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Nat. Sci. Soc.
Volume 31, Number 4, Octobre/Décembre 2023
Dossier « La recherche au défi de la crise des temporalités »
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Page(s) | 490 - 501 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/nss/2024012 | |
Published online | 12 June 2024 |
Dossier : « La recherche au défi de la crise des temporalités » : Urgence climatique et temporalités locales : la territorialisation contrariée des politiques de lutte contre le changement climatique★
Climate urgency and local temporalities: the difficult territorialisation of climate policies
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Sociologie, Sciences Po Bordeaux, UMR Centre Émile Durkheim, Bordeaux, France
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Science politique, Sciences Po Bordeaux, UMR Centre Émile Durkheim, Bordeaux, France
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Science politique, Fondation nationale des sciences politiques, UMR Centre Émile Durkheim, Bordeaux, France
* Auteur correspondant : a.smith@sciencespobordeaux.fr
Cet article éclaire la territorialisation de l’action climatique en ciblant ses temporalités politiques et administratives locales. Empiriquement, nous nous appuyons sur l’analyse de la mise en œuvre de plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) dans douze intercommunalités de Nouvelle-Aquitaine. À partir de l’étude de la mise en œuvre concrète de ces plans, du travail politique et administratif auquel ils donnent lieu, nous identifions deux freins à la légitimation d’une intervention climatique à l’échelon local. Le portage politique très individualisé de cette question par des élus et par des techniciens, et des trajectoires intercommunales et environnementales contrastées s’opposent à une priorisation locale de la question climatique. Les injonctions étatiques en matière de territorialisation de l’action climatique se heurtent aux temporalités politiques locales.
Abstract
This article explores the issue of the temporality of climate change from the angle of the formulation and implementation of local public policies which profess to address this fundamental political challenge. Empirically, it draws upon an analysis of the appropriation of Local Climate Plans (LCP) in twelve ‘intercommunal’ bodies in New Aquitaine. In France, virtually all such bodies are now required to develop LCP. Through interviews and documentary analyses, we studied the political work that the implementation of this obligation has entailed, in particular regarding two obstacles to legitimating climate action at the local scale. Firstly, we show that for local authorities, despite the work of ecologically committed administrative staff, political backing is only given by a minority of isolated elected councillors. Secondly, each locality has its own historical trajectory of environmental action and, more generally, of public policymaking at the intercommunal scale. The sedimentation of this past into local configurations consistently affects the content and meaning of each LCP. More generally, we show that actors have great difficulty pinning down, prioritizing, and legitimating climate change as a ‘public problem’ that deserves to be acted upon locally. As with the two non-drivers of political change listed above, this again contributes to creative and significant climate initiatives not being framed as urgent at the local scale.
Mots clés : changement climatique / collectivités territoriales / gouvernance / environnement / action publique territoriale
Key words: climate change / territorial communities / governance / environment / territorial public policies
Voir dans ce numéro le texte de présentation du dossier par P. Cornu et J. Theys, ainsi que les autres contributions qui le composent.
© A. Aulagnier et al., Hosted by EDP Sciences, 2023
This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License CC-BY (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, except for commercial purposes, provided the original work is properly cited.
Face à la pandémie du Covid-19, un « état d’urgence sanitaire » a été très rapidement imposé en mars 2020, en particulier en France, s’appuyant sur des décisions contraignantes : limitation de la liberté de déplacement et confinements successifs, passe sanitaire puis vaccinal, assorti d’une obligation pour certaines catégories de la population. Parallèlement, des mesures d’accompagnement financier d’ampleur sans précédent ont été mises en œuvre par l’État – le fameux « quoi qu’il en coûte ». Cette réaction vigoureuse et très rapide à l’urgence sanitaire contraste avec la construction laborieuse et la mise en œuvre timide des politiques sur le changement climatique, pour lesquelles l’urgence reste essentiellement rhétorique1, en dépit de l’alerte scientifique répétée et sans ambiguïté portée notamment par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).
Ce décalage entre les politiques publiques observables et l’urgence du problème à traiter souligne la difficulté à articuler les différentes échelles de temps dans l’action (Semal et Villalba, 2013 ; Theys, 2015). La science politique souligne qu’une question qui se pose à la société ne peut faire l’objet de politiques publiques que dans la mesure où elle a été construite comme « problème public » susceptible d’être pris en charge par des instruments d’action publique (Rochefort et Cobb, 1994 ; Neveu, 2015). Cette construction, acquise à l’échelle nationale avec le Plan climat ou la Stratégie nationale bas carbone articulée à la Programmation pluriannuelle de l’énergie, ne se traduit pas automatiquement par une action publique ambitieuse dans les territoires. Cet article s’attache à mieux comprendre la non-construction de l’urgence climatique à l’échelon local à travers une étude de l’élaboration et de la mise en œuvre du plan climat-air-énergie territorial (PCAET), rendu obligatoire par la loi TEPCV (transition énergétique pour la croissance verte) de 20152 pour les intercommunalités (EPCI [établissement public de coopération intercommunale]) à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants – possible sur une base volontaire pour les autres.
Depuis le début des années 2000, une logique de territorialisation de l’action climatique est engagée, à l’instigation de l’État qui a encouragé les collectivités locales à adopter un plan climat, d’abord sur une base volontaire. Avant même la loi TEPCV, la loi Grenelle 2 de 2010 avait imposé aux collectivités de plus de 50 000 habitants d’élaborer un plan climat-énergie territorial. De plus, la loi climat et résilience de 20213 a renforcé l’articulation entre ces instruments et la planification de l’aménagement de l’urbanisme, notamment en exigeant une compatibilité des PLUI (Plan local d’urbanisme intercommunal) avec les PCAET. Pour autant, la contrainte de se conformer à cette injonction du centre politique ne garantit en rien l’ambition, la pertinence de l’action locale et encore moins une réelle appropriation de l’urgence climatique par les acteurs des territoires.
De nombreux travaux en sciences sociales se sont d’ores et déjà penchés sur cette dynamique de territorialisation de l’action climatique, en France comme ailleurs dans le monde (Mazeaud et al., 2022). Alors que des instruments de territorialisation ont été déployés progressivement sur les vingt dernières années (Godinot, 2011), ces recherches documentent la trajectoire d’intensification des injonctions à la mise en œuvre de politiques climatiques locales. Un accent a naturellement été mis dans un premier temps sur des territoires pionniers, en particulier des réseaux de villes et métropoles volontairement engagées dans la participation à la lutte contre le réchauffement climatique (Emelianoff, 2007). L’enjeu d’une première série d’enquêtes a donc été de comprendre les facteurs explicatifs de l’engagement de villes ou de territoires dans la mise en œuvre de politiques climatiques locales en amont d’une obligation (Emelianoff, 2014 ; Yalçın et Lefèvre, 2012). Les liens privilégiés avec les institutions nationales ou européennes, tout comme l’engagement dans de précédentes démarches environnementales, ont été identifiés comme des éléments essentiels.
Dans la foulée, les premières analyses de la montée en puissance réglementaire de la territorialisation de l’action climatique sont restées concentrées sur des territoires pionniers (Bertrand et Richard, 2014) ou exceptionnellement volontaires (Bertrand et Amalric, 2017 ; Arnauld de Sartre et al., 2021). Ces travaux identifient dans les cas d’étude sélectionnés les facteurs qui expliquent une réponse territoriale aux injonctions nationales de plus en plus pressantes : présence d’un portage politique soutenu, appui sur des politiques environnementales plus anciennes, savoir-faire en matière de gestion de projets. En dehors de travaux empreints d’une forte dimension prospective (Brédif et al., 2015), ces enquêtes ont la particularité de se concentrer sur un nombre réduit de territoires, souvent marqués par une dimension pionnière ou volontariste. Si l’émergence d’une territorialisation de l’action climatique a été étudiée, les conditions de sa massification restent donc à analyser.
Cela semble d’autant plus important que le suivi effectué par les collectivités elles-mêmes met en avant une difficulté à engager tous les territoires dans la lutte contre le réchauffement climatique. D’un côté, d’après les comptages de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), sur les 754 EPCI de plus de 20 000 habitants qui doivent réaliser un PCAET, seuls 44 % avaient adopté leur PCAET en août 2022, alors que l’échéance initiale était fixée à décembre 2018. Par ailleurs, de premières enquêtes administratives (Intercommunalités de France, 2021 ; Dreal Nouvelle-Aquitaine, 2019) soulignent que les plans adoptés jusqu’à présent ne font montre ni d’un niveau élevé d’ambition, ni de réelle innovation dans les mesures mises en avant. Plus encore, dans de nombreux cas et en dépit de l’objectif affiché – au moins dans les guides de l’Ademe – de « participation » du public, ces plans n’ont pas fait l’objet d’une forte appropriation sur le plan local.
Les travaux cités plus haut permettent d’invalider plusieurs hypothèses de sens commun pour expliquer cette faiblesse de la priorisation du climat dans l’action publique locale. La première concerne le caractère incertain, éloigné et abstrait de la menace climatique, notamment par rapport à celle plus immédiatement saisissable d’un virus comme le Covid-19 ou de la guerre en Ukraine. Certes, il peut être difficile pour le grand public de faire le lien entre les indicateurs scientifiques qui équipent les connaissances sur le réchauffement climatique (Miller et Edwards, 2001), telle la hausse moyenne de température à l’échelle du globe, et les aléas météorologiques subis localement. De la même manière, l’impression d’un éloignement, dans le temps ou dans l’espace, des effets les plus spectaculaires du changement climatique, peut inviter à reléguer cette préoccupation à l’arrière-plan (Bertrand et Amalric, 2017) ou susciter un hiatus entre ce phénomène et la perception qu’en ont certains élus (Bertrand et Richard, 2014). Mais l’ensemble des travaux qui se sont penchés sur la territorialisation des politiques climatiques invite à relativiser une attitude de déni devenue marginale en France (Brédif et al., 2015).
Un deuxième registre d’explication est celui d’une capture de l’action publique par des intérêts privés ou par des corporatismes. Au niveau national, des acteurs économiques divers tentent en effet d’entraver la lutte contre le réchauffement climatique et la mise en place d’instruments ambitieux (Oreskes et Conway, 2010). Cependant, il convient de ne pas surestimer l’influence de ces groupes d’intérêt à l’échelon local, où ce sont surtout les élus et les cadres des collectivités publiques qui sont décisionnaires.
Dans la continuité des travaux susmentionnés, nous proposons de dépasser ces deux registres d’explication. Conclure au déni ou au relativisme des acteurs locaux risque d’invisibiliser l’activité effective d’une partie d’entre eux. Se contenter d’expliquer la faible ambition des politiques climatiques locales par l’opposition déclarée de certains acteurs revient à leur prêter un degré d’organisation et d’influence excessif. En d’autres termes, nous entendons montrer que ce ne sont pas tant la réalité ou l’importance donnée au problème climatique qui sont en jeu, mais ce sont plutôt la pertinence de sa prise en charge au niveau local et les modalités de son appropriation. Nous nous appuyons pour cela sur un protocole d’enquête marqué par une particularité : un intérêt pour les territoires exemplaires, mais également pour des territoires au sein desquels l’appropriation de la question climatique a été très limitée (voir Encadré 1). C’est à partir de l’analyse de ces territoires contrastés que nous formulons l’hypothèse au cœur de cet article : la territorialisation de l’action climatique – envisagée comme un processus homogène – se heurte à des temporalités locales dissonantes. En développant cette hypothèse, cet article met au jour une série d’obstacles à la construction d’un « problème climatique » à l’échelle locale, qui expliquent de fortes disparités entre territoires. Il permet tout d’abord de mieux comprendre ce qui caractérise le portage politique des enjeux climatiques à l’échelle intercommunale, notamment par les élus (première partie). Il propose ensuite une analyse fine de l’histoire des enjeux climatiques et environnementaux dans chaque EPCI, afin de mieux comprendre les effets limités des instruments qui incarnent actuellement la dynamique de territorialisation (deuxième partie).
Méthodologie.
Le présent article s’appuie sur une enquête structurée autour des PCAET des EPCI de Nouvelle-Aquitaine*. Avec 15 % du territoire de l’Hexagone et 12 départements, la plus grande région française compte pour environ 11 % des émissions nationales de gaz à effet de serre. Elle se caractérise par une grande variété de biotopes et de paysages, y compris deux zones montagneuses, un poids important de l’agriculture, une large façade maritime et une forte exposition au changement climatique comme illustré par le rapport du Comité scientifique régional sur le changement climatique AcclimaTerra (Le Treut, 2018). Le conseil régional a adopté fin 2019 un agenda politique articulant changement climatique, préservation de la biodiversité et développement durable : la feuille de route Néo Terra**. Son président tient un discours d’exemplarité de la région dans l’adaptation au changement climatique.
Deux matériaux empiriques principaux ont été récoltés :
Une base de données descriptive (obtenues par analyse documentaire et construction et diffusion d’un questionnaire) a été produite sur l’ensemble des EPCI de la région, pour mieux connaître le niveau d’investissement de chacun de ces établissements en matière de politique climatique.
Une douzaine de territoires ont, à ce jour, fait l’objet d’une campagne d’une quarantaine d’entretiens. Ils ont été sélectionnés en fonction de leurs caractéristiques (taille, structure économique, positionnement géographique) et du niveau d’ambition et de développement de leurs politiques climatiques respectives. La recherche d’une hétérogénéité maximale a été privilégiée tout en ciblant les territoires ruraux moins couverts par la littérature. Si les PCAET ont été notre point d’entrée empirique, c’est bien la politique climatique des EPCI dans son ensemble qui nous a intéressée.
Dans la première partie, les observations effectuées dans les territoires par l’un des coauteurs impliqué dans AcclimaTerra depuis 2015 viennent compléter nos données d’enquête. Beaucoup des conférences publiques ainsi effectuées étaient liées au processus d’adoption des PCAET dans ces EPCI.
* Enquête initiée en novembre 2020 dans le cadre du projet APCLIMTER financé par la région Nouvelle-Aquitaine dans le cadre de son appel FlashCovid.
Un portage politique et technique contingent
Comme cela a été suggéré dans la série de travaux précitée portant sur les territoires pionniers, la légitimation d’une action climatique locale est très fortement liée à la présence d’un portage politique avéré et/ou de techniciens mobilisés et formés sur ces questions (Yalçin et Lefèvre, 2012). L’analyse de nos cas d’étude confirme cette nécessité, tout en mettant en avant le caractère fragile et contingent de cette implication d’élus, comme de techniciens engagés. La présence et le niveau d’investissement de ces acteurs cruciaux sont très inégaux suivant l’histoire de chaque territoire. La mise en œuvre des PCAET tend à répercuter ces inégalités, sans offrir de réelles ressources pour les gommer. À ce titre, le processus de territorialisation de l’action climatique se heurte à la disparité des temporalités de chaque EPCI.
Quelques élus engagés mais isolés
Si dans les grandes villes, un nombre significatif d’élus locaux ont affiché en 2020, au moins en campagne électorale et en début de mandat, un engagement en faveur de la protection de l’environnement, voire spécifiquement sur l’enjeu climatique, il n’en va pas de même dans les communautés de communes (CDC) rurales majoritaires, où la défiance à l’égard de tout ce qui touche à l’écologie et de ceux qui la portent est très répandue (Kerrouche, 2011). Ainsi l’ex-vice-président responsable du dossier dans un EPCI rural de Dordogne qui a fait un PCAET volontaire (Ent. 14) explique pourquoi il lui a été difficile de mobiliser ses collègues :
Le PCAET, oui, bon ben – je vais exagérer un peu mais en gros – si ça te fait plaisir d’y aller, on y va ! Voilà. Mais il y avait pas d’adhésion profonde à ça. Mais ça, ça vient je crois d’une, oui, d’un phénomène d’acculturation, c’est-à-dire que la question environnementale n’était pas, n’était pas première. On passait plus de temps à discuter, oui, de la marque du tracteur qu’on allait acheter ou des questions de voirie […] Et il y a un autre facteur qui est la crainte, la peur. Je crois que les enjeux sont tels et la complexité de ces thématiques est telle qu’un certain nombre de mes collègues, pfff ! reculaient en disant : « Ouh là, là ! » […] Moi je suis certain, là je connais certains dans le conseil pour qui la question climatique, le changement climatique c’est encore une histoire pour eux qui est une histoire fumeuse.
Ce que ne contredit pas l’actuel élu référent PCAET de cette CDC (Ent. 25) :
Je pense que le président de l’EPCI s’en fout un peu du PCAET. […] Les élus, je les sens pas mobilisés.
Sur d’autres territoires au contraire, comme cette CDC du nord de la Vienne, l’élue en charge du dossier s’estime bien soutenue par son président et met en avant le vote du PCAET à l’unanimité par le conseil communautaire (en réalité, le cas le plus fréquent et qui ne garantit en rien une réelle adhésion des élus à la démarche). Son chargé de mission énergie-développement durable (Ent. 56) modère toutefois cette perception :
Et sur le plan climat, quand je dis il a été voté à l’unanimité parce qu’on a une parole qui est celle de la vice-présidente, qui construit un discours, ben tout le monde en reste baba et donc, ouais, on dit : « Ben oui, c’est très beau. » Tout le monde est pour. Mais on entend des élus par-derrière : « Ouais, mais on n’en pense pas moins ! » Bon, pourquoi vous le dites pas si vous pensez autre chose ?
De son côté, l’ancien vice-président d’une CDC de l’est des Pyrénées-Atlantiques (Ent. 37), après avoir expliqué par quel biais les questions d’environnement avaient été abordées dans une collectivité au lourd passé industriel, cale sur la question climatique :
Le problème climatique, c’est vrai que c’est un problème qui est très, très compliqué. J’avoue que… c’est effectivement complexe.
Il ajoute à propos de l’actuel président de l’EPCI (avec lequel il ne s’entend guère) :
Il s’intéresse surtout, enfin beaucoup au développement industriel quand même. C’est quand même ça son dada, c’est le développement industriel et l’emploi sur le bassin.
Ce constat pessimiste est cependant nuancé par le président d’une CDC du nord des Deux-Sèvres (Ent. 48), dans un territoire engagé de longue date dans des projets de transition, notamment énergétiques, où il a joué lui-même un rôle moteur ; il note :
Et moi j’ai vu des évolutions importantes dans la prise de conscience des élus depuis vingt ans sur cette question, mais aussi sur une question qui est pour moi très proche de celle-là, c’est la question de la consommation d’espace, la question de la maîtrise de l’urbanisme. […] Et je trouve qu’on est de plus en plus pour les élus dans un portage un peu collectif […] et je trouve que les nouveaux qui arrivent, ils se connectent beaucoup plus vite à cette question-là que ceux que je connaissais dans les années 2000.
On voit ici que la dimension temporelle joue dans l’apprentissage à la fois des questions environnementales et climatiques et des instruments pour traiter ces nouveaux enjeux d’action publique locale. Il faut indiquer toutefois l’effet du renouvellement partiel du personnel politique à chaque élection municipale, notamment en 2020, qui a été mentionné sur la plupart de nos terrains.
Mais pour beaucoup d’élus, de tels apprentissages se font difficilement. Par exemple, dans un syndicat de Schéma de cohérence territoriale (Scot) de Gironde qui fédère, depuis 2005, 17 communes de trois communautés de communes partiellement en littoral, plusieurs élus se sont fortement engagés en faveur de la prise en compte du changement climatique mais ont souvent rencontré de l’indifférence, voire de l’hostilité, de la part de la plupart de leurs collègues. À titre d’exemple, une maire adjointe d’une grosse commune dominée par la droite, en charge de l’environnement depuis plus de 15 ans, est néanmoins parvenue à susciter des initiatives vertueuses (développement de pistes cyclables, rénovation thermique de bâtiments publics). De manière semblable, une autre élue dans une commune moins peuplée a réussi à imposer une politique d’urbanisme à même de maîtriser l’artificialisation des sols et de préserver la biodiversité dans son territoire. Cependant, ces élus insistent également sur leur isolement et sur la difficulté à entraîner leurs collègues. Comme nous a confié l’un d’entre eux (Ent. 119) :
Les questions de l’environnement ne sont pas du tout prégnantes […]. Tout le monde a le mot « environnement » à la bouche, mais personne ne bouge.
À ce titre, Ent. 410 rappelle que le manque d’engagement des élus peut aussi refléter une attitude récurrente de leurs électeurs :
C’est sûr que tout le monde pense qu’on va dans le mur avec le réchauffement climatique, mais personne ne veut qu’il y ait de la méthanisation pas trop loin de chez lui. Et les éoliennes, ici, les gens n’en veulent plus du tout. […] Je crois que les gens sont individualistes et ils voient leur intérêt personnel.
Ent. 111, pour sa part, souligne l’échec de la plupart des CDC à impliquer le grand public, voire les parties prenantes du territoire, dans la préparation du plan climat :
Parce que pour les gens, ça reste encore du jargon, voilà, je crois que ça reste encore du jargon. Il faut qu’on arrive… moi, j’ai pas trouvé la méthode honnêtement et c’est peut-être là où je peux dire que j’ai failli, j’ai pas trouvé la méthode pour arriver à convaincre les gens de participer et de venir. Alors est-ce que c’est une question de mots ?
En somme, nos études de cas montrent que pour la plupart des élus concernés, l’appropriation de l’action climatique demeure limitée et peu priorisée. Dans ce contexte, il semble que la dynamique de territorialisation de l’action climatique et la mise en œuvre des PCAET n’aient pas d’influence décisive sur la priorisation de cet enjeu. L’engagement d’élus préexiste généralement au mouvement de territorialisation impulsé par l’État et le processus de construction de cet instrument permet rarement d’identifier ou d’enrôler de nouveaux porteurs sur ces questions.
Le volontarisme des techniciens
Cette analyse du positionnement des élus est largement partagée par les agents administratifs des CDC, les techniciens qui ont la charge de mettre en place et faire appliquer les PCAET. Ces personnels des collectivités sont souvent personnellement engagés en faveur de la transition écologique et/ou énergétique ou au moins très conscients des enjeux (Bertrand et Rocher, 2011 ; Négrier et Simoulin, 2021). Tous soulignent cette dimension cruciale du portage politique local, telle la chargée de mission transition écologique d’une CDC du nord des Deux-Sèvres (Ent. 612), faisant ainsi écho à son président (Ent. 413) :
Je vais pas vous dire que l’ensemble des élus sont de fervents défenseurs et sont hyperprésents à toutes nos réunions et notamment à notre Copil « transition écologique ». Il y a pas un débordement d’enthousiasme de la part de l’ensemble du conseil communautaire, mais on a un président, un vice-président parfaitement convaincus par ces sujets, un bureau communautaire très sensibilisé aujourd’hui qui comprend les enjeux et donc, je crois que j’ai pas eu l’occasion d’avoir un refus ferme sur quelque projet que ce soit jusqu’à aujourd’hui.
Beaucoup des chargés de mission interrogés évoquent toutefois les efforts incessants qu’ils doivent déployer pour convaincre et entraîner les élus, telle cette chargée de mission de la CDC de l’est des Pyrénées-Atlantiques évoquée ci-dessus, qui a dû lutter contre l’hostilité de principe d’un premier président d’EPCI ne jurant que par la « chimie verte », avant de pouvoir s’appuyer lors du mandat suivant sur un vice-président engagé (Ent. 314), mais qui a dû à nouveau réexpliquer la démarche à un conseil communautaire renouvelé à 40 % – dont le président – à la suite des élections municipales de 2020. Pourtant, sur le papier, il s’agit d’un EPCI exemplaire puisqu’il a été l’un des premiers à adopter son PCAET en Nouvelle-Aquitaine et qu’il est désormais en phase de bilan/renouvellement.
Dans une communauté d’agglomération du littoral de Charente-Maritime, la cheffe de projet (Ent. 715) souligne les efforts récurrents pour tenter de convaincre les élus locaux de l’intérêt de la problématique climatique pour leur territoire, et cela dès le PCET (plan climat-énergie territorial) précédant l’actuel PCAET :
Sur notre EPCI, il y a eu le plan climat parce qu’il y avait l’obligation, clairement. Ça a pas été fait de gaieté de cœur de la part de la personne qui était sur ce poste avant moi et de la part des élus, je pense que c’est un peu pour ça qu’elle est partie, elle s’est traînée un wagon de gens qui allaient à reculons donc […] C’est ce qui s’est passé pendant six ans, voilà on a réussi à convaincre les élus qui ont vraiment, sur la fin de leur mandat, réussi à passer des caps qu’ils arrivaient pas à franchir avant sur des choses qu’ils voulaient mettre en œuvre.
Las, une alternance partisane aux élections communales de juin 2020 est venue tout remettre en cause et forcer la cheffe de projet à reprendre ce travail de Sisyphe :
Donc, nouveaux joueurs et puis on a deux tiers de nos élus du conseil communautaire qui ont changé, donc les deux tiers c’est des nouveaux qui débarquent totalement sur le sujet mais alors de manière légitime, ils viennent d’être à la retraite, ils avaient une carrière dans je ne sais quoi mais certainement pas ça, ils en ont aucune connaissance. C’est des notions un peu particulières donc c’est vrai que du coup c’est pas évident de les embarquer là-dedans.
Pour expliquer ce problème, Ent. 5,16 déjà cité, invoque également la difficulté pour les élus de s’approprier des thématiques techniques pour lesquelles ils n’ont pas été formés. D’autres techniciens soulignent l’importance d’aborder les questions d’énergie-climat par le biais de projets opérationnels plutôt que par de grandes idées, si possible avec des financements à la clé, comme ceux obtenus dans le cadre des appels à projets TEPCV ou Cit’ergie17. Un autre argument avancé par les élus réticents dès que des techniciens priorisent auprès d’eux les enjeux climatiques est celui des préoccupations immédiates sur lesquelles les attendent leurs administrés. Quand Ent. 718 a voulu justifier le déploiement d’énergies renouvelables (ENR) sur le territoire ou la prise en compte du risque de submersion sur le littoral, elle s’est attiré cette réponse :
Tout de suite on m’a dit : « Non, non, mais nous on est dans des problèmes d’aujourd’hui ». Le changement climatique, ça les dépasse.
Comme elle le souligne, privilégier les opportunités d’avancer concrètement est alors la stratégie qu’elle favorise :
Donc, là, on est en train d’acheter des vélos pour mettre des vélos en libre-service, dont certains à assistance électrique. Voilà, en fait les élus ils ont vite compris l’opportunité de ces choses-là et on les a lancées parce qu’il y avait l’adhésion politique…
Ce hiatus fréquent entre des élus oscillant entre indifférence et scepticisme, à l’exception régulière du vice-président dédié aux questions environnement-climat, et des chargés de mission fortement impliqués individuellement, est aussi apparu clairement lors de nombreuses interventions effectuées par l’un des auteurs, au nom d’AcclimaTerra, dans les EPCI de Nouvelle-Aquitaine. Dans une communauté d’agglomération de l’est de la Gironde, le manque de soutien du conseil communautaire a bloqué le processus et conduit la chargée de mission à la démission. Dans un petit EPCI de l’est de la Dordogne, effectuant un PCAET volontaire, la volonté du président de remettre en question, en réunion publique, l’importance et la pertinence du plan d’action, adopté pourtant le matin même par le conseil communautaire, s’est heurtée à l’habileté et à la détermination de sa chargée de mission à faire aboutir la démarche. La difficulté d’impliquer des élus indifférents est parfois ingénieusement contournée… Ainsi, un président d’EPCI de Dordogne en PCAET volontaire est allé jusqu’à « piéger » ses collègues, en inscrivant à l’ordre du jour d’une séance extraordinaire du conseil communautaire quelques votes de subvention, pour mieux garder les élus « captifs » pour l’intervention d’AcclimaTerra qui suivait immédiatement.
Il apparaît donc que la légitimation d’une intervention climatique au sein des EPCI s’explique avant tout par la forte implication d’individus, qui fournissent un travail politique et technique pour défendre ce domaine d’action et sa mise à l’agenda. La mise en œuvre d’instruments de territorialisation reproduit ainsi les inégalités entre EPCI plus qu’elle ne contribue à les résorber : les politiques climatiques locales demeurent bien souvent très fortement individualisées. Si cette appropriation inégale du problème climatique par les acteurs principaux de la territorialisation des plans climat est fondatrice, ce n’est toutefois pas le seul facteur de la non-construction du problème climatique en « urgence » locale et de la réalisation ou non d’un plan climat ambitieux. Les trajectoires territoriales jouent un rôle décisif dans la façon dont l’instrument PCAET « prend » ou ne prend pas dans un territoire donné.
Des trajectoires territoriales favorisant ou non la mise à l’agenda et l’appropriation du PCAET
La montée en puissance réglementaire des vingt dernières années, dont est issu le PCAET, avait pour objectif d’emmener l’ensemble des territoires dans la mise en place de politiques climatiques locales. Mais une approche sociohistorique de l’action publique dans les territoires (Dubois, 2015) nous montre que ceux-ci sont très inégalement équipés pour mettre en œuvre des politiques climatiques ambitieuses, et ce malgré les injonctions étatiques. D’une part, l’implication de longue date dans des dispositifs techniques et financiers contractuels autour de l’énergie, très inégale suivant les territoires, favorise la légitimation d’une politique locale du changement climatique. D’autre part, l’histoire politique et institutionnelle de chaque territoire produit des capacités contrastées à prendre en charge la question climatique. Enfin, la priorisation de l’engagement en matière climatique est complexifiée par des représentations collectives du territoire ou des problématisations environnementales spécifiques (telles qu’un rapport au paysage ayant fait l’objet d’une mobilisation locale ancienne ou l’implantation controversée d’éoliennes terrestres).
Construction inégale d’un savoir-faire de projet
Dans plusieurs des EPCI étudiés, une mise à l’agenda rapide et un processus efficace de production du PCAET s’inscrivent dans un cercle vertueux initié par l’engagement préalable dans des projets menés à bien dans les domaines du développement durable (Agenda 21 local), des économies d’énergie et des énergies renouvelables (appel à projets TEPCV ou programme Cit’ergie) ou de l’aménagement (Scot, PLUI). D’une part, cela a permis aux collectivités de se doter d’effectifs dédiés – même sur une base temporaire – et de développer des capacités d’ingénierie technique et financière de projet, comme le souligne Ent. 619 :
Ça s’est fait naturellement sur 2014-2015 avec de nouvelles opportunités de conventionnement, de financement de postes et de développement de nouveaux projets, et cette fois-ci, des projets qui s’inscrivaient dans la démarche Territoires à énergie positive, donc lancée par la région Poitou-Charentes, reprise ensuite à l’échelle Nouvelle-Aquitaine. […] Et puis 2015, c’est aussi effectivement TEPCV, là, lancé par le ministère de la Transition écologique dans lequel on s’engouffre aussi bien sûr, et donc des opportunités financières sur cette période-là, très intéressantes, qui ont permis de développer de nouveaux projets, d’aller vers de nouveaux acteurs qu’on ne mobilisait pas jusqu’à présent, les acteurs agricoles, les entreprises. […] Alors on a développé une expertise qui a créé un cercle vertueux en fait. On a développé des compétences pour répondre aux premiers appels à projet, on s’est doté de nouvelles compétences sur des nouvelles thématiques.
D’autre part, ce type de démarche a permis d’entraîner progressivement les élus dans la construction d’un engagement territorial sur la transition écologique et énergétique. Il convient de noter également que les territoires qui se sont lancés dans un PCAET volontaire ont pour la plupart expérimenté une démarche telle que TEPCV auparavant.
Dans certains territoires, la mise en œuvre plus précoce d’un Agenda 21 local a également fonctionné comme première approche territoriale des enjeux que l’on retrouve ensuite traités dans les PCAET, et ce sont alors les chargés de mission développement durable qui ont hérité du dossier climatique. De manière similaire, l’ancienne région Poitou-Charentes avait mis en place, en partenariat avec l’Ademe, pour les collectivités qui n’étaient pas contraintes de faire un plan climat, le Contrat local initiatives climat (Clic), lequel finançait 80 % des actions et de l’ingénierie, se souvient la directrice de l’aménagement et de l’urbanisme d’un EPCI du centre des Deux-Sèvres (Ent. 820) :
À ce titre, sur le département des Deux-Sèvres, quasiment tous les EPCI, en tout cas beaucoup d’EPCI, il y en avait au moins quatre, avaient pris ce contrat-là avant même d’avoir un PCAET. Donc, ils avaient déjà une ingénierie, ce qui fait qu’eux, quand il y a eu le PCAET finalement, ils ont basculé sur l’outil.
En revanche, là où une telle démarche n’a pas été possible, soit en raison de l’opposition des élus, soit faute d’avoir saisi les opportunités quand elles se sont présentées, soit pour des raisons propres à la trajectoire du territoire que nous examinons ci-dessous, la collectivité a manqué des ressources minimales pour enclencher le processus d’élaboration d’un plan climat. Nos entretiens avec les chargés de mission montrent que la capacité à identifier les appels à projet pertinents et à y répondre est un savoir-faire à part entière, et que cette capacité d’ingénierie est une ressource précieuse dans un territoire (Mazeaud et Rieu, 2021).
Des héritages politiques structurants ou encombrants
Les dynamiques politiques et institutionnelles de chaque intercommunalité contribuent à éclairer les conditions d’une politisation ou au contraire d’une invisibilisation de la question climatique. Dans la longue succession des réformes dites de « décentralisation », la loi NOTRe21 d’août 2015 a incité au regroupement des CDC existantes et à la redéfinition des frontières de certaines d’entre elles. Il s’agit d’un facteur circonstanciel mais significatif dans l’émergence ou non de la question climatique à l’échelle locale dans la décennie écoulée.
Ainsi, un EPCI du centre des Deux-Sèvres, qui a fusionné en 2017 quatre anciennes CDC et quelques syndicats intercommunaux plus techniques, a également dissous le syndicat de Pays existant depuis 1976, une forme administrative dont l’extinction était prévue par la loi NOTRe. Cette fusion contrainte de cultures politico-administratives différentes, avec une fiscalité disparate, n’a pas été bien vécue par certains responsables communaux, a provoqué des tensions sur la réorganisation des services et sur la question de la réaffectation des équipes initialement employées par le Pays, et a ainsi contribué à freiner la réflexion sur la question climatique et l’élaboration du PCAET, laquelle va seulement démarrer en 2023. Comme le précise Ent. 822 :
Il a d’abord fallu digérer la fusion […] Je pense que ça s’est un peu adouci, mais par exemple ça a énormément cristallisé au moment de la fusion […] quand vous arrivez en disant : « Tadam ! Aujourd’hui on fait de la politique climatique ! » Là on vous dit : « Non, non, mais attends, on n’a toujours pas… on s’est toujours pas mis d’accord sur le niveau de la fiscalité », donc la politique climatique elle passe après.
De façon assez similaire, dans une communauté d’agglomération du centre de la Corrèze, la dynamique vertueuse en matière de développement durable initiée depuis 2009 par un syndicat de Pays a été brutalement stoppée par l’impact de la loi NOTRe et les conflits partisans locaux. Tandis qu’un Pôle d’équilibre territorial rural (PETR) – censé remplacer les pays selon la nouvelle loi – s’est formé avec une partie des CDC de l’ancien pays, la ville principale s’est constituée en communauté d’agglomération de taille plus réduite. Le PCAET élaboré formellement dans ce cadre s’est révélé très technique et « hors-sol », déconnecté des enjeux du territoire ; et il n’est pas encore finalisé. Les bénéfices d’un projet TEPCV, les initiatives dans le bois énergie, la rénovation énergétique des bâtiments, tout est retombé selon la chargée de mission de cette communauté d’agglomération (Ent. 923) :
Et puis voilà, le Pays est tombé, l’agglo a repris le, enfin la compétence avec uniquement cette entrée d’obligation du PCAET. Donc, sur le territoire, finalement, le PCAET, il est pas arrivé pour impulser quelque chose, il est arrivé comme une obligation, enfin au-delà de tout ce qui s’est passé politiquement ça a fait perdre le sens un peu et ça a fait perdre la dynamique qui avait été engagée à l’époque du Pays sur la transition globale construite ensemble, approuvée par tous.
Dans une vaste communauté d’agglomération de l’extrême sud de la région Nouvelle-Aquitaine, ayant rassemblé en 2017 dix anciens EPCI, autour d’une identité culturelle particulière, la question environnementale et climatique y est devenue un levier de légitimation pour le nouvel EPCI. Cependant, un certain nombre de territoires ruraux ou montagneux y ont vu le risque d’une concentration des ressources et des investissements dans les communes du littoral, plus peuplées et prospères. En s’appuyant sur un long travail de problématisation locale des enjeux environnementaux, le président de cette nouvelle structure a pris la décision d’en faire un axe structurant, selon le chargé de mission de cette CDC (Ent. 1024) :
[L’agglomération] c’est une structure assez lourde, donc qui met du temps à se mettre en place, à trouver des rouages et les bons fonctionnements. Mais là, on commence à stabiliser vraiment une organisation politique et administrative, donc on est un peu plus opérants dans la conduite de nos politiques publiques. […] Sur la prise en compte aujourd’hui dans cette nouvelle agglomération du plan climat et des questions climatiques-énergétiques, elle est, comment dire, le président typiquement l’a inscrite comme le chapeau du projet communautaire, comme vraiment une démarche qui doit insuffler et diriger l’ensemble de la conduite des autres politiques publiques.
La construction du PCAET a notamment fait l’objet d’un effort de consultation de la population locale sans équivalent ailleurs dans la région, avec une forte implication des associations du territoire. Elle s’est également articulée avec une réflexion sur la résilience alimentaire, le projet économique du territoire et l’aménagement du foncier dans le cadre d’une démarche parallèle du syndicat du Scot.
Plus généralement, ces exemples montrent que la construction à l’échelle locale de la question climatique comme un enjeu d’action publique ne peut être séparée empiriquement du temps long de la vie institutionnelle des territoires, de la stabilisation de modes de coopération intercommunale efficaces, mais aussi de leur perturbation éventuelle par des conflits politiques locaux ou des réformes institutionnelles intempestives. Quand bien même la temporalité PCAET constituerait par défaut la traduction de l’urgence climatique à l’échelle locale, son incorporation dans le temps long local ne va pas de soi.
Des représentations différentes des enjeux de territoire
Le processus de territorialisation de l’action climatique, qui a pour objectif déclaré de faire de l’EPCI un échelon pertinent pour penser et mettre en œuvre la lutte contre le réchauffement climatique, implique en creux une représentation particulière du territoire, centrée sur les consommations d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre. Cette vision est prédominante dans les diagnostics territoriaux, qui constituent la première étape procédurale du PCAET. De facto, ce cadrage s’effectue en partie au détriment d’autres dimensions du PCAET, comme la prise en compte des vulnérabilités et le volet adaptation (De Godoy Leski et al., 2019 ; Pommerieux et al., 2021). Pour autant, dans plusieurs EPCI, ce cadrage climatique vient en concurrence de définitions alternatives du territoire et de ses enjeux environnementaux, souvent préexistantes.
Dans l’EPCI du centre des Deux-Sèvres déjà évoqué, la dynamique territoriale au sein du syndicat de Pays était structurée autour de la notion de paysage. Dès l’année 2002, un « plan de paysage » avait été produit, avec l’appui de spécialistes universitaires et d’étudiants en art. Une consultation du public avait suscité à l’époque une démarche collective et les élus avaient été convaincus par la capacité de ce dispositif à mettre en avant l’exceptionnalité culturelle, géographique et esthétique du Pays. La construction de ce « plan de paysage » avait légitimé le Pays comme échelle d’action et avait donné lieu à de nombreuses initiatives (préservation des haies, aménagement des entrées de bourgs, etc.). Cette démarche avait été concomitante de celle de la reconnaissance du territoire comme « Pays d’art et d’histoire » par le ministère de la Culture, elle aussi fortement mobilisatrice pour les élus. Aujourd’hui, il est plus difficile de fédérer les élus du territoire autour de l’enjeu climatique, alors que ce cadrage « conservation des paysages » de l’action locale reste prégnant et que certaines actions, comme le développement des ENR sur le territoire – en particulier l’éolien terrestre –, semblent en contradiction directe avec les préconisations du cadrage dominant, comme l’exprime Ent. 825 :
Tout le travail de concertation qui a été fait pour le premier plan de paysage a beaucoup marqué, en fait. Il y a aussi la charte du Pays qui a été faite dans les mêmes années, et en fait il y a eu un élan de concertation en fait dans ces années 2000-2005, ce qui fait qu’en fait il y a eu un bon souvenir, enfin en tout cas les élus ont gardé longtemps le souvenir de ce plan de paysage. Et quand on a travaillé sur le Scot, il était très souvent remis sur le devant de la scène : « Oui, mais il y avait le plan de paysage ! » « Oui, mais le paysage ! »
On retrouve une problématique similaire dans un PETR du nord du département de la Charente, qui rassemble deux EPCI de taille moyenne. Une dynamique de valorisation du paysage avait été initiée voici une vingtaine d’années, fortement axée autour de la biodiversité et du patrimoine botanique de la région, et les techniciens en charge du PCAET étaient plus familiers de cette approche du territoire que des questions énergétiques ou de changement climatique. Seule l’obtention de financements TEPCV en 2018 a permis de recruter des agents formés aux problématiques énergétiques au sein de cette structure. Ce cas suggère que les savoirs et savoir-faire en matière, d’une part, de paysage ou de patrimoine naturel et, d’autre part, de changement climatique, sont bien différents, et qu’une dynamique historique autour des dimensions esthétique et patrimoniale du territoire peut retarder l’émergence d’une expertise locale en matière de climat (les PCAET des deux EPCI ne sont toujours pas finalisés).
Dans ces deux territoires, mais aussi dans plusieurs autres de notre sélection de cas, de très fortes tensions politiques se sont fait jour autour de la question de l’éolien terrestre – y compris là où il paraissait auparavant le mieux accepté –, tensions qui paralysent ou freinent la construction de la question climatique en enjeu d’action publique locale. Alors que la multiplication des projets dans le nord de la Charente et de la Charente-Maritime et le sud des Deux-Sèvres suscite des conflits locaux aux conséquences parfois dramatiques (y compris un suicide d’agriculteur), il devient compliqué pour les services des EPCI concernés de porter l’enjeu du changement climatique et l’engagement du territoire dans la transition énergétique. Dans l’EPCI du nord de la Dordogne déjà cité, la seule réunion publique sur le processus d’élaboration du PCAET qui a été très animée fut celle qui était centrée sur l’éolien, lequel a été ensuite explicitement écarté de la discussion par les élus, dans un département où l’on ne compte aucun mât. Dans un EPCI du nord des Deux-Sèvres, plus rural que celui déjà cité, le président de la structure a subitement mis en question le long travail de légitimation de la question climatique assuré par un chargé de mission et d’autres élus. Comme nous l’a confié l’un d’entre eux (Ent. 1226) :
Ici, il y a eu ici un caillou dans la chaussure du PCAET : les éoliennes […]. Et en 2020, le président a unilatéralement décidé de stopper le processus.
Au moment où l’on voit surgir des mobilisations similaires dans d’autres territoires contre les parcs photovoltaïques au sol ou des projets de méthanisation des déchets agricoles, il apparaît que la transition énergétique étroitement associée à la question climatique déstabilise le rapport au territoire des habitants et remet en question la capacité des élus à piloter un projet territorial correspondant au nouveau cadrage instauré par le PCAET. Non seulement ces évolutions laissent de côté des enjeux tout aussi fondamentaux pour les territoires (évolution du modèle agricole ou maîtrise des mobilités) mais elles font naître de nouvelles résistances à la construction d’une réponse locale à l’urgence climatique, sans lien direct avec les formes de déni rencontrées à d’autres échelles.
Conclusion
Dans la région Nouvelle-Aquitaine, l’échelon des EPCI s’est inégalement approprié l’enjeu climatique comme problème devant faire l’objet d’une action publique locale. Ce processus, censé être amplifié depuis 2015 par l’obligation pour les EPCI de plus de 20 000 habitants d’adopter un PCAET, s’est heurté aux caractéristiques institutionnelles, politiques et organisationnelles des collectivités, mais aussi à un imaginaire territorial où la question climatique n’a pas une place naturelle. À cet égard, il n’y a pas de lien observable entre l’intensité des impacts perceptibles (feux de forêts, inondations, sécheresse, érosion du littoral) sur un territoire et la conscience de l’urgence d’agir, comme nous l’avons constaté dans des CDC du nord et de l’ouest de la Gironde, où le processus PCAET commence, laborieusement, avec plus de 5 ans de retard. De même, en dépit de l’antériorité d’AcclimaTerra, dont le premier rapport remonte à 2013, sur les autres dispositifs régionaux du même type, et de la multiplication des interventions de scientifiques auprès des élus et du public depuis 2018, rien n’indique que la perception locale du changement climatique et de l’urgence à agir soit en moyenne plus forte en Nouvelle-Aquitaine qu’ailleurs.
Plus fondamentalement, le processus de construction de l’« urgence » climatique à l’échelon local demeure partout fragile, à la merci d’une alternance électorale, du départ d’un technicien motivé ou d’un élu porteur. Il apparaît que ces facteurs locaux sont plus décisifs pour expliquer les situations contrastées observées, qu’un déni en soi de la question ou que la difficulté à appréhender le temps long du changement climatique, bien qu’il y ait toujours des personnes en réunion publique pour s’interroger sur la pertinence de l’échelle (« Pourquoi devrions-nous faire quelque chose alors que le problème est à l’échelle planétaire et que nous sommes une goutte d’eau face aux Chinois premiers émetteurs ? » est le type de propos entendu régulièrement suite aux conférences AcclimaTerra).
La logique descendante et technocratique de l’instrument PCAET et le caractère irréaliste du calendrier initial fixé par la loi de 2015 renvoient à une forme étatique de territorialisation qui a sa propre temporalité, ne correspondant pas au temps des territoires. Le temps de l’action publique diffère du temps climatique, il n’est pas le même non plus selon l’échelon politique considéré. De ce point de vue, le PCAET n’est peut-être pas l’instrument le plus adapté pour favoriser l’appropriation de la problématique climatique à l’échelon local, par comparaison avec d’autres dispositifs antérieurs ou parallèles (TEPCV, Cit’ergie). Après Bertrand et Amalric (2017), nous avons rencontré à maintes reprises l’« indifférence » par rapport à ces plans, tant chez les représentants locaux des secteurs socioéconomiques que du côté du grand public. Dans bien des cas, les PCAET adoptés, en l’absence de réelle appropriation, risquent « de n’être que des “coquilles vides” » (Bertrand et Rocher, 2011, p. 202).
L’appropriation de l’instrument PCAET par les acteurs locaux prendra du temps et vraisemblablement plusieurs versions successives du plan climat local, pour autant que le dispositif ne soit pas à nouveau chamboulé par le législateur. Il a fallu de nombreuses années pour que les mêmes acteurs s’approprient le vocabulaire du développement durable, avec lequel la problématique climatique est souvent encore confondue – beaucoup d’élus y font spontanément référence en entretien.
Notre étude a permis d’aller plus loin que la littérature existante en sciences humaines et sociales sur les plans climat locaux en France en diversifiant les cas étudiés dans la plupart des départements de la plus grande région de France. Elle souligne la variété des situations locales, le caractère décisif du portage politique par certains élus et de l’engagement personnel des chargés de mission dédiés pour faire aboutir la démarche, mais aussi l’importance de la trajectoire préalable des collectivités en termes de projets de territoire et de dynamique politique. En revanche, certaines représentations sociales du territoire et certaines controverses autour des ENR jouent comme autant de freins à la promotion de la transition énergétique et, au-delà, à la mise en problème public du changement climatique à l’échelle locale.
Pour autant, nous avons mis l’accent sur des EPCI ruraux en excluant délibérément les plus grandes agglomérations de la région, qui modifient la perspective, d’après les évaluations concernant les villes de plus de 100 000 habitants (Arnauld de Sartre et al., 2021). De plus, il faut garder en tête que ces résultats partiels valent pour une région qui a ses spécificités ; mais il ne semble pas que le SRADDET (Schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires) ou la feuille de route Néo Terra de son conseil régional aient significativement influencé ce qui se déroulait à l’échelle des EPCI. Par ailleurs, la territorialisation de l’action publique climatique est très idiosyncrasique à la structure du gouvernement local en France, qui demeure un pays centralisé, de droit comme de culture. Il y a fort à parier que ces observations seraient difficiles à généraliser ailleurs en Europe ou en Amérique du Nord, hypothèse stimulante que, toutefois, seule une comparaison internationale sérieuse permettrait de valider.
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Les contrats « Territoire à énergie positive pour la croissance verte » (TEPCV) ont été initiés par Ségolène Royal lorsqu’elle était ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie en amont de la COP 21, où la France, pays d’accueil, entendait faire figure de bon élève. Ils ont permis de financer de l’ingénierie et des projets locaux de transition énergétique allant de 500 000 à 2 millions d’euros par contrat. Cit’ergie – renommé récemment climat-air-énergie – est un label géré par l’Ademe, qui permet aux territoires lauréats de profiter d’un accompagnement de long terme par un technicien de l’agence pour la mise en œuvre de politiques climatiques ou énergétiques.
Citation de l’article : Aulagnier A., Compagnon D., Smith A, 2023. Urgence climatique et temporalités locales : la territorialisation contrariée des politiques de lutte contre le changement climatique. Nat. Sci. Soc. 31, 4, 490-501.
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