Open Access
Issue
Nat. Sci. Soc.
Volume 27, Number 3, Juillet/Septembre 2019
Page(s) 342 - 349
Section Vie de la recherche – Research news
DOI https://doi.org/10.1051/nss/2019048
Published online 16 December 2019

© NSS-Dialogues, 2019

Les recherches scientifiques étendent aujourd’hui largement leurs champs d’intervention à des questionnements de plus en plus complexes nécessitant des croisements disciplinaires (Bocquet, 2015). En parallèle, les institutions de recherche s’ouvrent de plus en plus à la société au sens large, mais généralement pour répondre à des demandes du monde industriel. En effet, alors que les résultats des recherches sont souvent présentés comme des réponses aux besoins de la population, ce sont principalement des acteurs économiques puissants ou convenablement structurés qui en tirent les meilleurs bénéfices dans un contexte de forte compétitivité. De leur côté, les citoyens organisés en associations ou en collectifs qui ont des besoins en recherches y ont peu ou pas accès.

Une question se pose alors : comment relier les recherches scientifiques et techniques à la réalité et aux problématiques sociétales actuelles ? Des crises sans précédent affectent les populations et les systèmes écologiques, le climat, les ressources, etc. Comment la science peut-elle contribuer à l’amélioration des conditions de vie et au mieux-être, à l’équilibre des écosystèmes, non pas à partir de besoins supposés, mais à partir des interrogations de la société civile ? Comment le monde de la recherche peut-il se saisir de ces questions vitales ? Des voix se font entendre dans ce sens. De plus en plus de scientifiques s’ouvrent à la société et des initiatives ont commencé à impliquer davantage les citoyens à partir de leurs besoins et de leurs aspirations.

Cependant, dans leur grande majorité, les mondes de la recherche et de la société civile souffrent d’une méconnaissance l’un de l’autre et d’une difficulté à travailler ensemble dans un rapport de travail coopératif plus égalitaire. Pour y remédier, de nouveaux outils de recherche doivent être élaborés.

Parmi les dispositifs existants, celui de Boutique des sciences offre des réponses intéressantes. Connu depuis les années 1970, ce concept qui existe dans de nombreux pays est encore peu utilisé en France. Que recouvre-t-il ? Quels acteurs implique-t-il ? Comment implanter une Boutique des sciences dans une région française ? C’est l’expérience originale, menée par une équipe de l’Université Lille 11 en association avec une partie du milieu associatif régional2, qui est présentée ici. Notre propos s’articule autour de quatre parties. La première présentera le contexte dans lequel l’outil « Boutique des sciences » est réapparu en France avec l’émergence des sciences et recherches participatives. La seconde sera consacrée au concept de Boutique des sciences. La troisième partie exposera, à partir des résultats d’une enquête sociologique, comment les acteurs concernés ont répondu à l’idée d’implantation d’un tel dispositif. Nous terminerons par la description du processus de cocréation de la Boutique des sciences dans la région des Hauts-de-France.

Émergence de dispositifs de recherches participatives

Depuis la fin des années 1990, les relations sciences-société en France ont connu un tournant délibératif avec l’émergence des sciences et recherches participatives. Des dispositifs variés suscitent le dialogue, la délibération ou, plus récemment, la coconstruction des savoirs (Audoux et Gillet, 2011). Des questionnements liés à des problématiques posées par la société civile peuvent ouvrir le monde de la recherche à des sujets davantage ancrés dans le réel (Felt et Wynne, 2007 ; Shirk et al., 2012 ; Houllier et Merilhou-Goudard, 2016).

Dans Horizon 2020, ces rapprochements bénéficient du programme transversal « Sciences avec et pour la société ». Entre 2009 et 2014, le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie développe le programme REPERE (Réseau d’échange et de projets sur le pilotage de la recherche et de l’expertise) qui repose sur la participation des associations dans les thématiques du développement durable3. En 2012, la mission CNRS « Sciences et citoyens4 » contribue à formaliser la notion de recherche coopérative. La mission actuelle « Sciences en société » élargit le domaine d’intervention du CNRS en la matière5. Une étude de l’association Sciences citoyennes, financée en 2013 par la Fondation de France, révèle le « continent invisible » de 200 expériences de recherches participatives6. En janvier 2014, au sein de l’Institut écologie et environnement (INEE) du CNRS, un Groupement de recherche du CNRS intitulé « Participatory Action Research and Citizen Science » (GDR PARCS7) est créé pour faire émerger une communauté de recherche avec un cadre de réflexion centré sur le concept de recherche-action participative (RAP) (Chevalier et Buckles, 2013). Le colloque-forum d’Alliss (Alliance Sciences-Société) organisé en janvier 2015 met au jour plus de 400 projets de recherche acteurs-chercheurs en France8. Ce courant participatif avait touché depuis longtemps l’Amérique du Nord avec les « Community-Based Research » (Sclove et al., 1998) aux États-Unis ou le programme ARUC (Alliance de recherche université-communauté) au Canada. Ces derniers ont inspiré les programmes régionaux français : « Partenariats institutions-citoyens pour la recherche et l’innovation » (PICRI) en Île-de-France créé en 20069, « Appropriation sociale des sciences » (ASoSc) en Bretagne en 2009, « Chercheurs-citoyens » en Nord-Pas-de-Calais en 201110.

Les Boutiques des sciences, un outil original pour rapprocher recherche scientifique et société civile

Les Boutiques des sciences (Science Shops en anglais) sont nées en Europe du Nord. La première a vu le jour à Amsterdam en 1975 (Zaal et Leydesdorff, 1987). Les années 1980 ont marqué le début d’un grand mouvement de dissémination dans de nombreux pays, notamment en Europe de l’Est (Roumanie, Estonie, etc.) ainsi qu’au Moyen-Orient, en Asie et en Australie. Ces Boutiques des sciences se sont généralement maintenues alors qu’en France, elles avaient totalement disparu à la fin des années 1980 (Stewart, 1988). Au cours des années 2000, les Boutiques des sciences néerlandaises impulsèrent une dynamique européenne aboutissant à la création du réseau Living Knowlegde11.

Tous les projets développés dans les Boutiques des sciences ont comme point commun d’effectuer des recherches pour la société civile selon un mode de participation consultatif mais encore rarement coopératif (Neubauer, 2002). Les Boutiques des sciences s’installent généralement dans les universités, en particulier aux Pays-Bas où elles peuvent influencer les cursus des étudiants (Hende et Jorgensen, 2001). En France, bénéficiant de financements européens, des Boutiques des sciences ont réapparu à Grenoble12 en 2010 et à Lyon13 en 2013.

Composition et fonctionnement d’une Boutique des sciences

Les Boutiques des sciences associent généralement quatre acteurs : les organisations de la société civile, l’équipe de la Boutique des sciences, les chercheurs et les institutions. Ces dernières ne participent pas aux travaux de la Boutique des sciences, mais conditionnent son type de structure et son positionnement au travers des moyens qu’elles affectent.

Le fonctionnement des Boutiques des sciences se décline en sept grandes phases de travail (Leydesdorff et Ward, 2005 ; Mulder et Straver, 2015) :

  • 1. Recueil de la demande sociale et définition de la problématique de recherche. Différentes formes de recherches sont possibles : étude documentaire, prospective ou recherche approfondie (Piron, 2009) ;

  • 2. « Traduction » de la demande (Audoux et Gillet, 2011), principale valeur ajoutée des Boutiques des sciences, consistant à problématiser la demande originelle dans des logiques scientifiques ;

  • 3. Sélection des demandes selon des critères définis (objectif d’intérêt général, mise à disposition publique des résultats, etc.) ;

  • 4. Mise en relation avec des chercheurs et/ou des étudiants intéressés par la problématique ;

  • 5. Recherche proprement dite selon des modalités diverses ;

  • 6. Restitution du travail, généralement sous la forme de deux rapports, l’un vers l’institution scientifique et l’autre vers les organisations de la société civile. La restitution peut donner lieu à un événement public ;

  • 7. Utilisation des résultats et évaluation de la recherche par la pertinence et l’efficience de l’activité à moyen et long terme (Boere et Heijman, 2012 ; Emery et al., 2015).

Implantation de la Boutique des sciences Nord de France

Comment faire connaître et faire émerger l’idée de Boutique des sciences dans une région, qui n’en a quasiment jamais entendu parler, en associant les acteurs locaux et les chercheurs ? Pour répondre à cette question, une étude de préfiguration14 a été menée en 2014 avec l’aide d’un financement de la région Nord-Pas-de-Calais15. Cette étude a consisté à réaliser des enquêtes auprès des différents acteurs, organiser des événements destinés à faire connaître le concept et à concevoir collectivement la Boutique des sciences, analyser les résultats et rédiger le rapport de préfiguration.

Le comité de pilotage

L’étude de préfiguration a été assurée par un comité de pilotage pluriacteurs composé de personnels universitaires (une physicienne, une sociologue, un chercheur en STS, des stagiaires étudiants de master en sociologie et en gestion) et de représentants associatifs. Ce comité a assuré diverses fonctions dont les deux principales ont été la réalisation d’enquêtes et l’organisation des événements avec des acteurs-clés. Il a mis en place un conseil scientifique et d’orientation pluriacteurs dont le rôle est de décider des orientations de la Boutique des sciences. Ce conseil a élaboré une charte dont les règles éthiques garantissent des relations d’égalité et de coconstruction entre partenaires et a contribué à la sélection, la reformulation et l’aiguillage des demandes reçues.

Les enquêtes

Pour estimer comment une Boutique des sciences serait perçue dans la région, mais aussi pour faire connaître ce concept16, des enquêtes quantitatives et qualitatives ont été réalisées auprès des étudiants, des chercheurs et des organisations de la société civile. Les questionnaires et les grilles d’entretien se sont appuyés sur des interviews préalables menées avec les responsables de Boutiques des sciences en France (Grenoble, Lyon), aux Pays-Bas (Wageningen) et en Belgique (Louvain-la-Neuve).

Enquête chercheurs

Un questionnaire destiné aux personnels des Universités Lille 1 et Lille 3 ainsi que de l’École nationale supérieure de chimie de Lille a été envoyé entre avril et août 201417. Sur 4 33618 personnels19, 541 (dont 254 réponses complètes) ont répondu à l’enquête en ligne.

Les répondants sont plus jeunes de cinq années que la moyenne d’âge de tous les personnels universitaires, et, plus souvent, des femmes. Ils travaillent dans toutes les disciplines (sciences exactes, expérimentales, économiques, sociales, humaines) et consacrent la majeure partie de leurs travaux à la recherche fondamentale et appliquée. 50 % d’entre eux participent à des recherches interdisciplinaires mais très peu à des recherches participatives.

Enquête étudiants

L’enquête par questionnaires auprès des étudiants de l’université Lille 1 a été réalisée en avril et mai 2014. Sur 18 000 étudiants20, 741 ont répondu au questionnaire en ligne, dont 422 réponses complètes21. Les répondants sont en moyenne âgés de plus de 23 ans, sont en L3 ou en master22 et sont plus souvent des femmes. Ils sont d’origines sociales variées : enfants de cadres à 34 %, d’employés à 22 % (contre 10 % dans l’université) et d’ouvriers à 13 %. 45 % des répondants sont boursiers (contre 34 % pour l’ensemble des étudiants). Toutes les disciplines sont représentées.

Enquête organisations de la société civile

Une enquête en ligne par questionnaires a été lancée auprès d’une centaine d’associations du réseau de la Maison régionale de l’environnement et des solidarités (MRES), mais devant le faible nombre de réponses en ligne, une vingtaine de ces associations et collectifs ont été rencontrés lors d’entretiens au cours desquels le questionnaire a été rempli23 (au total 23 questionnaires remplis).

Les associations répondantes ont des profils très variés. 10 n’ont pas de salarié ou en ont un seul, 11 en ont 2 ou plus. 11 ont des budgets supérieurs à 100 000 €, 3 ont des budgets compris entre 50 000 et 100 000 €. La plupart ont des champs d’action locaux (11) et/ou régionaux (15). Les domaines d’activité les plus représentés sont : défense de l’environnement, défense des usagers, éducation et formation et, dans une moindre mesure, défense des droits et des causes, culture, coopération internationale, villes en transition ou développement territorial (Fig. 1).

thumbnail Fig. 1

Domaines d’activité des associations ayant répondu à l’enquête sur la Boutique des sciences Nord de France.

Des caractéristiques et des intérêts communs aux répondants

Alors qu’en 2014, les Boutiques des sciences sont quasi inconnues dans la région, ce concept rencontre un vif intérêt pour l’ensemble des acteurs. Les chercheurs trouvent le projet de Boutique des sciences « intéressant » (63 %) ou « très intéressant » (30 %). 60 % pensent que leur domaine de recherche pourrait aider à répondre à des demandes de la société civile et plusieurs dizaines disent qu’ils pourraient éventuellement contribuer à la Boutique des sciences. Retenons qu’une trentaine de chercheurs se disent susceptibles de s’impliquer plus fortement (Fig. 2). Cette caractéristique conforte l’idée de projet d’une Boutique des sciences.

Les étudiants répondants sont 90 % à comprendre la fonction et la finalité d’une Boutique des sciences et 60 % à penser qu’elle peut les aider à réaliser leurs projets (Fig. 3). 81 % seraient intéressés par un stage, 80 % seraient motivés par la curiosité scientifique et 60 % mettent en avant l’utilité pour leur cursus – donc leur carrière. La conviction représente moins souvent une motivation personnelle (35 %).

En ce qui concerne la demande potentielle, près de 4 associations répondantes sur 10 sont confrontées à des problématiques scientifiques ou techniques et 19 sur 23 pensent que la Boutique des sciences pourrait répondre à leurs attentes : contribuer à la démocratisation de la recherche (19 sur 23), préserver la société et la nature (17), identifier de nouveaux problèmes (16), résoudre des problèmes existants (15). Pour quelques-unes d’entre elles24, la Boutique des sciences pourrait créer plus de liens entre les associations et la recherche, soutenir financièrement des associations en attente de financements de projets retenus, instaurer un cadre de dialogue équitable entre les acteurs ou participer à l’enrichissement des projets de l’association.

thumbnail Fig. 2

Implication potentielle des chercheurs répondants dans le projet de Boutique des sciences Nord de France.

thumbnail Fig. 3

Opinion des étudiants répondants sur le projet de Boutique des sciences Nord de France.

Une Boutique des sciences coélaborée

Pour mettre en place la Boutique des sciences dans le contexte local, il paraissait logique d’utiliser des méthodes associant tous les acteurs et des représentants des institutions locales. Dans ce but, deux événements ont été réalisés :

  • Une journée d’études pour faire connaître les Boutiques des sciences et susciter un premier échange ;

  • Un atelier-scénario pour imaginer la future Boutique des sciences.

La journée d’étude

La journée d’étude a rassemblé une cinquantaine de personnes avec une représentation équilibrée des acteurs. Des responsables des Boutiques des sciences de Lyon, Bruxelles, Louvain-la-Neuve et Grenoble ont été invités à présenter leurs activités. La journée avait deux objectifs : informer sur les missions des Boutiques des sciences et imaginer la future Boutique des sciences Nord de France en identifiant des acteurs qui pourraient contribuer au projet. Elle comportait trois temps forts : (i) présentation des premiers résultats de l’étude de préfiguration et discussion autour des expériences des Boutiques des sciences invitées ; (ii) échange entre les différents types d’acteurs sur ce que pourrait être la future Boutique des sciences ; (iii) débat autour d’une table ronde « Les Boutiques des sciences, outils de coconstruction des savoirs ? ».

L’atelier-scénario

Un atelier-scénario permet d’élaborer des visions d’avenir sur des sujets d’intérêt locaux en réunissant différents acteurs dont les échanges permettent d’obtenir des scénarios plus robustes (Andersen et Jaeger, 1999). Son succès dépend de la volonté partagée par les acteurs de faire émerger une solution et de la mettre en œuvre à partir de leurs capacités d’intervention.

L’atelier-scénario s’est déroulé en deux soirées consécutives de travail pour élaborer les scénarios possibles de Boutique des sciences (Savoia et al., 2017). 16 personnes parmi les plus motivés des participants à la journée d’étude ont été sollicitées. Quatre groupes réunissant chacun un type d’acteurs différents (organisations de la société civile, chercheurs, étudiants, institutions) et un membre du comité de pilotage ont imaginé le fonctionnement, l’organisation interne et la composition de la Boutique des sciences. Cette phase a permis de collecter des thèmes communs aux quatre groupes d’acteurs : formation, dissémination, équité/égalité, implantation/territoire, accessibilité, gouvernance/structuration, indépendance, financements, reconnaissance (des savoirs, des acteurs), expertise/contre-expertise, alerte, réseaux, interface, charte, coconstruction, inter/transdisciplinarité.

Pendant la deuxième séance, les types d’acteurs ont été mélangés et répartis en quatre nouveaux groupes. Ils ont travaillé chacun sur deux thèmes qui ont été sélectionnés lors d’un vote parmi ceux qui avaient émergé la veille : 1- coconstruction/transdisciplinarité, 2- équité/égalité/charte, 3- formation/dissémination, 4- réseaux/interfaces. Pour chaque thème, les groupes inscrivaient sur des posters l’état des lieux, l’état souhaité, les activités nécessaires pour le réaliser et les obstacles possibles.

Pour amener les participants à se projeter dans le dispositif, chaque groupe a été invité à répondre aux questions suivantes : (i) Quelles activités sont à mettre en œuvre pour répondre à la question thématique en gardant les scénarios utopiques en tête ? (ii) Qui peut les mettre en œuvre ? Qui peut y contribuer ? (iii) Quelles décisions sont alors à prendre ? (iv) Quels obstacles sont attendus ? La participation des acteurs a été assidue, critique et riche en propositions, permettant de définir un plan d’action pour la future Boutique des sciences.

La Boutique des sciences Nord de France est opérationnelle depuis janvier 2016. Sa structuration juridique et administrative est celle d’un service de la Communauté d’universités et d’établissements Lille Nord de France25. Elle dispose de locaux26 et fonctionne avec un bureau exécutif, un conseil scientifique et d’orientation pluridisciplinaire et pluriacteurs. Une charte a été rédigée pour fixer le cadre de travail du dispositif : égalité entre les acteurs, coconstruction de la problématique de recherche, reconnaissance de tous les savoirs et diffusion des résultats comme biens communs. Elle informe les acteurs sur leur engagement avant le démarrage d’un projet. Cette architecture résulte directement des travaux de l’atelier-scénario.

Avec deux projets par an, la Boutique des sciences doit encore se conforter sur trois points : ressources financières, personnel et médiatisation pour susciter les demandes des organisations de la société civile. Une plateforme internet devrait permettre à tous les acteurs de trouver les informations, poser des questions, faire une demande de recherche, s’inscrire à des événements liés aux activités de la Boutique des sciences, connaître les autres Boutiques des sciences françaises et européennes, etc. La stimulation et la collecte de la demande sociale pourraient bénéficier d’un réseau de points de contact à constituer au niveau régional (têtes de réseaux associatives, médiathèques, maisons des associations). De même, un réseau de correspondants au sein des universités et des laboratoires de recherche pourrait faciliter les contacts avec les étudiants et les encadrants. Un dernier objectif concerne l’analyse réflexive et évaluative des projets menés par la Boutique des sciences et des outils conceptuels et pragmatiques originaux en matière de recherche participative, comme la coconstruction, ses représentations, les modalités et difficultés de sa mise en œuvre.

Conclusion

La Boutique des sciences Nord de France est un dispositif de médiation « active » permettant de mettre en relation une demande sociale de recherche avec une équipe de recherche académique. Elle accompagne le travail de recherche dès la phase de problématisation et jusqu’à la diffusion des résultats dans un rapport d’égalité et de coconstruction. Avec la volonté d’associer dès le début tous les acteurs à la coconception (journée d’étude puis atelier-scénario) et à la coconstruction du dispositif (comité de pilotage, conseil scientifique et bureau multiacteurs), il est remarquable de constater la volonté d’implication des acteurs, en particulier dans le milieu académique dont l’adhésion n’était pas évidente. Cela montre que l’ouverture de structures de recherche et d’enseignement supérieur aux problématiques sociétales trouve un écho favorable au sein des personnels de recherche. De même, de nombreuses associations ont répondu positivement aux demandes d’entretiens et aux invitations à la journée d’étude et à l’atelier-scénario. La Boutique des sciences Nord de France constitue donc une réponse originale et utile au constat que le secteur grandissant des organisations de la société civile traitant de questions d’intérêt général a besoin de recherches mais a peu accès au monde scientifique.

Après deux projets pilotes en 2016 et en 2017, d’autres ont été réalisés, sont en cours ou en préparation. Ce démarrage réussi ne doit pas masquer les difficultés de sa mise en œuvre dans un cadre de restriction budgétaire et dans un contexte de fragilisation du tissu associatif. La faiblesse de la prise de conscience par les universités de l’émergence des sciences et recherches participatives, malgré les rapports ministériels, constitue un réel point de freinage. La coconstruction entre partenaires d’un processus de recherche est une méthode encore peu pratiquée, ce qui rend sa mise en œuvre difficile. La Boutique des sciences Nord de France a donc été amenée à envisager une formation des acteurs. L’estimation des apports des Boutiques des sciences en termes de compréhension et de rapprochement entre les mondes de la recherche et de la société civile, d’utilité publique pour les associations et la société et de méthodologie originale – coopération et coconstruction dans des rapports d’égalité entre acteurs et entre savoirs – devrait faciliter leurs reconnaissances et leurs développements.

Remerciements

Nous adressons nos plus vifs remerciements à Glen Millot (Sciences citoyennes), Florence Belaen et Davy Lorans (Boutique des sciences de Lyon), Mireille Havez (Maison régionale de l’environnement et des solidarités), Loïc Fitament et Jorge-Luis Baldarrago (étudiants stagiaires) pour leurs contributions tout au long de la préfiguration de la Boutique des sciences Nord de France ou pour leurs précieux conseils au moment de la rédaction de ce texte.

Références

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1

Devenue Université de Lille. L’étude a été réalisée avant la fusion des universités lilloises.

2

Ce travail de recherche a été mené dans le cadre de l’étude de préfiguration de la Boutique des sciences Nord de France réalisée en 2015 par Jorge Luis Baldarrago, Bertrand Bocquet, Loïc Fitamant, Mireille Havez, Bénédicte Lefebvre, Glen Millot et Annunziata Savoia (www.cue-lillenorddefrance.fr/?q=culture-patrimoine-societe/boutique-des-sciences).

3

Une suite est donnée en 2015-2018 par la mise en place d’une commission pluraliste et un appel à manifestation d’intérêt : http://www.programme-repere.fr

9

Le programme a été arrêté en 2016.

10

Idem.

12

Boutique associative.

13

Boutique universitaire.

14

Voir note 2.

15

Regroupée aujourd’hui avec la région Picardie pour former la région des Hauts-de-France.

16

Le questionnaire comportait, au milieu de son déroulement, une courte présentation des Boutiques des sciences : historique, concept…

17

Notre souhait au départ était d’enquêter dans les trois universités de Lille, mais les démarches pour pouvoir diffuser les questionnaires par courriel ont demandé un temps qui n’était pas compatible avec les délais de l’enquête elle-même.

18

2 913 à Lille 1 et 1 423 à Lille 3.

19

Enseignants-chercheurs, chercheurs et ingénieurs CNRS.

21

Ce nombre n’est pas négligeable en comparaison avec d’autres enquêtes en ligne effectuées auprès des étudiants.

22

Les étudiants de master 1 ou 2 sont davantage intéressés par un stage Boutique des sciences car ils sont plus âgés que ceux de licence.

23

Toutes les associations rencontrées ont répondu au questionnaire, parfois lors de l’entretien.

24

La liste qui suit a été construite à partir de la rubrique « autres » du questionnaire d’enquête et lors des entretiens (voir rapport complet, note 1).

26

Elle est hébergée à la Maison européenne des sciences de l’homme et de la société (MESHS).

Citation de l’article : Lefebvre B., Savoia A., Bocquet B., 2019. Perception et émergence d’une Boutique des sciences dans la région des Hauts-de-France. Nat. Sci. Soc. 27, 3, 342-349.

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Domaines d’activité des associations ayant répondu à l’enquête sur la Boutique des sciences Nord de France.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Implication potentielle des chercheurs répondants dans le projet de Boutique des sciences Nord de France.

Dans le texte
thumbnail Fig. 3

Opinion des étudiants répondants sur le projet de Boutique des sciences Nord de France.

Dans le texte

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