un horizon donné et de vérifier l’avancée le long de la trajectoire via des indicateurs plus ou moins homogènes d’un pays à l’autre (Kleiber et Vey, 2017, pour les ODD en France). Ces objectifs s’imposent en théorie aux politiques publiques nationales qui doivent s’y conformer (Aubert et al., 2017). Le recueil et la remontée des indicateurs sont en général de la responsabilité des États et la structure internationale chargée du protocole publie un bilan statistique global régulier (en général annuel), pointant les retards – fréquents – et les avances de phase – plus rarement. Ainsi, l’UNDRR (2018)4 chapeaute logiquement l’avancée du protocole de Sendai, et l’ONU celle des ODD (Guterres, 2019). Si, au départ, toutes ces initiatives étaient disjointes, elles convergent progressivement autour des nexus « réduction du risque de catastrophe – changement global – développement durable » (Peduzzi, 2019 ; Mysiak et al., 2018) et « réduction du risque de catastrophe – accord de Paris – ODD » (Handmer et al., 2020). Par exemple, les Nations unies proposent une correspondance entre les cibles des ODD et celles du cadre d’action de Sendai (UNDRR, 2019b), poussée par un horizon temporel commun se situant en 2030. Cette convergence des cadres internationaux (Fig. 2), rendue nécessaire par la globalité des enjeux, facilite la remontée et le suivi des indicateurs par les États signataires. Elle s’accompagne d’un changement progressif mais profond de paradigme de prise en compte des risques environnementaux : historiquement centrées sur l’aléa, les approches promues incluent de façon croissante les dimensions sociohistorique et systémique des risques (UNDRR, 2019a). De même, d’une vision centrée sur les géosciences et les sciences de l’ingénieur et très « top-down » dans la mesure où elle impose la connaissance et la vision régalienne au reste de la société en termes d’obligations et d’interdictions, on passe de plus en plus à une vision interdisciplinaire et à un véritable dialogue science-société se traduisant par des contrats sociaux ou des engagements volontaires (Albris et al., 2020). Enfin, les objectifs et les approches sont souvent déclinés de manière spécifique pour les milieux les plus sensibles et/ou vulnérables comme les zones polaires (IPCC, 2019b), littorales (IPCC, 2019a) ou les territoires de montagne (WMO, 2019).

thumbnail Fig. 1

Cadre conceptuel du Giec (IPCC, 2014) utilisé comme base pour les travaux de l’atelier de réflexion prospective interne INRAE dédié aux risques environnementaux (ARP Risques).

thumbnail Fig. 2

Le risque selon l’UNDRR (2019a, chapitre 1, p. 25). Convergence des cadres internationaux et évolution des approches.

Un besoin réaffirmé d’action forte et immédiate

Long à se dessiner, le consensus scientifique et politique autour du constat d’urgence environnementale semblait, début 2020, s’imposer lorsque la crise de la COVID et ses multiples facettes (sanitaire, sociale, civilisationnelle) sont venues bouleverser les priorités immédiates. Ainsi, le risque lié aux maladies infectieuses s’est hissé à la première place en termes d’impact dans le palmarès 2021 du Forum économique mondial (World Economic Forum, 2021) et le baromètre IRSN (2021) a placé la santé au premier rang des préoccupations des Français. Avec un peu de recul, cette crise met cependant en lumière l’importance de deux éléments-clés d’une démarche explicite de réduction des risques : i) la prise en compte du caractère systémique des risques et ii) l’action tout au long du cycle de gestion qui va de la prévention à la reconstruction post-crise. En effet, l’origine et l’ampleur de la crise COVID sont vraisemblablement liées à la dynamique actuelle d’anthropisation : déforestation qui met au contact de nouveaux pathogènes, densification de la population et interconnexion des sociétés qui facilitent leur dissémination, etc. (Wolfe et al., 2005 ; Zhang et al., 2020). En outre, la COVID n’a pas « empêché », entre autres, 2020 d’être l’année la plus chaude qu’a connue l’Europe entre 1900 et 20205 et le sud-est de la France d’être ravagé par la tempête Alex en octobre 20206 et par le grand incendie de Gonfaron. Le Giec (IPCC, 2021) vient d’ailleurs de rappeler avec un degré de certitude renouvelé, l’intensité, la rapidité, l’irréversibilité et le caractère global des changements climatiques et de leurs conséquences, le rôle causal de l’homme dans ces changements, la trajectoire alarmiste du réchauffement et la réduction rapide de la marge de manœuvre résiduelle. La prise à bras-le-corps des défis liés aux risques environnementaux est donc plus que jamais une urgence vitale. C’est en tout cas ainsi que décideurs et citoyens les perçoivent, puisque, à en croire les résultats des derniers baromètres, ils placent les risques liés au dérèglement climatique et à la dégradation de l’environnement au même niveau que le risque pandémique. Pour le Forum économique mondial, les risques liés aux extrêmes météorologiques sont ainsi, en 2021, les plus préoccupants en termes de probabilité d’occurrence, et l’échec des stratégies d’atténuation du changement climatique est placé quasiment au même niveau que le risque pandémique en termes d’impact. De même, le dérèglement climatique est, en 2021, la troisième source de préoccupation des Français, après la santé mais à quasi-égalité avec le terrorisme (IRSN, 2021). Comme le souligne le Forum du développement des Nations unies (United Nations, 2021), mieux prendre en compte les risques au sein de trajectoires soutenables conjuguant actions vigoureuses et intégrées en faveur du climat, de la biodiversité, et atteinte des ODD est donc plus que jamais d’actualité. Au niveau national, ce volontarisme se retrouve, par exemple, dans les dernières préconisations du Haut Conseil pour le climat (2021) qui insiste sur la nécessité de l’atténuation de l’aggravation des aléas.

La recherche tente d’apporter des réponses

Pour accompagner et mettre en œuvre cette évolution des cadres et modalités d’action, la recherche est sommée de trouver des réponses efficaces. Les risques environnementaux se retrouvent ainsi naturellement au cœur des prospectives récentes des instituts et de la recherche française7 ; contrat d’objectif et de performance (COP) de Météo-France (2017), stratégie scientifique du BRGM (2019), COP de l’IRSN (2019), prospectives du CNRS (Probst et Laggoun, 2018 ; Brès, 2020), séminaire prospectif du CNES (2019), séminaire ANR – AllEnvi – Athena « Risques et catastrophes naturels » (Lieutaud et al., 2020), etc. Il ressort de ce foisonnement un diagnostic clair :

  • sans pour autant négliger des enjeux encore plus larges (transition énergétique, changement climatique, conservation de la biodiversité, etc.) et des recherches plus disciplinaires (concept de résilience en science sociale, modèles mathématiques, développements technologiques, etc.), il est indispensable de porter l’effort sur des questions spécifiques aux risques environnementaux afin de limiter le nombre et l’ampleur des catastrophes. Ces questions portent sur : i) la prise en compte du caractère systémique des risques environnementaux dans une perspective diachronique permettant d’en comprendre les origines ; ii) l’assemblage et l’intégration des disciplines pour appréhender les dimensions physique, sociale et mathématique des risques ; iii) la considération de l’ensemble de la chaîne du risque, depuis la prévention jusqu’à la reconstruction en passant par la préparation et la gestion des crises ; iv) une recherche à mener pour partie en interaction avec la société8 (gestionnaires, experts, associations, populations, etc.). Les synthèses européennes produites régulièrement par le JRC (Centre commun de recherche de la Commission européenne, Poljanšek et al., 2019 ; Casajus Valles et al., 2020) arrivent à des conclusions concordantes ;

  • la recherche française, bien que présentant des atouts indéniables dans le domaine des risques environnementaux, a besoin d’être plus visible et mieux structurée pour relever ces défis (Eckert et Grandjean, 2020). Deux exemples, parmi d’autres, peuvent être cités. Le premier est celui du manque de relais financiers. En effet, même si les risques environnementaux se retrouvent de façon transversale dans la quasi-totalité des axes de la Stratégie nationale de la recherche (SNR), ils restent éclatés entre différents axes du plan d’action de l’Agence nationale de la recherche (ANR, 2021), ce qui complique l’émergence et la sélection de projets. Au niveau européen, la situation est assez similaire, avec une présence là aussi diffuse des risques environnementaux dans les thèmes « climat », « sécurité » et « green deal ». Le second exemple est la complexité du recrutement de jeunes scientifiques dans le domaine des risques environnementaux. Hors postes profilés exceptionnels, du fait de la difficulté à faire reconnaître le risque comme un champ de recherche (voire une discipline) en soi, les jeunes docteurs en « sciences des risques » passent en effet souvent « après » des profils apparaissant comme plus disciplinaires.

INRAE est né le 1er janvier 2020 de la fusion de deux instituts de recherche (EPST) préexistants, Inra et Irstea. Le large périmètre couvert par l’institut fusionné en termes de types de risques, de disciplines et d’approches, de même que son insertion dans le paysage de la recherche, le rend a priori susceptible de contribuer significativement à l’avancée de la recherche sur les risques environnementaux. La seconde partie de cet article étaye ce postulat sur la base des conclusions d’un Atelier de réflexion prospective interne INRAE (ARP Risques) et d’une analyse bibliométrique. La dernière partie met en perspective les résultats de l’état des lieux effectué au regard des besoins de la recherche nationale et internationale sur le sujet et du contexte d’urgence environnementale. Nous espérons que la portée générique du message alimentera l’ensemble des communautés soucieuses d’une meilleure compréhension et maîtrise des risques environnementaux.

Les risques environnementaux à INRAE

Périmètre et positionnement d’INRAE sur les risques environnementaux

L’ARP Risques (Encadré 1) précise le périmètre des risques environnementaux traités par INRAE :

  • les risques d’origine climatique : inondations, sécheresses et vagues de chaleur, feux de forêt, extrêmes neigeux ; des phénomènes propres aux territoires de montagne, comme les avalanches, les chutes de blocs, les risques d’origine glaciaire, ou aux zones littorales telles que la submersion côtière, les tsunamis et la montée du niveau de la mer ; les enchaînements climatiques atypiques (variabilité climatique, modification des saisonnalités, etc.) perturbant les cycles biologiques (dormance, floraison, etc.) ;

  • les risques sanitaires et écotoxicologiques, parfois en interaction avec des risques climatiques : menaces à court ou à moyen terme associées à certains agents biologiques (espèces invasives animales et végétales, champignons, bactéries, virus, etc.), chimiques (éléments traces métalliques, pesticides, microplastiques, etc.) ou physiques (rayonnements ionisants) sur la santé des populations humaines, animales ou végétales, la santé des sols et des écosystèmes aquatiques (notamment le risque lié à l’eutrophisation, un déséquilibre du fonctionnement de l’écosystème lié à l’azote et au phosphore) ;

  • certains risques technologiques et NaTech9, notamment ceux liés aux pratiques nouvelles de consommation, de production et de recyclage et à l’économie circulaire (déchets, effluents, réutilisation des eaux usées traitées [REUT], etc.) ainsi que la défaillance et la rupture d’ouvrages hydrauliques.

Méthodes : ARP Risques, bibliométrie et mise en perspective.

L’Atelier de réflexion prospective scientifique interdisciplinaire sur les risques environnementaux INRAE (ARP Risques) s’est déroulé en 2019 (Caquet et al., 2020). Il avait notamment pour objectif de dresser un panorama de la recherche effectuée au sein de l’établissement sur les risques environnementaux, d’identifier les principaux fronts de science et d’élaborer une feuille de route permettant de les surmonter. L’ARP Risques a été mené sous la forme d’une réflexion collective mobilisant les compétences thématiques et disciplinaires de l’institut. Sous la conduite d’un comité de pilotage, il a mobilisé une trentaine de spécialistes. Les travaux ont été organisés en sept axes : 3 axes thématiques (risques d’origine climatique et biotique ; risques alimentaires ; risques environnementaux*), deux axes méthodologiques (modélisation quantitative des risques ; approches économiques des risques) et deux axes transversaux impliquant des démarches interdisciplinaires (liens entre santé de l’environnement et santé humaine ; approches multirisques). L’ensemble des participants a été réparti entre ces sept axes, certains intervenant dans 2 à 4 axes.

Le travail a inclus, pour chaque axe, un périmétrage, la définition des concepts essentiels, une cartographie des équipes, infrastructures et travaux INRAE, de même qu’un positionnement des travaux INRAE parmi l’état de l’art national et international. Vu le périmètre large de l’ARP Risques et les conventions et habitudes existantes au sein des différentes communautés, une homogénéisation complète de la terminologie n’a pas été visée. En revanche, une analyse des concepts dans chaque axe a permis d’établir les ponts permettant de se comprendre (correspondance entre le danger des écotoxicologues et l’aléa des climatologues, par exemple). En outre, l’ensemble des axes a cherché à inscrire sa réflexion dans le cadre conceptuel popularisé par le Giec. Dans ce célèbre « trèfle », le risque est représenté à l’intersection des pétales aléa, exposition et vulnérabilité (Fig. 1). Les flèches latérales y représentent les pressions externes et les mesures d’atténuation globales ou par composante. La flèche « impacts » représente les conséquences de la réalisation de l’événement dommageable sur l’objet de l’analyse et sur les pressions externes. Toutes les contributions des axes ont été réunies dans un seul document homogénéisé par le comité de pilotage de l’ARP (Caquet et al., 2020).

À l’échelle de l’ARP Risques dans son ensemble, un corpus de documents de référence a également été analysé : articles thématiques « fondateurs », littérature relative à certains nexus (alimentation-santé-environnement), aux approches récentes des risques composés et/ou multiples (Pescaroli et Alexander, 2018 : Zuccaro et al., 2018 : Cozzani et al., 2005), de même qu’à un certain nombre de concepts associés aux risques environnementaux : résilience, panarchie, etc. Ont été également investigués : i) la définition des notions d’évaluation et de gestion des risques environnementaux ; ii) les approches et dispositifs permettant leur prise en compte institutionnelle et réglementaire, certains d’entre eux étant spécifiquement français (« CATNAT », dispositif d’indemnisation des catastrophes naturelles, organisation des 7 « piliers » de la politique française de prévention et de gestion des risques naturels, etc.). Une synthèse exécutive relative à l’ensemble du périmètre couvert par l’ARP Risques a ainsi pu être produite incluant une identification des verrous et une feuille de route pour les surmonter (Caquet et al., 2020).

En complément des travaux de l’ARP, une étude bibliométrique a été réalisée à partir de la base documentaire Scopus. L’ensemble des articles mentionnant le risque et/ou ses composantes et publiés par INRAE et ses précurseurs (Inra, Irstea, Cemagref**) entre 2000 et 2020 ont été extraits de la base documentaire Scopus puis considérés en fonction de leur date de publication et des domaines scientifiques auxquels ils étaient rattachés*** (Fig. 5 et Fig. 6). Un filtrage supplémentaire avec le mot-clé « environnement » a permis de préciser la contribution de l’institut à la production nationale et internationale de la recherche (sans ce filtre, le requêtage renvoie, hors INRAE, à beaucoup d’articles dépassant largement le périmètre considéré : finance, médecine, etc.).

Pour les besoins du présent article, l’ensemble de ce matériel a été réanalysé, synthétisé et confronté aux documents de prospectives déjà menées sur des thèmes proches par d’autres organismes de recherche, sociétés savantes et structures d’interface science-société, de même qu’avec les documents nationaux et internationaux relatifs à l’appréhension des risques et à l’orientation des politiques environnementales de façon à produire un état des lieux transversal i) des risques environnementaux en 2020 ; ii) de la recherche menée à INRAE sur le sujet ; iii) de mettre l’ensemble en perspective.

* Dans un sens plus restrictif que dans cet article : risques d’origine chimique et biologique, pour les individus, les populations et les communautés vivantes, au sein des différents compartiments (sol, eau, air), des écosystèmes plus ou moins anthropisés, des agroécosystèmes ou des systèmes de production animale, ainsi que des milieux urbains.

** Ont été considérés tous les articles pour lesquels au moins un des auteurs était affilié à INRAE ou à ses précurseurs, ce qui permet d’exclure tout artéfact lié aux changements de noms successifs des établissements de recherche.

*** Au sens de la base Scopus, un article pouvant être rattaché à plusieurs domaines.

L’ARP Risques établit qu’INRAE appréhende les risques environnementaux dans l’ensemble de leurs composantes : aléa/danger, vulnérabilité et exposition. En termes d’espace, la focale privilégiée est celle des échelles dites « intermédiaires » (bassins-versants, communautés vivantes, collectivités territoriales, etc.) qui est celle correspondant de façon privilégiée à l’appréhension et à la gestion des risques. Néanmoins, les travaux sont en réalité menés de la parcelle, voire de l’échantillon élémentaire de « milieu » – sol, air, eau, tissus vivants, etc. –, jusqu’aux grands territoires (régions, nations), avec des « ponts » vers les échelles encore plus petites (moléculaire) et grandes (forçages climatiques, par exemple10). En termes d’échelles temporelles, l’établissement est positionné de l’anticipation et la prévision quasi immédiate des crises jusqu’à l’évolution à l’échelle séculaire passée et future des aléas, des enjeux et des risques, soit sur la quasi-totalité du cycle temporel du risque, à l’exception de la gestion de la crise proprement dite. Bien sûr, il ne s’agit pas d’actions opérationnelles, qui sont du ressort des services compétents, mais de développement de connaissances et de méthodes permettant d’y contribuer. L’éventail des travaux va de la recherche « très amont » relative aux processus physiques, chimiques, biologiques, sociaux, économiques et historiques jusqu’à l’élaboration d’approches permettant la quantification des risques et de leurs évolutions, et aux outils (modèles, plateformes), à l’acquisition et au traitement de données utilisables en temps réel et/ou en conditions opérationnelles. Cet éventail large reflète la double mission de l’établissement de production de connaissances fondamentales et d’appui aux politiques publiques. En ce qui concerne les disciplines, le spectre est également très large, comprenant des travaux disciplinaires et interdisciplinaires faisant appel aux biogéosciences, aux sciences économiques et sociales et/ou aux mathématiques/sciences du numérique et des données. Bien sûr, du fait de son histoire propre et de l’histoire de la recherche sur les risques environnementaux dans son ensemble (Fig. 2), le prisme thématique et disciplinaire de l’établissement reste orienté vers certains risques et disciplines au détriment d’autres. Par exemple, la force de frappe d’INRAE apparaît en 2020 plus importante sur les aspects aléas/danger (voire processus élémentaires) que sur les autres composantes du risque. De même, certains risques « historiques » (risques d’origine climatique ou écotoxicologique) restent logiquement plus étudiés que des risques plus émergents (microplastiques, risques liés à l’économie circulaire, par exemple).

Cadres conceptuels mobilisés et exemples d’applications

L’ARP Risques a permis de rappeler que la notion de risque est complexe, ambiguë, voire polysémique, ce qui en fait par essence un « objet frontière », c’est-à-dire une référence qui peut circuler à l’intérieur de plusieurs communautés en conservant le même nom sans pour autant recouvrir les mêmes « réalités » (Méric et al., 2009). Ainsi, en toute rigueur, le concept de risque devrait être réservé à la caractérisation des conséquences potentielles des événements indésirables (Reisinger et al., 2020), par exemple évaluées via leur espérance mathématique, mais, en pratique, il reste couramment utilisé pour faire référence à un événement susceptible de se produire et dont les conséquences sont potentiellement indésirables. « On » parle ainsi toujours volontiers de « risque de glissement de terrain », en mélangeant le fait qu’un glissement de terrain puisse se produire et les dommages potentiellement induits. La typologie des risques retenue par l’ARP Risques (Caquet et al., 2020) reflète cet abus de langage usuel. De même, en modélisation quantitative, les définitions du risque sont multiples (Berger, 1985 ; Renn, 2008a ; Renn 2008b). Si une statistique (moyenne, variance, quantile, etc.) de la distribution des dommages prévisibles reste le choix le plus courant, certaines communautés intègrent volontiers les capacités adaptatives des collectifs concernés, tandis que des définitions telles que la probabilité de dépasser un seuil (valeur à risque) ou l’espérance mathématique au-delà de ce seuil (espérance de queue conditionnelle) se rencontrent également, notamment chez les économètres. Le choix de la mesure de risque en fonction de propriétés désirées constitue donc, en soi, un sujet de recherche (Koch, 2017). Enfin, la saisie du risque d’un point de vue ontologique est complexe étant donné que le risque « n’existe pas » en tant que tel. Il est toujours potentiel et virtuel et lorsqu’il se matérialise, il ne s’agit plus d’un risque, mais d’un sinistre ou d’un dommage (Caeymaex, 2007). À des degrés divers, les mêmes difficultés philologiques existent pour les concepts associés d’aléa, de vulnérabilité et de résilience.

Malgré tout, l’ARP Risques a permis d’établir que la définition classique du risque (IUGS, 1997), c’est-à-dire le croisement entre un phénomène potentiellement dommageable et des enjeux exposés et vulnérables, est suffisamment lâche et englobante pour être utilisée de manière quasi universelle pour les risques environnementaux traités par INRAE. En effet, en dehors de l’axe « risques alimentaires11 », le cadre conceptuel du Giec a pu être appliqué à tous les axes de l’ARP Risques. Soit les communautés l’utilisent déjà (c’est le cas pour la plupart des risques d’origine climatique), soit elles utilisent un cadre conceptuel différent mais pour lequel des ponts/transpositions avec le schéma du Giec (IPCC, 2014) peuvent être établis (Fig. 3). À titre d’exemple, la combinaison de modèles numérico-probabilistes d’aléas et de courbes de vulnérabilité quantifiant la susceptibilité aux dommages est désormais largement utilisée dans le domaine des risques en montagne pour évaluer des taux de destruction pour des bâtiments soumis à l’impact et de décès pour leurs habitants (Eckert et al., 2012), y compris avec des mesures de risques basées sur des quantiles (Farvacque et al., 2021). De même, le formalisme du risque s’applique assez directement à la problématique de l’eutrophisation des milieux aquatiques (Pinay et al., 2017), au risque pour les écosystèmes liés aux espèces invasives (Hulme et al., 2017), aux risques pour les organismes vivants et les milieux liés aux perturbateurs endocriniens (Ducrot et al., 2010) ou aux microplastiques (Cormier et al., 2019), et, plus généralement, au risque écotoxicologique à court et à long terme (Coutellec et Barata, 2013).

Sans remettre en cause ce schéma, l’approche de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (RRC) promeut à présent fortement le risque systémique (Renn, 2016 ; UNDRR, 2019a). Ce dernier favorise le décryptage des mécanismes causaux conduisant à « la catastrophe » (Fig. 4), ce qui autorise une meilleure anticipation, voire une extrapolation hors du cadre spatiotemporel de l’analyse proprement dite12. De même, les conceptualisations récentes liées aux risques multiples étendent le schéma du Giec à des cadres plus élaborés : multicausalités, interdépendance, risques composés, etc. (Pescaroli et Alexander, 2018 ; Zscheischler et al., 2018). L’ARP Risques a permis d’établir que ces raffinements restent encore peu utilisés parmi les communautés centrées sur les risques environnementaux, à INRAE comme au-delà. Des exceptions sont toutefois notables, notamment en termes méthodologiques, avec des avancées proposées par l’institut en termes de théorie de la viabilité (Rougé et al., 2013), de modèles statistiques à vraisemblance composite (Pimont et al., 2021) et/ou autorisant la prise en compte de structures de dépendances spatiotemporelles complexes, y compris dans les valeurs extrêmes (Bechler et al., 2015 ; Bourotte et al., 2016), de modélisation systémique diachronique (Giacona et al., 2019) ou de formalisme multirisques (Curt, 2020). Ces développements récents sont particulièrement bien adaptés à l’étude des risques dans les socioécosystèmes complexes au sein desquels existent des interactions et rétroactions multiples entre les composantes biophysiques et sociales (Altaweel et al., 2015). Ainsi, dans un contexte diachronique séculaire, l’approche systémique permet de quantifier comment et pourquoi l’évolution des interactions entre la société et son environnement modifie progressivement le risque et ses composantes. Par exemple, Zgheib et al. (2020) analysent les transformations du risque liées aux avalanches pour le bâti au cours des 200 dernières années en réponse aux modifications de ses déterminants : climat, couvert forestier, pratiques sociales, etc. De même, une grille multirisques permet d’envisager comment différents risques affectant un même système/territoire interagissent, et, parfois, s’amplifient. Par exemple, les différentes fonctions d’une forêt, parfois antagonistes du point de vue des risques induits, peuvent ainsi être croisées : production de bois, biodiversité, protection contre les aléas gravitaires, vulnérabilité aux incendies et aux ravageurs, exploitation touristique, etc. (Dupire et al., 2016). Ainsi, sécheresse et tempêtes (Csilléry et al., 2017), insectes et incendies (Sieg et al., 2017) ou sécheresse et pathogènes (Bréda et al., 2006 ; Jactel et al., 2012) peuvent se conjuguer pour déterminer le niveau de dommage d’une forêt, ce qu’une approche focalisée sur chaque aléa séparément aurait négligé. De même, en termes de risques pour l’homme liés à l’alimentation, le cadre multirisques a déjà été mobilisé pour considérer simultanément les risques liés au microbiote, aux contaminants chimiques et à l’équilibre alimentaire en matière de nutriments (Boué et al., 2017), ou encore les risques liés à différents contaminants chimiques susceptibles de se conjuguer en termes de danger et/ou de conséquences pour la santé humaine (Boué et al., 2018). Enfin, en écologie aquatique, une analyse multirisques peut être lue en creux dans les approches reliant la répartition des communautés vivantes (poissons, invertébrés, algues) à celles des différents stress que ces dernières subissent : variation du régime hydrologique, contaminants chimiques, aménagements des bassins-versants, etc. (Villeneuve et al., 2015).

thumbnail Fig. 3

Adaptation du cadre conceptuel du Giec (IPCC, 2014) aux risques A) biotiques ; B) alimentaires et C) environnementaux au sens strict de l’ARP Risques (cf. Encadré 1).

thumbnail Fig. 4

Le risque selon l’UNDRR (2019a). Vision systémique du risque.

Infrastructures et structuration régionale

L’ARP Risques rappelle qu’INRAE contribue à l’administration et à l’exploitation de nombreuses infrastructures reliées de manière proche ou lointaine à la thématique des risques environnementaux : réseaux d’observation de veille et/ou de surveillance, plateformes d’analyses, infrastructures de calcul, Équipex, etc. : par exemple, plateformes nationales d’épidémiosurveillance, Observatoires de recherche en environnement (ORE), comme OMERE dédié à l’étude de l’effet des changements globaux sur les hydrosystèmes méditerranéens, systèmes d’information comme avalanches.fr13 administré pour le compte de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) du ministère chargé de l’Environnement, etc. Ces infrastructures permettent le partage et l’accroissement des connaissances, la surveillance des aléas ainsi qu’une prise de conscience des impacts environnementaux via, parfois, des données citoyennes. De même, sur un plan régional, INRAE est un acteur actif des stratégies de sites qui ont fait des risques environnementaux un thème fédérateur : Bordeaux (Labex Cote), Grenoble (Risk Institute de l’Université Grenoble-Alpes) ou encore Aix-Marseille Université (ITEM), etc.

Bibliométrie

L’analyse bibliométrique (Encadré 1) montre que, sur la période 2000-2020, INRAE a publié ou copublié plus de 20 000 articles faisant référence au risque ou à ses composantes, soit en moyenne près de 1 000 articles par an, en progression croissante au cours des deux dernières décennies (de près de 250 à plus de 2 100 articles/an). La restriction aux articles mentionnant explicitement « environnement » produit une mesure simple et robuste du poids de cette production dans les contextes national et international : INRAE contribue à environ 15 % de la recherche française et à 0,6 % de la recherche mondiale sur les risques environnementaux. Même si le nombre de publications liées aux risques environnementaux a crû « partout » très vite au cours des deux dernières décennies, ces proportions ont quasi doublé depuis 200014, ce qui atteste du dynamisme de l’institut sur le périmètre considéré (Fig. 5 et 6). L’analyse des domaines scientifiques associés fait ressortir les domaines identitaires de l’établissement, avec, par exemple, en 21 ans, un peu moins de 9 000 articles rattachés au domaine « agriculture et biologie » (Fig. 6) et près de 5 000 articles rattachés aux domaines « sciences de l’environnement » et « biochimie, génétique et biologie moléculaire ». INRAE contribue ainsi à 38 % de la recherche française sur les risques associée au domaine « science vétérinaire » (1,8 % de la recherche mondiale), à près de 30 % de la recherche française sur les risques associée au domaine « agriculture et biologie » (1,6 % de la recherche mondiale), à près de 20 % de la recherche française associée aux domaines « sciences de l’environnement », « biochimie génétique et biologie moléculaire », « immunologie et microbiologie » et « alimentation » (de 0,6 à 1,3 % de la recherche mondiale), et apporte des contributions significatives (de 5 à 15 % de la recherche française) à la recherche sur les risques associée aux domaines « multidisciplinarité », « pharmacologie, toxicologie et pharmacie », « chimie », « économie, économétrie et finance », « énergie », « sciences sociales », « sciences de la décision », « sciences de la Terre et de la planète », « mathématiques », « neurosciences », « informatique », « ingénierie chimique », « médecine » et « sciences de l’ingénieur » (de 0,1 à 1 % de la recherche mondiale), ce qui traduit le positionnement de l’institut en termes d’objets et de disciplines (cf. le paragraphe « Périmètre et positionnement d’INRAE sur les risques environnementaux »).

thumbnail Fig. 5

Résultats de l’analyse bibliométrique. Évolution de la production scientifique d’INRAE dans le domaine des risques environnementaux entre 2000 et 2020.

thumbnail Fig. 6

Résultats de l’analyse bibliométrique. Analyse bibliométrique de la production scientifique d’INRAE dans le domaine des risques environnementaux par domaine scientifique.

Mise en perspective

Pour et vers une approche transversale et holistique des risques environnementaux

L’approfondissement et la synthèse de la réflexion conduite dans le cadre de l’ARP Risques ont permis de produire un état des lieux transversal des risques environnementaux en 2020 puis de la recherche menée à INRAE sur le sujet. Le parti pris de l’approche est d’aborder les risques environnementaux de manière très transversale, ce qui rend nécessairement la synthèse difficile15. En outre, les exemples utilisés, bien que divers, proviennent davantage des domaines des risques dits naturels et des risques pour l’environnement que des risques physiques et chimiques chroniques pour l’homme et des risques industriels16, pour ne citer que ceux-ci. Néanmoins, la force de l’approche est bien d’intégrer potentiellement l’ensemble des risques pour l’environnement et les socioécosystèmes de manière unifiée d’un risque à l’autre. Cela a été illustré par l’application quasi généralisée du cadre conceptuel du Giec (Fig. 3) qui permet la transposition et le dialogue des concepts et des méthodes entre les communautés.

L’état des lieux dressé dans la partie « Les risques environnementaux en 2020 : état des lieux et prise en compte » a documenté le besoin clairement exprimé d’une prise en compte holistique des risques environnementaux et de leur caractère de plus en plus multiple et/ou interconnecté. Ce besoin reste toutefois difficile à satisfaire du fait de la complexité qu’une telle prise en compte implique mais aussi du fait du cloisonnement sectoriel et/ou disciplinaire des savoirs et des travaux de recherche associés. La revue proposée dans la partie « Les risques environnementaux à INRAE » a mis en avant des exemples de travaux qui vont dans la direction souhaitable d’une appréhension plus intégrée et systémique des risques environnementaux. Néanmoins, le potentiel de développements nouveaux pour répondre aux défis des risques dans le contexte de l’urgence environnementale actuelle reste immense. Amplifier l’effort de recherche en termes d’analyses plus intégrées des risques environnementaux reste donc indispensable, notamment pour proposer des solutions permettant d’initier des trajectoires d’évolution soutenables des socioécosystèmes où les risques restent relativement maîtrisés. Citons, par exemple, à l’échelle globale, les travaux qui estiment le risque pour le système Terre de la non-atteinte des ODD ou du dépassement du seuil de réchauffement de +1,5 ou +2 °C par rapport à l’ère préindustrielle (Magnan et al., 2021). Pour cela, l’approche transversale proposée et sa mise en œuvre dans le cadre d’une démarche de sciences de la durabilité (cf. le paragraphe « Une recherche ancrée dans les sciences de la durabilité ») et d’un périmètre cohérent et renouvelé (cf. « Un périmètre renouvelé efficace et à partager ») apparaissent comme un prérequis utile, voire indispensable. En outre, il est vraisemblable que des recherches plus sectorielles trouvent également un intérêt au cadre conceptuel homogénéisé proposé pour positionner plus largement leurs développements et apporter leur pierre à l’édifice.

Il a été rappelé que l’appréhension institutionnelle des risques environnementaux avait progressivement évolué au cours des dernières décennies vers un paradigme de plus en plus holistique et « hors silos » dont le meilleur exemple est sans doute l’adoption quasi unanime des ODD en 2015. En corollaire, le recul historique concernant l’avancée de la recherche sur le sujet a été peu creusé. Établir une chronologie de l’évolution des concepts et des modèles de risques et de leurs applications à l’environnement dans les différentes communautés thématiques et disciplinaires va bien au-delà de l’ambition de cet article, mais quelques éléments méritent d’être rappelés. La théorie du risque a connu des développements fondamentaux dans la seconde moitié du XXe siècle permettant de définir l’objet mathématique et son corollaire décisionnel (Von Neumann et Morgenstern, 1953 ; Berger, 1985). En parallèle, les sciences sociales ont mis en évidence le caractère socialement construit du risque (Gilbert, 2003) de même que l’importance, pour sa définition, de la prise en compte des capacités de réaction des sociétés (Wisner et al., 2012). En matière d’application à l’environnement, de nombreuses communautés se sont progressivement structurées autour des problématiques liées aux atteintes variées de l’intégrité des hommes, des sociétés et des écosystèmes par les agents physiques, chimiques ou biologiques et une grande partie de la recherche s’est concentrée sur la composante danger/aléa afin d’en comprendre les processus et les mécanismes à l’origine (UNDRR, 2019a). Néanmoins, la prise en compte explicite des enjeux dans l’évaluation de certains types de risques est loin d’être neuve, notamment poussée au niveau international par les scientifiques regroupés autour de la Society for Risk Analysis (Aven, 2016). Enfin, les travaux précurseurs du club de Rome ouvrant la voie à la compréhension du caractère systémique des risques environnementaux (Meadows et al., 1972) ont été prolongés par ceux de l’Institut international pour l’analyse des systèmes appliqués (IIASA) pour ce qui est des évaluations quantitatives sous-tendant, par exemple, certains scenarii du Giec et ceux de l’Institut de Stockholm sur la résilience qui a renouvelé la réflexion à travers le concept des limites planétaires (Rockström et al., 2009). Au niveau français, la recherche a globalement suivi cette dynamique et, parfois, contribué à l’impulser (notamment pour « sortir » des approches restreintes à l’aléa et au danger), avec, par exemple, de nombreux travaux sur les risques chroniques et diffus dans les années 1990-2000 par les chercheurs des organismes nationaux (Faugères, 1991 ; Boudia et Jas, 2013) et des explorations précoces des concepts de vulnérabilité et de résilience permettant de prendre en compte la dimension systémique de certains risques à l’échelle des sociétés (Fabiani et Theys, 1987). En parallèle, pour les risques naturels, l’appréhension conjointe des aléas et des sociétés inspirée par les « disaster studies » a rencontré un succès croissant (Lieutaud et al., 2020). Malgré un tropisme qui reste marqué pour les aléas, les chercheurs INRAE ne sont pas restés à l’écart de cette évolution, avec, par exemple, des travaux couplant hydraulique et vulnérabilité aux inondations, là aussi dès les années 1990 (Gilard et Gendreau, 1998). Néanmoins, au niveau français, on a pu observer un certain tassement au cours des deux dernières décennies (cf. « Bibliométrie »), et peu d’analyses traitent encore des risques environnementaux de manière très intégrée en termes d’objets et d’échelle spatiale, pour des raisons certainement en partie liées à des moyens limités et à une organisation de la recherche peu favorable à l’émergence de tels travaux. Il est souhaitable que cette analyse transverse, en complément d’autres initiatives17, contribue, à l’avenir, au renouvellement de cette dynamique.

Une recherche ancrée dans les sciences de la durabilité

La synthèse des réflexions de l’ARP Risques, des travaux menés à INRAE et leur mise en perspective permettent de faire ressortir les caractéristiques saillantes d’une recherche contribuant, par une approche holistique et transversale, à l’amélioration de la prise en compte des risques environnementaux dans le contexte où ceux-ci sont de plus en plus sévères, multiples et interdépendants. L’intégration requise concerne à la fois les différentes composantes des risques environnementaux (aléa/danger ; exposition ; vulnérabilité) et toutes les étapes du cycle du risque, de la prévention à la reconstruction : anticipation et réduction par des actions préventives, alerte précoce, prévision à court et à long terme via des méthodes d’évaluation efficaces, gestion de la crise et mise en œuvre de la phase post-crise. En outre, trois niveaux d’intégration peuvent être distingués : i) entre disciplines, en couplant sciences de la Terre, sciences biologiques, sciences mathématiques et sciences humaines et sociales ; ii) entre domaines, pour sortir d’une recherche menée en silos, objet par objet, afin de répondre aux enjeux de la complexité et traiter ainsi les nexus les plus critiques ; iii) entre science et société. Ce dernier implique notamment la coconstruction des questions de recherche entre chercheurs et parties prenantes (opérateurs de gestion, sphère socioéconomique et citoyenne), le recueil de données citoyennes, le développement de collaborations spécifiques avec certaines professions (monde de l’assurance, services climatiques, etc.), la participation à la gouvernance et à l’adaptation des territoires, et l’inclusion dans la prise en compte des risques des représentations des différents acteurs concernés. Un tel dialogue favorise l’innovation, permet de mieux anticiper la réponse de la société aux aléas, de développer sa capacité de résilience et sa culture du risque, de répondre aux préoccupations sociétales et aux controverses et, in fine, de coconstruire la confiance entre les institutions produisant le savoir, le public et les décideurs. Bien sûr, des recherches disciplinaires, très spécifiques, et/ou très en amont en matière, par exemple, de formalisme/concepts ou de processus restent indispensables pour combler les « trous dans la raquette18 » et donner ainsi du sens aux analyses plus transversales.

Sans surprise, ces conclusions recoupent en grande partie celles des prospectives récentes d’autres instituts et structures nationales et internationales sur des thématiques proches (Lauta et al., 2018 ; Brès, 2020) ainsi que celles des synthèses récentes en matière de recherche visant à la réduction des risques (Poljanšek et al., 2017). Il est notable que les caractéristiques de la démarche intégrée requise correspondent en tout point à l’esprit et aux principes des sciences de la durabilité (Clark et Munn, 1986 ; Kates et al., 2001 ; Turner et al., 2003) et de leur mise en œuvre concrète sous la forme de trajectoires de développement soutenable (Rovenskaya et al., 2021). Ainsi, tout en soulignant la nécessité d’aborder frontalement des verrous spécifiques (Eckert et al., 2023), l’analyse proposée confirme l’intérêt d’inscrire la recherche sur les risques environnementaux dans ce corpus. Ce lien entre sciences de la durabilité et risques environnementaux, en particulier systémiques, s’il semble naturel, est toutefois compliqué dès lors que l’on veut dépasser les principes généraux. Par exemple, du point de vue du formalisme mathématique, concilier théorie du risque et viabilité des systèmes dynamiques complexes reste une question largement ouverte. De même, si la mise en œuvre pratique de démarches d’évaluation et de réduction des risques suppose effectivement, très souvent, la mise en œuvre d’une approche systémique et d’un dialogue science-société fluide conformément aux canons des sciences de la durabilité, le « comment faire concrètement » demeure, à ce stade, souvent mal défini. Investiguer le lien entre risques environnementaux (systémiques) et sciences de la durabilité (cadres théoriques, mise en pratique, questions spécifiques particulièrement pertinentes pour les risques, etc.) constitue donc encore un front de recherche nécessaire et stimulant auquel cet article offrira peut-être quelques éléments introductifs utiles.

Un périmètre renouvelé efficace et à partager

Le périmètre dans lequel les risques sont le plus classiquement traités est celui de la RRC, c’est-à-dire les risques pour les enjeux humains et/ou anthropiques (bâti, infrastructures critiques, vulnérabilité directe et indirecte des sociétés, etc.) avec, notamment, un focus sur les risques dits naturels et les risques NaTech. Ce périmètre constitue le cœur de cible du protocole de Sendai. L’analyse proposée élargit cette perspective en intégrant explicitement la dimension environnementale (risques pour les écosystèmes et les milieux) au-delà de l’homme et des seuls bénéfices directs pour les sociétés de l’environnement19. Ce périmètre, plus encore que celui du risque systémique de l’UNDRR, met l’accent sur la nécessité d’aborder les risques environnementaux dans une perspective résolument « hors silos ». Dans l’ARP Risques, il a été illustré le plus directement par des travaux issus des axes transverses : « Liens entre santé de l’environnement et santé humaine » et « Approches multirisques », mais tous les autres axes l’ont considéré, par exemple via l’évaluation des risques en cascade ou des interactions complexes entre aléas dits naturels, sociétés et écosystèmes. Ce périmètre fait ainsi le pont entre RRC au sens du protocole de Sendai, risque systémique au sens de l’UNDRR et la notion de risque de l’IPBES (extinction des communautés et des espèces, Brondizio et al., 2019), de même qu’avec les travaux des économistes sur la valeur de la biodiversité (Dasgupta, 2021). Il fait écho à la philosophie intégratrice des ODD et au mouvement de convergence entre cadres d’action initialement orientés de façon disjointe vers les problématiques de climat, de biodiversité ou de développement (Handmer et al., 2020 ; Mysiak et al., 2018 ; Peduzzi, 2019, cf. 1re partie de cet article, « Les risques environnementaux en 2020 : état des lieux et prise en compte »). Il est également en accord avec la réflexion conduite récemment conjointement par le Giec et l’IPBES sur les interactions entre changement climatique et pertes de biodiversité (Pörtner et al., 2021).

L’intérêt de ce périmètre est d’acter que, du fait de l’imbrication désormais quasi totale des systèmes naturels et des sociétés et de la complexité qui en résulte, les risques environnementaux doivent être appréhendés en envisageant dans sa globalité le fonctionnement et l’habitabilité du système Terre20. Si elle s’impose progressivement (UNU-ESH, 2021), elle reste encore peu diffusée parmi les communautés « risques », en particulier en France21, y compris dans les communautés qui sont actuellement les plus avancées dans la prise en compte de l’ensemble des complexités concourant au(x) risque(s). En particulier, l’approche risque reste, à ce stade, peu employée, en tout cas explicitement, pour les écosystèmes et les milieux dès lors que les conséquences directes et immédiates pour l’homme (pertes de biodiversité, modification des milieux et des écosystèmes, etc.) ne sont pas l’objet de l’étude. La vision transversale des risques environnementaux proposée par l’ARP Risques et la présente analyse possède donc une originalité contribuant à lui donner une portée générique. Son caractère opérationnel et utile pour de nombreuses communautés a d’ailleurs été établi par l’utilisation généralisée du cadre conceptuel du Giec.

L’analyse a été réalisée par INRAE du fait de son histoire et de sa structure. L’institut bénéficie en effet d’une taille et d’une couverture disciplinaire et thématique large et il possède une organisation a priori un peu moins disciplinaire ou focalisée thématiquement que d’autres instituts français. Même s’il reste beaucoup à faire, ces caractéristiques sont favorables à l’émergence d’études des risques environnementaux dans une perspective hors silos inscrite dans les sciences de la durabilité, et l’analyse effectuée (cartographie des travaux, des équipes et des infrastructures, bibliométrie) montre que les bénéfices de ce positionnement sont déjà apparents dans les faits. Néanmoins, le rôle des partenaires dans cette dynamique et son amplification appelée de nos vœux est primordial. À titre d’exemple, une grande partie des travaux cités dans la bibliographie et/ou la bibliométrie aurait été impossible sans partenariat (cf. « Cadres conceptuels mobilisés et exemples d’applications » et « Bibliométrie »). De même, l’essentiel des infrastructures et structures de recherche mentionnées (cf. « Infrastructures et structuration régionale ») est coadministré. Enfin, certains risques environnementaux et/ou certaines de leurs composantes sont tout simplement hors du champ des recherches INRAE alors qu’ils doivent être inclus dans toute approche qui se voudrait réellement intégrée et efficace. Même s’il ne paraît pas illégitime de dire qu’INRAE a un rôle important et relativement original à jouer pour faire avancer la recherche française, voire internationale, sur les risques environnementaux, l’effort ne peut être que collectif au sein d’un paysage de la recherche nationale mieux structuré sur la thématique (Eckert et Grandjean, 2020). Nous espérons que cette analyse apportera une pierre utile à la mobilisation « générale » urgente requise.

Remerciements

Les auteurs remercient chaleureusement l’ensemble des contributeurs aux différents groupes de travail de l’ARP Risques, Chantal Gascuel-Odoux et Marie Rabut pour leur implication tout au long de la procédure ainsi que le comité de rédaction de la revue Natures Sciences Sociétés pour ses recommandations constructives qui ont permis d’affiner et de clarifier le propos. Sandrine Gelin est remerciée pour sa relecture critique d’une version antérieure du manuscrit. Nicolas Eckert et Florie Giacona sont membres du Grenoble Risk Institute.

Références


1

À comprendre de façon très large et intégrative comme l’ensemble des risques liés de près ou de loin à l’environnement : risques dits « naturels », risques d’origine physique, chimique ou sanitaire, risques liés à l’alimentation, que ces risques soient rapides ou lents, brutaux ou diffus, récurrents ou émergents, et qu’ils concernent l’homme, les enjeux anthropisés ou les écosystèmes.

2

Les quatre principaux objectifs de ce cadre sont la réduction des impacts, la mise en place d’une gouvernance et de stratégies de prévention, d’atténuation ou, le cas échéant, d’adaptation efficaces, le renforcement de la coopération internationale et le développement de systèmes d’alerte, en particulier multirisques.

3

De nombreuses communautés n’ont pas « attendu » le Giec pour décomposer le risque en « aléa/danger-vulnérabilité-exposition » ou en « aléa/danger-vulnérabilité » – c’est le cas, par exemple de l’International Union of Geological Sciences (IUGS, 1997) –, mais, globalement, cela reste relativement récent (quelques décennies). En outre, certaines communautés scientifiques restent encore sur des acceptions du risque quasi exclusivement centrées sur l’aléa ou le danger. Ainsi, voir ce cadre conceptuel désormais adopté à un niveau institutionnel qui influence les politiques environnementales à l’échelon international montre le chemin parcouru.

4

Le Bureau des Nations unies pour la réduction des risques des catastrophes.

6

Voir, à ce sujet, les zones sinistrées photographiées par avion par l’Institut géographique national (IGN).

7

Bien sûr, des réflexions concernant l’appréhension des risques environnementaux ont été menées au sein de la recherche française antérieurement. Néanmoins, la période récente se caractérise par une forte dynamique, poussée par l’urgence environnementale et le renouvellement des problématiques (interconnexion croissante, développement fulgurant des méthodes basées sur l’intelligence artificielle, etc.). Pour un bref rappel du contexte, voir plus bas la partie intitulée « Mise en perspective ».

8

Suivant les communautés, pour décrire de telles recherches, sont utilisés, avec de subtiles différences, les concepts de « recherche à l’interface science-société », de « recherche transdisciplinaire » ou de « recherche-action ».

9

NaTech (contraction de « naturel » et de « technologique ») : risques impliquant un aléa naturel et un aléa lié à l’anthropisation déclenché par l’aléa naturel, l’exemple type étant le séisme de Tohoku en 2011, et le tsunami et l’accident nucléaire de Fukushima qui en ont résulté.

10

Nous utilisons la convention des climatologues pour lesquels les grandes échelles spatiales correspondent à ce qui est « très grand » et les petites échelles spatiales à ce qui est « très petit », par opposition aux géographes qui utilisent la convention inverse.

11

Ce dernier a mobilisé le cadre proposé par le Codex Alimentarius, largement admis dans la communauté, un programme commun de la FAO et de l’OMS consistant en un recueil de normes, de codes d’usages, de directives et d’autres recommandations relatifs à la production et à la transformation agroalimentaires qui ont pour objet la sécurité sanitaire des aliments, la protection des consommateurs et des travailleurs des filières alimentaires et la préservation de l’environnement (FAO et WHO, 1981).

12

Une telle extrapolation n’est pas robuste avec une approche purement « data-based ».

14

La croissance de la contribution INRAE à la recherche sur les risques environnementaux est très forte au sein de la recherche française sur toute la période 2000-2020 (de 9,5 à 16,5 % entre 2000 et 2020), tandis que la part INRAE dans la recherche mondiale se tasse sur les années récentes (croissance d’environ 0,35 à près de 0,7 % entre 2000 et 2010 puis stabilisation autour de 0,65 % entre 2010 et 2020). Ces résultats sont sans doute liés i) à la situation globalement difficile des chercheurs de la communauté « risques » en France (cf. le paragraphe « Un besoin réaffirmé d’action forte et immédiate ») et ii) à l’émergence récente de « très gros » publiants (Chine, Inde, etc.).

15

En particulier, la bibliographie proposée n’inclut pas de détails relatifs aux cas d’étude traités et aux conclusions qui en ont été tirées, et ne constitue pas un état de l’art de l’ensemble des risques considérés, au sein des équipes INRAE et encore moins au-delà.

16

Notamment du fait des spécialités des auteurs et du positionnement des équipes INRAE.

17

Programme interdisciplinaire INRAE dédié aux risques multiples en cours de lancement en juin 2022, prospectives et plans d’action des autres instituts, nouvel axe dédié aux sciences de la durabilité dans la programmation ANR, programme Irima (gestion intégrée des risques pour des sociétés plus résilientes à l’ère des changements globaux) dédié à l’appréhension intégrée des risques au sein du PIA4 (programme d’investissements d’avenir), etc.

18

Par exemple, définir des mesures de risques utilisables dans un cadre de risques multiples et non stationnaires, ou comprendre les processus en jeu dans les risques émergents, par définition non connus à l’avance.

19

Via les solutions fondées sur la nature, par exemple.

20

Pour paraphraser le concept de « One health » qui propose une approche systémique de la santé associant santé de l’humain, des animaux et de l’environnement (Destoumieux-Garzón et al., 2018), le concept de « One risk » pourrait sans doute être formulé.

21

À titre d’exemple, le programme Irima (2023-2030) inscrit au PIA4 a été construit sur la thématique des risques exprimés par et pour les sociétés. Les réflexions de l’ARP INRAE ont alimenté ce montage. Néanmoins, contrairement à l’ARP INRAE et au positionnement de l’établissement qui en résulte, le périmètre d’Irima n’inclut pas les risques pour les écosystèmes et les milieux.

Citation de l’article : Eckert N., Rigolot É., Caquet T., Naaim M., Giacona F. 2023. Les risques environnementaux en 2020 : état des lieux et leçons d’une réflexion prospective à INRAE. Nat. Sci. Soc. 31, 3, 325-346.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Cadre conceptuel du Giec (IPCC, 2014) utilisé comme base pour les travaux de l’atelier de réflexion prospective interne INRAE dédié aux risques environnementaux (ARP Risques).

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Le risque selon l’UNDRR (2019a, chapitre 1, p. 25). Convergence des cadres internationaux et évolution des approches.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Adaptation du cadre conceptuel du Giec (IPCC, 2014) aux risques A) biotiques ; B) alimentaires et C) environnementaux au sens strict de l’ARP Risques (cf. Encadré 1).

Dans le texte
thumbnail Fig. 4

Le risque selon l’UNDRR (2019a). Vision systémique du risque.

Dans le texte
thumbnail Fig. 5

Résultats de l’analyse bibliométrique. Évolution de la production scientifique d’INRAE dans le domaine des risques environnementaux entre 2000 et 2020.

Dans le texte
thumbnail Fig. 6

Résultats de l’analyse bibliométrique. Analyse bibliométrique de la production scientifique d’INRAE dans le domaine des risques environnementaux par domaine scientifique.

Dans le texte

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